LES CINQ VISAGES D’ALASSANE OUATTARA (Première partie)

 

CHRONIQUE DU VENDREDI

Fatim Djamila

 

LES CINQ VISAGES D’ALASSANE OUATTARA

Le Président Alassane OUATTARA qui vient de prêter serment à nouveau, comme Président de la République de Côte d’Ivoire, a un parcours exceptionnel.

Par rapport au Président Felix Houphouët Boigny, Henri Konan Bédié, Gueï Robert, Gbagbo Laurent, le président Alassane OUATTARA, a accédé au pouvoir et l’a exercé dans des circonstances et conditions spéciales.

Ainsi, avant 2012, et de 2012 à 2020, Alassane OUATTARA, a présenté aux ivoiriens et au monde entier plusieurs visages.

Quels sont ces différents visages ? Quels sont les liens entre ces visages ? Quelles projections peut-on imaginer pour le visage qu’Alassane OUATTARA présentera entre 2020 et 2025 ?

PREMIER VISAGE : 1990-1993 – le Contact du Technocrate de la BCEAO avec le marigot politique ivoirien

Tout commence en 1990, quand le Gouverneur de la BCEAO fait la navette entre Dakar et Abidjan, en tant que président du Comité Technique Inter-ministériel. Alassane apparait ici comme un simple technicien consultant auprès de son mandant, Felix Houphouët-Boigny. C’est un visage de technocrate austère, sans complexe et sûr de lui. Avec pour seules obsessions la stabilité macroéconomique et les équilibres budgétaires mis à mal par les précédentes gestions. Ainsi, l’économie et les finances sont ses domaines de prédilection. La politique est pour son patron Houphouët. Chacun dans son domaine de prédilection et de compétences.

Dès sa nomination comme Premier Ministre, Alassane OUATTARA est aussi propulsé par son maitre politique au sein des instances du parti au pouvoir, le Parti Démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Cependant, cette intrusion au sein du PDCI au moment où le Président Houphouët-Boigny est malade et en difficultés avec les institutions internationales, a fait braquer les caciques du vieux parti contre Alassane. Cependant, grâce à la présence d’Houphouët Boigny, les opposants à Alassane avancent doucement. Mais certains de ses opposants avancent masqués en silence, parfois bruyamment. Quant à lui, il tente de tenir au milieu de provocations qui visent à la fois sa compétence et ses origines. C’est un milieu qu’il découvre avec un Maître qui s’y connaît parfaitement. Donc il se sent protégé et apprend très vite. Au même moment, Alassane, conscient de l’Etat de la gravité de la maladie de son mentor, prépare son départ du bourbier politique à venir inexorablement.

Cependant, son retour en politique cette fois-ci est inévitable, tant la pression de ses partisans est forte, et la situation du pays et l’héritage de son père spirituel préoccupants.

DEUXIEME VISAGE : 1994-1999 – le Technocrate du FMI devenu opposant

Houphouët meurt le 07 décembre 1993. À la mi-journée, Alassane annonce à la Côte d’Ivoire qu’elle est désormais orpheline. Après avoir refusé de continuer à être  Premier Ministre avec BEDIE à la demande de la France, Alassane annonce la démission de son Gouvernement le 09 décembre 1993. Il va sans dire que dans sa tête, ce n’est qu’un aurevoir. Car du statut d’homme au pouvoir, il va entamer pour la première fois une carrière d’homme de l’opposition politique, tout en étant le Directeur Général Adjoint du fonds monétaire international. Une place singulière pour un opposant politique. La fonction lui impose la discrétion, la mesure et la responsabilité. Et comme il parle très peu, Alassane assure parfaitement ses obligations internationales, et ses devoirs vis-à-vis de ses ambitions politiques nationales. L’activisme politique national est laissé totalement au parti politique qui se réclame de lui, le RDR, conduit sur le terrain par un brillant intellectuel Djeny Kobenan. Mais Alassane est désormais conscient que ses seuls partisans ne suffisent pas à lui garantir l’accès à la magistrature suprême. Il conçoit et développe une stratégie par rapport à cette vision. Mais contrairement à beaucoup d’hommes politiques ambitieux, Alassane pense par lui-même. Mais, il pense d’abord à la survivance de la pensée de son maitre Houphouët. Son objectif premier dans cette stratégie était de créer un parti qui rassemblerait les houphouétistes.

 

Mais l’acharnement de Bédié après son arrivée au pouvoir contre sa personne et ses partisans bloque le projet et l’oblige à nouer des rapports avec Laurent Gbagbo, chef de l’opposition de gauche socialiste contre Bédié. Cette alliance dure jusqu’à la chute de Bédié seulement. Car dès l’avènement de Gbagbo au pouvoir, les anciens alliés deviennent des adversaires. Et entre temps, Bédié et Alassane se retrouvent en exil. Au bord de la seine en France, les deux adversaires et fils spirituels d’Houphouët se retrouvent pour créer le parti dénommé le Rassemblement des Houphouétistes pour la Démocratie et la Paix (RHDP), sur fond de suspicions, malgré tout. Car Bédié s’est convaincu qu’Alassane est à la base de son renversement en 1999. Ce que ce dernier a toujours nié.

 

 

TROISIEME VISAGE : 2000-2011 – le politicien vers le perchoir

 

Quand le Président Bédié est évincé du Pouvoir par le Général GUEI en 1999, Alassane pense naïvement que désormais il peut se préparer pour les élections à venir. C’était sans compter qu’en face, il y’avait le Général Guei, Laurent Gbagbo et Bédié. Le Général Gueï et Laurent GBAGBO, deux anciens alliés devenus de redoutables adversaires. Tandis que Bédié qui lui en voulait terriblement se prépare comme lui aussi. Cependant, tout naturellement les deux sont écartés de la liste des candidats à l’élection présidentielle de 2000 remportée par Laurent Gbagbo. Pour la première fois après plus de quarante ans de règne sans partage les houphoutistes sont boutés hors du Pouvoir. Alassane est meurtri car il supporte mal que l’héritage de son père spirituel soit selon lui gaspillé. Aucun sacrifice ne sera de trop pour réunir les houphouetistes autour d’un idéal commun. Entre temps, le régime de Gbagbo est en proie avec une rébellion qui occupe la moitié du pays. Dès lors l’union des Houphouëtistes n’est plus une option mais un impératif. Tant et si bien que Bedié et Alassane scellent la paix et créent un parti Houphouetiste, le Rassemblement des Houphouetistes pour la Paix (RHDP).

 

 

A suivre…