Les quatre conseils du Fonds Monétaire International à l’Afrique subsaharienne, pour faire face au Covid-19 et ses ravages

(Agence Ecofin) – Dans son dernier rapport sur les perspectives économiques pour l’Afrique subsaharienne, le Fonds Monétaire International (FMI) a donné quatre conseils qu’il juge prioritaires, pour apporter une réponse efficace à la pandémie de Coronavirus. « Il est urgent de prendre des mesures décisives pour limiter les pertes humaines et économiques et protéger les plus vulnérables », a fait savoir l’institution basée à Washington.

Le premier conseil est logiquement celui de préserver les vies humaines. Le FMI pense que les pays doivent faire tout ce qui est en leurs pouvoirs, et cela par tout moyen, pour s’assurer que la prise en charge sanitaire de la pandémie soit effective et tournée vers la préservation des vies humaines.

Le deuxième conseil est des plus inhabituels. L’institution souvent très rigoureuse en matière de subventions et de transferts publics, encourage les pays d’Afrique subsaharienne à effectuer des transferts directs aux ménages et aux entreprises. Elle suggère pour cela que les gouvernements puissent s’endetter, et que, une fois les menaces du Covid-19 écartées, il faudra redéployer des efforts pour rendre la dette soutenable.

Le troisième conseil est celui de la stratégie monétaire. Il est question pour les banques centrales d’assouplir au maximum la politique monétaire, en permettant aux banques d’accéder plus facilement à la liquidité. Mais la stratégie monétaire sera différente selon les pays. Il est recommandé aux pays à taux de change variable de laisser dévaluer la monnaie, pour injecter le maximum de liquidités.

Le dernier conseil est celui de bien négocier les appuis internationaux afin de limiter les problèmes de balance de paiement.

Ces conseils sont déjà mis en œuvre dans divers pays d’Afrique subsaharienne qui n’ont pas attendu le FMI, même si plusieurs pays de la région se sont tournés vers l’institution pour avoir des ressources additionnelles. Pour de nombreux experts, il n’est pas pertinent de mettre en place les solutions actuelles si elles ne sont pas bien structurées. L’ensemble des mesures prises visent déjà à répondre aux risques de contagion et à compenser les pertes de revenus. Mais l’après Covid-19, ne semble pas encore au cœur des stratégies des pays.

L’Afrique agit déjà, mais le fait-elle efficacement ?

44 pays africains sur 54 ont appliqué des mesures de confinement total ou partiel, 43 pays ont procédé à la fermeture de leurs frontières, 36 pays ont fermé les universités et les écoles, et seulement 25 pays connaissent le travail à distance. Dans les zones UEMOA et CEMAC, les banques centrales ont pris des mesures pour redonner de la flexibilité aux banques, mais elles tardent à se mettre en place.

De même le débat au sein des dirigeants africains ne rentre pas dans les méandres des questions macroéconomiques et microéconomiques. Très peu de pays ou de sous-régions disposent à ce jour d’un rapport effectif sur les conséquences économiques de la pandémie. Les faiblesses statistiques et une part importante d’informel au sein des économies, amplifient cette situation de floue.

Dans la zone UEMOA, la banque centrale a injecté près de 13 000 milliards de FCFA de liquidité dans les banques. Cette initiative bien que salutaire, ne se traduit pas forcément par une hausse des crédits aux entreprises. Les banques se ruent sur les appels d’offre, car cela leur permet d’avoir de la ressource pas chère. Mais il faudra trouver de bonnes opportunités de placement de crédit.

Dans la zone CEMAC et plusieurs autres pays, c’est l’effet inverse. Les banques semblent bouder les injections de liquidités et les appels d’offres ne les font pas courir. La décision de la banque centrale a d’ailleurs surpris les observateurs, car ce choix était un revirement par rapport à la politique de réduction des liquidités qu’elle avait entamé. Les analystes pensent qu’on se serait attendu à une intervention plus ciblée.

Partout en Afrique, les mesures de confinement, même partiel, entraînent une perte de revenus pour de millions de petits acteurs économiques, mais aussi pour des grandes structures, qui voient leur productivité baisser. Il est pourtant difficile pour les pays d’y injecter des fonds directement, en raison de contraintes dans leurs budgets. Le FMI a autorisé plusieurs pays à avoir des déficits budgétaires en raison du Covid-19. Mais tant qu’il n’y a pas d’impacts économiques directs, les pays risquent de se retrouver post pandémie avec des problèmes encore plus importants.

 Idriss Linge