Dans son récent rapport au titre de l’article IV de ses statuts, le Fonds monétaire international souligne la bonne performance macroéconomique du Maroc, mais défend des réformes qui visent à rendre la croissance plus élevé et plus inclusive afin de réduire les tensions sociales.
Publié le 12 mars, le dernier rapport du FMI sur le Maroc s’inscrit dans le cadre de l’article IV des statuts de l’organisation qui stipulent que le Fonds « exerce une ferme surveillance sur les politiques de change des États membres et adopte des principes spécifiques pour guider les États membres en ce qui concerne ces politiques ». Au terme des consultations qui se sont achevées en décembre 2017, le FMI estime ainsi que la croissance marocaine a rebondi en 2017, avec une hausse de l’activité estimée à 4,4 %, principalement tirée par une augmentation de la production agricole.
Du côté de la demande, la croissance a principalement été soutenue par la consommation privée, tandis que l’investissement privé se redresse progressivement après une baisse ces dernières années (de 35,4 % à 27,4 % du PIB entre 2008 et 2016). Malgré une économie dynamique, le chômage a augmenté à 10,6 % au troisième trimestre 2017, contre 10,4 % un an auparavant, et reste élevé parmi les jeunes (29,3 %), en particulier en zone urbaine (45,2 %).
Le déficit public s’est réduit, selon les estimations du Fonds, à 3,5 % du PIB en 2017 (contre 4,1 % en 2016. Cela s’explique principalement par une bonne performance des recettes publiques et des efforts continus pour contenir les dépenses courantes, tandis que les dépenses d’investissement ont décéléré. La dette publique est estimée à 64,4 % du PIB, soit un niveau « soutenable » pour le FMI.
Le policy mix actuel […] est approprié, estime le FMI
« Le policy mix actuel, qui combine une consolidation budgétaire graduelle et une politique monétaire accommodante, est approprié », note le FMI. L’inflation a continué à chuter, estimée à 0,6 % en 2017, reflétant de la baisse des prix alimentaires. En raison de la baisse du taux directeur de Bank Al-Maghrib à 2,25 % en mars 2016, les taux débiteurs ont chuté et la croissance du crédit a augmenté à 4,8 % en novembre 2017 par rapport à novembre 2016, tiré par les prêts pour investissement aux entreprises publiques et les emprunts des ménages (immobilier et consommation).
Le déficit du compte courant a chuté à 3,8 % selon les estimations du FMI, contre 4,4 % en 2016. Cette amélioration est la forte croissance des exportations (7,2 %), liée à la bonne performance des exportations de phosphates et de produits agricoles, ainsi qu’à la reprise économique en Europe. Les importations n’ont augmenté qu’au rythme de 5,6 %, avec une hausse des importations de matière premières et des prix énergétiques plus élevés. Les recettes touristiques et les transferts des migrants sont restés élevés, et les flux nets d’IDE ont augmenté modérément à 1,9 % du PIB.
L’expansion des banques marocaines en Afrique est porteur de risque
Dans le domaine bancaire, le taux de prêts non-performants reste élevé à 7,7 % (octobre 2017), mais les niveaux de provisions sont confortables (70 %), et augmentent. Selon le FMI, « l’expansion continue des banques marocaines en Afrique (plus récemment en Afrique) assure une diversification et des opportunités économiques mais est aussi un canal de transmission du risque », les pays hôtes étant plus risqués et moins régulés.
Pour le Fonds monétaire international, « le gouvernement nommé en avril 2017 s’est engagé à mettre en place de bonnes politiques et les réformes ont repris », après une longue pause suite aux élections d’octobre 2016. Une priorité accrue est donnée à la réduction des inégalités et à l’augmentation de l’accès aux services publics.
Les tensions sociales se sont accrues en 2017, en particulier dans la région du Rif. Bien que le gouvernement ait pris des mesures, notamment en matière de programmes sociaux et de projets d’investissements, « s’attaquer aux sources de mécontentement social nécessitera probablement du temps ».
Augmenter la croissance et la rendre plus inclusive
En plus de mesures destinées à préserver la soutenabilité budgétaire et de renforcer le système financier, le Fonds recommande des reformes qui permettrait d’augmenter la croissance et de la rendre plus inclusive. L’institution met ainsi en cause la faible participation au marché du travail. « Le taux de participation à la population active était 46,4 % en 2016, contre 51,3 % en 2006. La participation des femmes à la population active est très faible à 23,6 %, reflétant d’une combinaison d’un faible niveau d’éducation, de l’informalité et des normes sociales » note le Fonds.
Le FMI suggère notamment que « mettre en places des réformes structurelles qui se renforcent mutuellement dans l’éducation, le marché du travail et l’environnement des affaires pourrait augmenter significativement la croissance potentielle sur le moyen à long terme, tandis que le coût à court terme de ces réformes, y compris en termes de croissance et d’emploi, est limité ».
En effet, « des facteurs intentionnels peuvent peser sur le mouvement efficace des emplois et la création d’emplois dans les secteurs à forte productivité, y compris la gouvernance, la réglementation du travail, les restrictions sur le commerce et l’ouverture, la qualité de l’éducation, l’infrastructure et l’accès à la finance » note le Fonds. Enfin, « un meilleur ciblage des programmes sociaux est clefs pour réduire davantage la pauvreté et les inégalités et limiter le risque de mécontentement social ».
Par jeuneafrique