AGENCE CISSÉ VOYAGE : Imam Sylla Idrissa : « Le Hajj ivoirien est aujourd’hui un Hajj presque VIP »

Dans cette interview exclusive accordée à Islam Info depuis l’agence Cissé Voyage, l’Imam Sylla Idrissa, récepteur des guides religieux et acteur de terrain depuis près de dix ans, revient sur l’évolution de l’organisation du Hajj en Côte d’Ivoire. Entre augmentation des quotas, encadrement de proximité, efforts sociaux et reconnaissance internationale, il dresse un état des lieux lucide et sans détour. Témoignage d’un homme engagé au service des pèlerins.

Présentez-vous  ? 

Je me nomme Imam Sylla Idrissa. Je suis le récepteur des guides religieux au sein de l’agence Stop Voyage.

Depuis combien de temps accompagnez-vous les pèlerins ? Organisez-vous les voyages pour le Hajj ?

Nous organisons le Hajj par la grâce d’Allah depuis presque dix ans. Le Commissariat du Hajj nous a fait confiance et nous a accordé l’autorisation officielle pour organiser le Hajj. Depuis lors, nous convoyons les pèlerins en Terre Sainte dans de très bonnes conditions. Grâce à Allah, chaque année, le Commissariat augmente notre quota. Aujourd’hui, nous sommes à 190 pèlerins. L’année dernière, nous étions à 150. Donc progressivement, notre capacité augmente d’année en année.

Était-ce déjà le cas les années précédentes ?

Non, par la grâce d’Allah, l’an dernier nous étions à 150 pèlerins. C’était notre quota. Mais, vu notre performance sur le terrain, le Commissariat nous a accordé 40 places supplémentaires. Et nous avons tout bouclé un mois avant notre départ d’Abidjan, prévu le 19. Cela prouve que les pèlerins des années précédentes ont apprécié notre travail. Le bouche-à-oreille a fait le reste. Nous avons dû refuser du monde. C’est pourquoi nous envisageons de demander 400 places l’année prochaine pour mieux répondre à la forte demande.

Quel est le coût du Hajj que vous proposez à Cissé Voyage ?

Il faut dire que pour les structures privées, le coût du Hajj est homologué. Nous sommes à 5 250 000 francs CFA par pèlerin. L’État ne nous subventionne pas, donc toutes les charges — visas, hôtels, Mina, Mouzdalifah, etc. — sont entièrement à notre charge.

Si je comprends bien, ce n’est pas l’État qui fixe les prix ?

Non, ce n’est pas l’État. Mais nous avons une organisation interne entre les agences privées. Ensemble, nous nous entendons sur un prix standard pour éviter toute divergence et concurrence déloyale.

Quelles sont, selon vous, les grandes évolutions qu’a connues l’organisation du Hajj, notamment à Cissé Voyage, mais aussi dans sa globalité ?

À notre niveau, l’évolution se remarque surtout dans l’encadrement de proximité. Chaque année, nous améliorons cet aspect. L’encadrement religieux, médical, et social est constant et accessible. Les pèlerins peuvent facilement entrer en contact avec les encadreurs. Cela est très apprécié car ils ne se sentent pas abandonnés. Vous pouvez tendre votre micro et constater qu’il y a très peu de plaintes.

Quels sont vos rapports avec le Commissariat du Hajj ?

Nos rapports sont très bons. Chaque année, nous recevons les félicitations du Commissariat du Hajj. Il faut saluer leur travail colossal. Le Commissariat n’est pas seulement une structure de surveillance, mais aussi d’orientation. Grâce à leurs conseils et leur suivi, les pèlerins ivoiriens souffrent de moins en moins. Il y a 20 ou 30 ans, c’était très difficile pour eux. Aujourd’hui, ils sont bien encadrés. Nous respectons toutes les consignes du Commissariat pour le bien-être des pèlerins.

Et avec la Direction des Cultes ?

La Direction des Cultes et le Commissariat du Hajj collaborent ensemble à travers des structures comme le CAS-OP (Comité d’Appui et de Surveillance des Organisateurs Privés). Ce sont des mécanismes qui nous permettent de mieux travailler. Le Hajj ivoirien est aujourd’hui un Hajj bien organisé, presque VIP. Nous avons beaucoup de conseillers et de directives qui orientent notre travail, même si parfois certaines décisions sont perçues comme contraignantes.

Quel est votre regard sur l’organisation générale du Hajj, étatique comme privée ?

Je me permets de répéter que la Côte d’Ivoire fait d’énormes efforts. Il faut savoir qu’il n’y a que sept pays au monde qui sont véritablement reconnus en Arabie saoudite comme les meilleurs organisateurs du Hajj. La Côte d’Ivoire en fait partie. Elle passe par “Toriq Makkah”, une plateforme réservée uniquement aux pays les plus fiables. C’est une grande fierté. C’est la reconnaissance du travail bien fait par le Commissariat, la Direction des Cultes et le CAS-OP.

 

Parlons à présent du coût qui ne cesse d’augmenter. L’inflation affecte-t-elle aussi l’organisation du Hajj ?

Effectivement. Mais cela ne concerne pas uniquement le Hajj. C’est une situation générale. Tout augmente : autrefois, une boîte d’allumettes coûtait 10 francs. Ce n’est plus le cas. En Arabie saoudite aussi, les prix ont doublé, notamment les hôtels et les taxes. Cela impacte le coût global du Hajj. Malgré cela, nous faisons un effort social au sein de Stop Voyage pour aider les populations à accomplir ce pilier de l’Islam dans de bonnes conditions.

Quand vous parlez d’effort social, vous ne parlez pas des 5,5 millions ?

Non, le prix officiel est de 5 250 000 francs CFA. Mais comme nous faisons du social, nous pouvons revoir le coût à la baisse pour permettre à plus d’Ivoiriens d’accomplir au moins une fois dans leur vie le Hajj.

Quels sont vos mots de fin ? Et que pensez-vous du journal Islam Info ?

Nous connaissons très bien Islam Info. Depuis le début. Personnellement, je connais Makalu avec qui j’ai grandi. Il a commencé avec Islam Info avant d’aller à la radio. Moi-même, quand j’étais titulaire, je lisais déjà Islam Info. Avant l’arrivée de Radio Al Bayane, c’était notre seule source d’information. Surtout à l’époque de Seni Kéita et Côte d’Ours. Islam Info est toujours là.

Votre dernier message à l’endroit des pèlerins et de leurs familles ?

Je m’adresse d’abord aux parents des pèlerins. Notre souci, en tant qu’encadreurs, c’est d’aider nos parents à mieux faire leur Hajj. Malheureusement, beaucoup sont préoccupés par les cadeaux à ramener, au point de délaisser les mosquées pour faire du commerce. Les familles mettent une pression énorme sur eux. Certains appellent pour réclamer un téléphone ou un boubou. Avant, quand un pèlerin rentrait, on se contentait de quelques gouttes de zamzam. Aujourd’hui, on demande l’iPhone 16 !

Cela devient une pression psychologique et financière pour les pèlerins. Je demande donc aux familles d’alléger cette pression. Le Hajj n’est pas un voyage touristique, c’est une adoration.

Je m’adresse aussi aux pèlerins : qu’ils s’arment de patience, d’endurance et de sincérité. Le Hajj demande des efforts physiques, mentaux et spirituels considérables.

Enfin, je remercie les autorités saoudiennes qui ne cessent d’améliorer les conditions. Cette année, des tapis confortables ont été ajoutés aux matelas. Mais à Mina, le problème des toilettes reste à résoudre. Peut-être que des toilettes superposées pourraient être envisagées, surtout pour les personnes âgées. Le Commissariat pourrait introduire un plaidoyer dans ce sens.

Qu’Allah accepte notre Hajj, qu’il soit Hajj mabrūr et qu’il nous ouvre les portes du Paradis.

 

propos recueillis par DIANÉ MOUSSA ( envoyé spécial d’Islam Info )