Chine : les fidèles de la “Petite Mecque” redoutent l’éradication planifiée de l’islam

Parsemée d’une trentaine de mosquées majestueuses dont les dômes verts surplombent son paysage depuis fort longtemps, Linxia, la « Petite Mecque » chinoise nichée en plein cœur de la province du Ningxia, prend peur devant la répression qui la frappe brutalement, orchestrée d’une main de fer par Pékin.

Ce véritable havre de paix pour de nombreux Huis – une minorité musulmane composée de plus de 10,5 millions de fidèles disséminés à l’ouest et au centre de la Chine – au milieu duquel se dressent de magnifiques minarets, tels des phares de l’islam, notamment ceux de la mosquée historique de Nanguan édifiée en l’an 1200, sous la dynastie Yuan, redoute de subir le même sort effroyable que les 9 millions de Ouïghours persécutés sans relâche dans la province autonome du Xinjiang.

La célèbre mosquée de Nanguan bâtie en l’an 1200

Derrière le paravent de la lutte contre l’extrémisme et drapée dans son intolérance religieuse d’Etat, la toute-puissante Chine vient en effet de porter un grand coup à l’enseignement coranique à Linxia et, par ricochet, à la fréquentation de ses mosquées, en interdisant formellement toute instruction religieuse aux mineurs de moins de 16 ans. Cette mesure liberticide est assortie de son corollaire : la réduction drastique du nombre d’étudiants, âgés de plus de 16 ans, en sciences islamiques et la limitation non moins draconienne des habilitations délivrées aux imams.

« Le vent a tourné. Franchement, j’ai très peur qu’ils mettent en place le modèle du Xinjiang ici », a confié, d’une voix tremblante d’émotion et en préservant son anonymat, un imam estimé de tous dans la cité phare du Ningxia.

« Ils veulent laïciser les musulmans, couper l’Islam à la racine. De nos jours, les enfants ne sont pas autorisés à croire en la religion, seulement dans le communisme et le parti », a-t-il renchéri, assistant, impuissant et anxieux, à la désaffection forcée de ses cours par plus de 1 000 élèves et, au-delà, à l’écrasement de la liberté religieuse par le rouleau compresseur du tout-répressif, au point d’obliger les mosquées à ne plus faire retentir l’Adhan et à hisser l’étendard national. Un mélange des genres proprement ahurissant !

Ce dernier se désole d’autant plus de ce durcissement politique de Pékin et de son ingérence tyrannique, sans limites, dans le culte musulman, que la communauté musulmane de Linxia a toujours cohabité en parfaite harmonie avec les Hans, ces compatriotes placés du bon côté de la barrière, car appartenant à l’ethnie majoritaire.

La peur de l’avenir, irrépressible, se propage rapidement parmi les fidèles de la « Petite Mecque » chinoise, chacun l’exprimant avec force ou un profond sentiment d’accablement, à l’instar de Ma La, une mère de famille musulmane de 45 ans : « Nous avons peur, nous avons très peur, si cela continue comme ça, après une génération ou deux, nos traditions disparaîtront », a-t-elle déclaré en ayant du mal à contenir ses larmes.

Et ce n’est pas l’analyse émise par William Nee, un chercheur chinois à Amnesty International, qui sera de nature à dissiper l’immense frisson de peur qui parcourt aujourd’hui les rangs des Huis de Linxia : « Pékin vise les mineurs afin de s’assurer que les traditions islamiques disparaissent, tout en renforçant son contrôle sur l’aspect idéologique », a-t-il commenté.

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