Le mois de Muharram marque le début de l’année dans le calendrier hégirien. Chargé d’histoire, de symboles et de recommandations religieuses, il offre au croyant l’occasion d’une profonde introspection et d’un engagement renouvelé dans sa foi. De l’Hégire du Prophète Muhammad (PSL) au jeûne d’Achoura, retour sur les grandes leçons spirituelles de ce mois béni.
Le calendrier hégirien ouvre sur un mois sacré : Muharram.
Par la sagesse d’Allah, les temps ont été ordonnés de façon à faire coïncider les rites musulmans avec des moments précis de l’année. Ainsi, l’année lunaire s’achève avec Zul Hijja, mois du pèlerinage et des dix jours les plus bénis de l’année, et s’ouvre sur Muharram, marqué à la fois par des événements historiques majeurs et des actes cultuels fortement recommandés.
Ce mois sacré, l’un des quatre déclarés inviolables dans le Coran, est une période propice à la réflexion, au jeûne et à la réforme intérieure. Il est dit du jour d’Arafat – le 9e jour de Zul Hijja – que le jeûne y efface les péchés d’une année passée et d’une année à venir. Ce même esprit de purification se prolonge avec le jeûne d’Achoura, au 10e jour de Muharram.
L’Hégire : un tournant dans l’histoire islamique
Le mois de Muharram renvoie d’abord à un événement fondateur de la civilisation musulmane : l’Hégire du Prophète Muhammad (paix et salut sur lui) de La Mecque vers Yathrib, future Médine. Fuyant les persécutions croissantes des Qurayshites, le Prophète, accompagné de son fidèle compagnon Abou Bakr, quitte la ville de ses ancêtres dans un exil chargé d’émotions, de dangers et de promesses divines.
Cette migration marque une rupture avec l’oppression et ouvre l’ère d’un islam rayonnant et structuré. Elle révèle la patience du Prophète, sa stratégie, sa foi inébranlable et sa capacité à établir des relations de confiance, même avec ceux qui ne partagent pas sa croyance. Ainsi, pour atteindre la grotte de Thawr, il confia son itinéraire à un guide non musulman connu pour sa loyauté – un geste hautement symbolique qui rappelle la justice et l’humanité de l’Islam.
Lors de son départ, les larmes dans les yeux, le Messager se retourna vers La Mecque et lui dit : « Par Allah ! Tu es la terre que j’aime le plus, et si ton peuple ne m’avait pas chassé, je ne t’aurais jamais quitté. » À cet instant, l’ange Jibril descendit avec une révélation rassurante : « Celui qui t’a prescrit le Coran te ramènera certainement là où tu souhaites retourner. » (Sourate Al-Qasas, verset 85).
La fraternité et la paix à Médine
À Médine, le Prophète posa les bases de la première société islamique. Il construisit la mosquée, réconcilia les cœurs, institua la fraternité entre les émigrés (Muhajirûn) et les auxiliaires (Ansâr), et rédigea la Constitution de Médine, qui garantit les droits des musulmans, juifs et chrétiens dans une même communauté, fondée sur la justice, la paix et le respect mutuel.
Le vivre-ensemble, prôné par cette charte avant-gardiste, fait écho au verset coranique :
« Allah ne vous interdit pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion. » (Sourate Al-Mumtahana, verset 8).
Achoura : un jour de reconnaissance et d’expiation
Le 10e jour de Muharram, connu sous le nom d’Achoura, revêt une signification particulière. Le Prophète découvrit que les juifs de Médine jeûnaient ce jour-là pour commémorer la victoire de Moïse sur Pharaon. Il déclara alors : « Nous sommes plus en droit de nous réclamer de Moïse que vous », et recommanda de jeûner non seulement le 10e jour, mais aussi le 9e ou le 11e pour se distinguer d’eux.
Selon un hadith authentique rapporté par Muslim, le Prophète dit : « J’espère d’Allah qu’il expie par le jeûne d’Achoura les péchés de l’année écoulée. »
Avant l’institution du Ramadan, ce jeûne fut même obligatoire. Aujourd’hui, bien que facultatif, il reste hautement recommandé, porteur d’une immense récompense spirituelle.
Un mois de renouveau spirituel
Muharram est bien plus qu’un mois historique : il incarne l’espoir d’un renouveau personnel. C’est une occasion de dresser le bilan de l’année écoulée, de faire preuve de gratitude pour les bienfaits reçus, et de prendre de nouvelles résolutions spirituelles.
Le compagnon Umar Ibn Al-Khattab disait : « Jugez-vous vous-mêmes avant que l’on ne vous juge. » Un appel à l’auto-évaluation que tout croyant peut entendre à l’orée de cette nouvelle année hégirienne.
Une nouvelle année sous le signe de la foi
Chers lecteurs, chères lectrices, Muharram est une miséricorde d’Allah. Il nous invite à la piété, à l’histoire, à la fraternité et à la réforme intérieure. Par le jeûne d’Achoura, la mémoire de l’Hégire et les enseignements prophétiques, ce mois nous permet d’ouvrir l’an 1447 de l’hégire dans la sérénité et la spiritualité.
Puisse Allah faire de cette nouvelle année une source de paix, de succès, et de lumière pour chacun d’entre nous – sur le plan religieux, professionnel et personnel.
DIANÉ MOUSSA