Diplomatie du football: la sélection palestinienne accueille l’Arabie saoudite

C’est une rencontre qui fait la fierté des dirigeants palestiniens. L’équipe nationale de football des Territoires reçoit ce mardi 15 octobre l’Arabie saoudite en match de qualification pour la Coupe du monde 2022 et la Coupe d’Asie 2023.

De notre correspondant à Jérusalem,

Ce match a une saveur particulière pour les Palestiniens, car c’est la première fois que la sélection saoudienne vient jouer dans les Territoires palestiniens. L’Association palestinienne de football a été admise à la Fifa, la Fédération internationale, en 1998, quatre ans après la création de l’Autorité palestinienne.

Mais pendant dix ans, l’équipe n’a pu disputer aucun de ses matches à domicile. La Fifa s’inquiétait des raisons de sécurité dans les Territoires et n’avait homologué aucun stade palestinien. Même lorsqu’elle recevait, l’équipe palestinienne devait jouer ses matches dans des pays tiers.

En 2008, la Fifa a autorisé les Palestiniens à accueillir des matches internationaux en Cisjordanie, à Al Ram. Beaucoup d’équipes régionales refusaient toutefois de se rendre dans les Territoires palestiniens, car les frontières sont contrôlées par Israël et que cela nécessite de demander au pays l’autorisation d’entrer en Cisjordanie.

C’était le cas de la sélection saoudienne : Riyad n’a pas de relations diplomatiques avec l’État d’Israël. Cette fois-ci, les Saoudiens ont accepté l’invitation de la fédération palestinienne et cela fait la fierté des dirigeants de l’Autorité palestinienne, basée à Ramallah, en Cisjordanie.

À l’arrivée de l’équipe à Ramallah, dimanche, le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a déclaré aux joueurs du Royaume d’Arabie saoudite, qui abrite les lieux saints de l’islam : « Votre présence fait honneur à la Palestine. » Et il recevra l’équipe pour un dîner à l’issue du match ce mardi.

Ce n’est pas la première fois que la fédération palestinienne accueille un match international. Après l’autorisation de 2008, la première équipe à venir fut l’équipe de Jordanie. Le pays a signé un traité de paix avec Israël en 1994. Il y a eu aussi la Thaïlande par exemple, la Palestine faisant partie de la fédération asiatique.

D’autres pays arabes, qui n’ont pas de relations diplomatiques avec Israël, sont déjà venus aussi : l’Irak, les Émirats arabes unis, Bahreïn. Certains refusent, comme le Liban ou l’Égypte qui, elle, est pourtant le premier pays arabe à avoir reconnu Israël. Mais des équipes reçues, l’Arabie saoudite est la plus prestigieuse.

Les responsables palestiniens veulent aussi y voir un geste de soutien politique des autorités de Riyad. Mais côté israélien, certaines voix, elles, diminuent l’importance de ce match. Elles soulignent que d’autres équipes du Golfe sont déjà venues en Cisjordanie, comme mentionné ci-dessus.

Ce match fait aussi des mécontents parmi les Palestiniens. Certains y voient une forme de normalisation des liens entre l’Arabie saoudite et Israël. Particulièrement dans le contexte actuel : si les deux pays n’ont pas de relations officielles, les liens se sont renforcés ces dernières années, face à la crainte commune, l’Iran.

Le Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), l’un des partis palestiniens, dénonce « la porte ouverte à la normalisation des liens avec l’entité sioniste », qualificatif désignant Israël. Elle appelle à boycotter le match. Le mouvement islamiste Hamas, au pouvoir à Gaza, estime pour sa part que « le seul gagnant de cette démarche est l’occupation israélienne ».

Mais pour les autorités de Ramallah, ce n’est pas une étape vers la normalisation. « La visite de l’équipe saoudienne n’est pas une entorse aux critères de boycott tant qu’il n’y a pas de contact durant le séjour avec l’État d’occupation », autre qualificatif désignant Israël, a déclaré la coordinatrice du comité pour le boycott d’Israël.

rfi