Aux États-Unis, l’opposition démocrate dénonce les « guerres commerciales permanentes » de Donald Trump. D’autant que celle engagée avec la Chine est loin d’être terminée et que l’arme protectionniste suscite le scepticisme des économistes.
Un collectif d’économistes de l’université de Berkeley en Californie a publié un rapport sur les conséquences de la guerre commerciale entre Washington et Pékin et, selon ce rapport intitulé Le retour du protectionnisme, ce bras de fer a un impact plutôt négatif sur l’économie américaine. Les auteurs estiment que la première victime de la guerre commerciale de Donald Trump, c’est d’abord le consommateur américain.
En imposant des taxes douanières pour protéger les producteurs d’acier et d’aluminium de la rust belt (« ceinture de rouille »), cette région industrielle déclinante du nord-est des États unis, le président américain a entraîné une hausse des prix, mais aussi des représailles chinoises sur les produits agricoles. Mois après mois, les chercheurs des universités de Berkeley, Yale, Columbia et UCLA ont épluché les chiffres des douanes américaines de 2018. Ils en concluent que les prix de 12 000 produits ont augmenté aux États unis.
« Ces tarifs douaniers fonctionnent comme une taxe à la consommation. Une hausse de 10% de la taxe à l’importation sur un produit c’est une hausse de 10% de son prix à la consommation. Donc le coût de la hausse des taxes sur les importations est supporté directement par les entreprises et les consommateurs américains », analyse Patrick Kennedy, doctorant en économie à Berkeley et co-auteur de ce rapport.
Le chercheur va plus loin : « Comme souvent dans une guerre commerciale, ce qui est bon pour un groupe ne l’est pas pour un autre, même au sein d’un même pays. Quand les États-Unis augmentent les taxes sur des produits importés, les sociétés américaines qui sont en concurrence avec ces produits sont protégées. Du coup, elles augmentent leurs prix. Par exemple, les compagnies américaines produisant de l’acier ou de l’aluminium bénéficient beaucoup des droits de douane de 25% sur l’acier et l’aluminium importés ». Pourtant, les consommateurs de ce type de produits se retrouvent « appauvris, parce qu’ils doivent payer plus cher pour acheter tout type de produit à base d’acier ou d’aluminium : voitures, machines à laver, maisons, une large gamme de produits de consommation courante ».
L’électorat trumpiste première victime
Selon le rapport évoqué, le bras de fer entre Pékin et Washington a même coûté de l’argent aux États-Unis, 7,8 milliards dollars de perte pour leur PIB en 2018 ! Plus paradoxal encore, selon Patrick Kennedy, c’est d’abord l’électorat de Donald Trump qui en souffre le plus. « Non seulement les États-Unis ont imposé des droits de douane à nos partenaires, mais nos partenaires ont riposté. Et leurs mesures de représailles ont été supportées de façon disproportionnée par nos exportations agricoles qui tendent à être produites dans des zones rurales et conservatrices », analyse-t-il.
Résultat, « les zones qui soutiennent le plus fortement le président des États-Unis, les zones les plus conservatrices », sont d’après le doctorant celles qui souffrent économiquement le plus. « Parce que non seulement les prix ont augmenté pour eux aussi à cause des taxes sur les importations, mais en plus elles prennent un coup sur leurs exportations ».
Et le bras de fer entre Washington et Pékin est encore loin de son épilogue. Après la hausse début mai des taxes douanières américaines à 25% sur 200 milliards de dollars de marchandises chinoises, Pékin a répondu le 1er juin par une augmentation de ses propres tarifs douaniers sur 60 milliards d’importations américaines. Donald Trump menace maintenant de surtaxer la totalité des importations chinoises aux États-Unis.
RFI