Quatre raisons pour lesquelles je continue le sport pendant le Ramadan

Au-delà de représenter 30 jours de jeûne, le Ramadan est un mois où l’on se recentre sur nous-mêmes et sur notre Créateur. Je le vois complètement comme un « mois pansement », où chaque jour est l’occasion de prendre soin de son âme. Pour beaucoup, c’est un mois d’excès en termes d’alimentation : friture, repas gargantuesques, gâteaux à profusion… Si manger fait clairement partie des plaisirs de la vie, accorder de l’attention à son corps et à son bien-être mental fait, d’après moi, également partie de nos devoirs. D’autant plus lors de ce mois béni.

 

 

Parce que mon corps est une amana

Une amana est un bien que l’on nous confie et que l’on devra rendre après un certain délai que le propriétaire aura fixé. Il faut en prendre soin et le rendre intact. Le corps en fait partie : il est l’un des bienfaits dont Allah nous a gratifié-e-s. Rappelez-vous la manière dont le Prophète Muhammad est décrit physiquement : « Son corps était bien proportionné (…) ses épaules, biceps et mollets étaient solides. » Notre apparence compte, elle nous représente.

Je fais du sport toute l’année, plusieurs fois par semaine, principalement pour entretenir cette amana dont je suis responsable. Arrêter cette activité physique sous prétexte de jeûne serait un non-sens pour moi.

Mais bien sûr, il n’est pas question de faire n’importe quoi, en faisant des séances aussi intenses que d’habitude, en soulevant des charges aussi lourdes ou en recherchant la performance. Ce n’est tout simplement pas le moment. Le corps est éprouvé par le jeûne, fatigué des nuits de sommeil découpées, le but n’est pas de le casser. C’est pour cela qu’il est important d’apprendre à l’écouter en adaptant son effort à ce contexte bien spécial. Je fais des séances plus courtes, moins intenses, mais le bien-être qu’elles me procurent est lui toujours bien réel.

Si vous n’avez pas l’habitude de faire du sport le reste de l’année mais que vous souhaitez commencer à cette période, je vous conseillerais juste de faire de la marche rapide. Une trentaine de minutes, le plus rapproché possible du moment de la rupture du jeûne. Et bien sûr, ne relâchez pas vos efforts une fois ces 30 jours terminés : profitez du reste de l’année pour gagner en intensité et passer de prochains mois de Ramadan d’autant plus sportifs.

 

Parce que cela m’aide à m’organiser

La cuisine, c’est aussi l’un de mes plaisirs. Mais y passer la journée complète alors que je suis censée tout faire ce mois-ci pour me rapprocher d’Allah, je trouve ça dommage. De la même façon que je ne vois pas le mois de Ramadan comme un mois pour s’empiffrer, je ne le vois pas non plus comme « le mois de la cuisine ». La journée, en plus du travail, il y a beaucoup à faire : lecture, méditation, préparation du repas… Le tout sans négliger ses proches. Beaucoup vous diront « Je n’ai pas le temps pour le sport ».

Mais on peut essayer de trouver du temps. D’autant qu’en pratiquant du sport, vous pouvez en même temps méditer. Savoir que je me suis fixé-e l’objectif de continuer le sport, cela me force à m’organiser : je prépare quelques plats à l’avance que je congèle, je planifie mes journées en fonction de ce que j’ai prévu d’y faire. En islam aussi, l’oisiveté est mère de tous les vices.

 

Parce que j’ai d’autant plus l’impression de me purifier

Le mois de Ramadan est un mois de purification. Il ne se résume pas à un jeûne alimentaire, c’est un état d’esprit que l’on y développe avec l’ambition de le prolonger tout au long de l’année. La plupart des musulman-e-s se fixent des objectifs de lecture, font tout pour éviter de s’énerver, détournent leurs yeux de la télévision, des réseaux sociaux et de tout ce que l’on peut y trouver pour nous faire perdre du temps. C’est un peu le « ménage annuel » de notre âme.

Après une bonne séance de sport, je me sens épuisée, mais dans un état second. Pendant quelques secondes, mon âme est ailleurs. C’est cet état que j’apprécie et que je veux retrouver, y compris pendant le Ramadan. Et quelle joie de l’atteindre alors que j’ai passé ma journée à jeûner ! La récompense est d’autant plus agréable que l’effort est difficile.

Grâce à ce temps consacré à l’effort, j’ai tout oublié des tracas du quotidien, je me suis totalement recentrée sur moi-même et suis donc beaucoup moins déconcentrée par la suite lorsque je prie ou lorsque je lis quelques pages du Coran. Je me sens totalement dévouée à ce que je fais au moment présent. Le sport a ce bienfait de nettoyer totalement votre tête des pensées négatives. Personnellement, quand je termine une séance de sport et que je repense à mes angoisses de la journée, je me dis dans 99 % des cas « Ce n’était pas si grave ».

 

L’ancienne haltérophile des Emirats Arabes Unis, Amna Al Haddad

L’ancienne haltérophile des Emirats Arabes Unis, Amna Al Haddad

Parce que je savoure mieux le ftour, le repas de rupture du jeûne

Je le disais plus haut, manger fait partie des plaisirs de la vie. D’ailleurs, on ne va pas se mentir, à la base, je ne fais pas du sport pour le plaisir… Mais bien pour manger sans culpabiliser ! A la fin d’une journée de jeûne, vous rêvez juste d’un grand verre d’eau fraîche et d’un bon repas dont vous allez savourer chaque bouchée.

En temps normal, m’offrir un bon dessert quand je sais que j’ai transpiré à grosses gouttes pendant ma séance de sport est un vrai plaisir. Pourtant, je ne jeûne pas et je mange à ma faim pendant toute la journée. Alors imaginez la joie de savourer un repas complet, après une quinzaine d’heures sans rien avoir porté à votre bouche et après une séance de sport ! Je peux vous le dire, le plaisir est décuplé !

Vous avez l’impression de « mériter » d’autant plus ce que vous mangez. Et comme vous savez que vous en demandez beaucoup à votre corps, vous mangerez sûrement en faisant beaucoup plus attention à ingérer des choses « utiles » : des fruits, des légumes, des féculents et pas trop de sucreries ni de friture. Votre corps a besoin de carburant, ce serait dommage de l’en priver.

Les jours de Ramadan où je fais du sport, je sens que je me suis rapprochée de manière complète de mon Créateur. J’ai pris soin de mon âme à travers la lecture, j’ai tout fait pour maîtriser mes pulsions naturelles telles que la colère, et j’ai accordé une attention particulière à mon corps en lui réservant un moment rien qu’à lui. Moment qui me permettra ensuite de prier avec une concentration plus élevée.

N’oubliez pas que ce mois béni est « un engagement privé entre vous et Dieu », comme le décrit l’auteure Hanifa Deen. Savourez-en chaque minute mais surtout, faites de votre mieux.

Saphirnews.fr