Jeunesse africaine et le drame de l’immigration clandestine

Une responsabilité partagée

« Les jeunes doivent rester en Afrique parce que c’est le continent de l’avenir. Si tous les jeunes africains partent de l’Afrique, on ne sait pas qui va venir changer les choses » a dit l’artiste chanteur ivoirien Tiken Jah Fakoly récemment au sortir d’un spectacle à Abidjan. Ainsi de nombreux jeunes africains, notamment des pays au sud du Sahara laissant derrière eux de nombreuses potentialités non exploitées par leurs dirigeants pour aller à la quête d’un hypothétique eldorado. Il se passe rarement une semaine sans qu’un drame de ce genre ne se produise sur la méditerranée devenue aujourd’hui un grand cimetière à ciel ouvert où les requins et autres animaux aquatiques se nourrissent de la chair de ces jeunes africains partis à la recherche de l’hypothétique eldorado. Les images d’une vie d’abondance, de facilité, de prendre le chemin de l’immigration clandestine au cours duquel certains laissent la vie dans le désert ou la mer. Selon les chiffres de l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) en 2017 au moins 3116 migrants sont morts ou ont disparus en tentant de traverser la méditerranée pour rejoindre l’Europe. Les problèmes migratoires sont au cœur de tous les discours au nord comme au sud. De multiples enjeux politiques, sociaux, économiques et financiers sont liés à ce phénomène qui prend des allures tragiques avec des drames successifs.

Il est temps qu’on arrête de parler et qu’on agisse. Pour nous le meilleur moyen contre la migration clandestine est le développement dans un continent où plus de 70% de la population a moins de 25 ans, il faut offrir des opportunités sur place pour tous les ruraux que pour tous les urbains, lettrés et analphabètes, formés ou non. Il faut que les migrants potentiels puissent rester et vivre décemment dans leur pays, ce qui sous entend éducation, formation et emploi. Le concept de migration vient du latin « immigraré » qui veut dire entrer de manière temporaire ou définitive dans un pays dont on n’a pas la nationalité. Elle est plus ancienne que le monde. Auparavant, elle était dénommée le mouvement des personnes entre les différents pays. La migration est un phénomène aussi vieux que le monde, elle n’est pas automatiquement négative, elle est nécessaire pour la stabilité même de l’humanité. Par nature, l’homme est un être mobile, qui aime la liberté de mouvement, qui n’aime pas vivre en vase clos, isolé.

Les États-Unis qui sont la première puissance du monde aujourd’hui constituent un exemple vivant et positif de la migration. Ce sont les migrants qui ont fait de ce pays ce qu’il est de nos jours. Les causes de l’immigration clandestine sont nombreuses mais chaque pays africain a ses raisons propres. En général, selon le baromètre des constats des causes de l’immigration irrégulière de l’ONG « transparency international » les pays africains sont mal gouvernés par leurs dirigeants respectifs. C’est cela qui caractérise ces fuites massives des bras valides ou de cerveaux en Europe tout en abandonnant carrément l’Afrique qui est le berceau de l’humanité. Mais avant, il faut signaler que certains candidats à l’immigration partent par nécessité. A ce stade, il est important d’indiquer que les causes les plus profondes qui poussent les jeunes africains à tenter l’aventure sont nombreuses. Parmi lesquelles, on peut citer entre autres la mauvaise gouvernance des chefs d’Etats africains, l’inadéquation formation- emploi proposées aux jeunes et le marché de l’emploi, l’injustice ou l’arbitraire, la restriction de la liberté d’expression, le chômage…. Les pays africains peuvent bel et bien contribuer à résorber l’immigration clandestine en faisant des poursuites judiciaires contre des réseaux de passeurs, ainsi que les auteurs et complices de maltraitance contre les jeunes migrants; en facilitant l’obtention de visas pour les candidats à l’immigration irrégulière. Tout comme il est nécessaire d’établir une coopération africaine et sud-sud pour lutter efficacement contre le chômage et le désespoir qui constitue un terrain fertile à l’immigration clandestine ; il est autant nécessaire de mettre en place un cadre de collaboration efficace entre les pays de départ et les pays de destination en vue de mettre en œuvre des projets communs en faveur de la sédentarisation des jeunes dans leur pays d’origine et la nécessité de programmes nationaux des jeunes, avec des projets d’activités générateurs de revenus, pour les jeunes en quête d’emploi .

Cette problématique d’immigration clandestine qui est aujourd’hui un sujet d’actualité et non des moindres a inspiré l’AJMCI (Association des Jeunes Musulmans en Côte d’Ivoire) qui pour son 9ème Congrès Ordinaire tenu du 27 au 30 décembre 2018 dernier à Abidjan a choisi comme thème central «La jeunesse ivoirienne face au drame de l’immigration clandestine : une responsabilité partagée ».

Ce même thème a aussi retenu l’attention de la jeunesse communale d’Abobo pour son festival annuel. Car notre pays la Côte d’Ivoire n’échappe pas a ce fléau des temps modernes qui rime avec déception, humiliation, froid, maladie, c’est ce que vit la majorité des migrants qui arrivent en Europe. Nous pensons humblement qu’il faut sensibiliser les jeunes à rester chez eux et aussi celle d’inviter les autorités à créer des fonds d’aide pour certains car selon OIM 85% des migrants ivoiriens avaient un emploi avant leur départ et 75% d’entre eux sont célibataires.

Koné Sékou Ismaël, Journaliste. Konesekouismael @yahoo.fr