ISLAM INFO et HAMED BAKAYOKO : une incroyable histoire commune

 

Je ne me souviens vraiment pas combien de fois j’ai rencontré Hamed Bakayoko. Je ne faisais pas non plus partie de ses amis encore moins de ses intimes. Je me souviens seulement de trois occasions au cours desquelles nous nous sommes rencontrés.

La première fois, c’était à la MACA (Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan) où il était incarcéré pour un délit de presse dont son journal, Le Patriote avait été accusé.

Je suis resté avec lui en compagnie de TOURÉ Moussa du Conseil National Islamique (CNI) ce dernier confident de feu Cheick AIMA FOFANA Boikary.

Malgré les difficultés de l’univers carcéral, Hamed était resté résolument combatif. Nous avons parlé de tout sauf de la prison. Pour lui, ce qui lui arrivait alors, était prévu dans son parcours politique et il devait l’assumer avec courage et abnégation. Au moment de partir il nous salua et dit « À bientôt ».

La deuxième fois, c’était chez lui à domicile à la faveur d’une lecture du saint  Coran qu’il avait sollicitée auprès des imams. Nous y étions pour accompagner l’Imam KOUDOUSS. Ce type de cérémonie était courant chez lui. Hamed était un croyant et un croyant qui voulait toujours avoir des bénédictions. Pour lui, la vie est tellement pleine d’incertitudes qu’il fallait s’y préparer en conséquence. Au cours de ces lectures du Livre sacré, Hamed était en compagnie de son père et des autres membres de sa famille.

La troisième fois, ou je vis en direct Hamed BAKAYOKO, c’était au stade de Séguéla plein à craquer. Le Président de la République y effectuait département une visite d’Etat. Tout naturellement, Hamed prit la parole devant son père et sa mère spirituelle entourés de ses parents biologiques. L’homme montra une autre face cachée de son parfait ancrage dans les traditions du peuple Malinké. Il était à l’aise et visiblement heureux. Puis, il s’adressa spécialement au Président de la République, son mentor en ces termes, dont je me souviens encore de quelques bribes : “ Monsieur le Président de la République, ici à Séguéla, tout vous appartient, la terre, le ciel, les eaux, les animaux, les hommes et même l’air que nous respirons’’

La foule en délire se leva, pour approuver et applaudir l’enfant prodige de toute une région. La communion était parfaite entre lui et son peuple pour son engagement et sa fidélité à Alassane OUATTARA, un attachement à son mentor depuis l’arrivée de ce dernier en Côte d’Ivoire sous Felix HOUPHOUET Boigny. C’était un homme vrai, droit, au service de son prochain notamment du Président Alassane OUATTARA et de son épouse. Si Amadou Gon COULIBALY représentait la rigueur technocratique du système ADO, Hamed lui était.

La quatrième fois, que j’ai rencontré Hambak comme on l’appelle affectueusement, c’était à son bureau de Postel 2000 quand il était Ministre des NTICS. Cette fois-ci, c’était pour solliciter son appui pour la création du magazine Islam Info.

Après plusieurs échecs dans la production des journaux islamiques, j’avais réussi avec beaucoup de difficultés à convaincre l’Imam KOUDOUSS de la nécessité de remettre le couvert. Quand l’Imam demanda l’audience, le Ministre Hamed BAKAYOKO répondit qu’il allait se déplacer en personne vers l’Imam. L’Imam s’y opposa. C’est ainsi qu’à son corps défendant, Hamed accepta de nous recevoir à son bureau sans protocole. Après la prière d’ouverture, l’Imam dit : « Monsieur le Ministre, je viens vous demander un service relatif à la création d’un journal islamique. Nous avons essayé à plusieurs reprises sans succès. Mais sur insistance de mon collaborateur et par respect pour sa passion pour la communication communautaire, je viens solliciter votre assistance. Je lui laisse la parole lui mieux que moi, vous présentera le projet ».

Hamed écouta attentivement mon exposé. Puis il se tourna vers l’Imam pour dire en substance ceci : « Cheick, fais des bénédictions encore et encore. Ça va marcher. En tout cas, à mon niveau, je vais mettre tous les moyens à la disposition du Chef de projet jusqu’à ce que le journal décolle de ses propres ailes ».

Aussitôt dit aussitôt fait. Le Ministre appela successivement MEITE SINDOU, patron de la rédaction du journal Le Patriote à l’époque, KEITA, patron de l’imprimerie MAYAMA ainsi que YEO, le gérant principal. Ses instructions étaient ainsi libellées : “Vous accompagnerez Islam Info jusqu’à ce que le journal devienne financièrement autonome’’.

Ainsi, grâce au Ministre Hamed BAKAYOKO, Islam info fut lancé comme le premier hebdomadaire religieux musulman. Tout était fait au journal Le Patriote depuis la mise en page en passant par la micro-composition, les flashages, les corrections, l’impression jusqu’à la distribution par Edipresse au compte du journal Le Patriote.

Je me souviens de l’équipe du journal hôte. Tous ses membres étaient à nos petits soins à savoir MEITE Sindou, TOURE Moussa, Seydou KONE sans oublier Koul, Siè et Diallo au montage ainsi que Keita et Yeo à la comptabilité.

Islam info était leur priorité. Je me souviens qu’une nuit, l’imprimerie MAYAMA est tombée en panne. Nous sommes allés à la Riviera Bonoumin chez Yeo, le gérant du journal Le Patriote. Il nous accompagna dans une autre imprimerie pour imprimer à ses frais. Notre graphisme était exactement le graphisme de Le Patriote. Tant et si bien qu’Hamed me dit un jour : « Douk, ton journal ressemble maintenant au Patriote’’ ». Je lui répliquai avec un sourire de satisfaction que c’était tout à fait normal car nous étions un produit des Editions MAYAMA. Nous sortions des ateliers de la rédaction du Patriote et de l’imprimerie MAYAMA. Hamed approuva en levant le pouce.

Quelques années plus tard, pour notre dixième anniversaire, Hamed était tout naturellement le parrain tout indiqué.  A l’unanimité, notre petite équipe de la rédaction l’avait désigné. Il était fier de son produit et nous a demandé de “tenir bon’’. Nous avons tenu bon jusqu’à maintenant.

Malgré la déprime générale de la presse écrite aggravée par la crise de la Covid-19, aujourd’hui ISLAM INFO, c’est 16 ans de parution hebdomadaire sans interruption. Notre site internet vient de franchir en ce mois de mars 2021 la barre des 280.000 visiteurs cumulés. Certes notre jeune équipe de rédaction, a joué un rôle important dans ce succès relatif, mais en tant que croyant, nous disons qu’au départ il y a eu ALLAH AZAWAJAL qui nous envoya Hamed. Sans Hamed, notre sort aurait pu être bien moins reluisant aujourd’hui.

 

HAMED, un modèle, un cadre digne de la communauté musulmane ;

Hamed n’était pas seulement le noceur d’Abidjan By Night avec les vedettes de  Jet Society.

C’était un homme en quête de spiritualité, et plein d’humanisme.

Il était aussi et surtout un pilier de la communauté musulmane de Côte d’Ivoire. Il a accompli son dernier pèlerinage avec plusieurs Imams et érudits de la Côte d’Ivoire. Dès son élection à la mairie de la commune d’Abobo, Hamed se rapprocha encore plus des Imams et fidèles musulmans. Ainsi, chaque semaine, il accomplissait sa prière du vendredi dans une mosquée de la commune.

Il entraina le Président de la république lors de l’une de ses randonnées des mosquées d’Abobo. C’était probablement sa dernière prière de vendredi en compagnie du Président de la République, dans une mosquée inachevée dont les travaux traînaient depuis plus de trente ans. Ce jour-là, le Président décida de terminer les travaux de ladite mosquée en présence d’un Hamed ravi, radieux et reconnaissant. C’était pour lui un aboutissement, une mission accomplie. Il avait gagné son pari. La communion entre le Président Alassane OUATTARA et ses parents d’Abobo est le dernier cadeau d’Hamed à Abobo-Gare, en attendant la construction de la plus grande mosquée de Côte d’Ivoire dans cette commune comme promis par la République de Turquie, au Président Alassane OUATTARA.

Hamed était en mission pour le compte d’Alassane à Abobo, la cité martyre symbole de la lutte du RDR. Ironie de l’histoire des hommes. Hamed à travers sa mort et en souvenir de son dernier vendredi avec son mentor met désormais Alassane OUATTARA en mission à Abobo pour y achever leur mission commune.

 

 

 

Par el Hadj Ousmane Doukouré

D.G des Éditions Alif Islam Info