Le vendredi 15 mars 2019 à Christchurch en Nouvelle Zélande, un suprémaciste blanc déclaré, a tué froidement 50 fidèles musulmans dans deux mosquées. Relayé par les médias dans le monde entier, cet évènement douloureux cristallise en lui seul la question de l’islamophobie montante dans le monde occidental. Cette façon d’agir qui est actuellement, le propre d’une minorité, porte à son faîte la pensée islamophobe qui grandit chez de nombreux occidentaux.
Même si l’unanimité ne semble pas acquise sur sa définition, on retient cependant que « l’islamophobie est un terme utilisé pour désigner une hostilité, une crainte ou une haine irrationnelle à l’égard de l’islam, des musulmans et de la culture musulmane, ainsi que les discriminations à l’encontre de ces groupes ou des individus qui les composent. » selon les analystes, l’islamophobie serait en grande partie due à la récession que traverse actuellement l’Europe. La montée des partis populistes qui véhiculent des discours antimusulmans et les attentats perpétrés par des extrémistes musulmans depuis quelques années. quelques temps avant son acte ignoble, le tueur de Christchurch a posté son manifeste qu’il a même fait parvenir à la première ministre néozélandaise. Il y affirme son adhésion à la théorie du « grand remplacement » développée par l’écrivain français d’extrême droite Renaud Camus.
L’épine dorsale argumentative de cette théorie qui est d’essence raciste, est construite sur la certitude d’une extinction prochaine de la population de race blanche « caucasienne » dans les pays occidentaux, qui serait bientôt remplacée par les immigrés, notamment musulmans. Du coup, les musulmans sont perçus par les partisans de cette théorie comme un danger pour la survie de la race blanche et la civilisation judéo-chrétienne en Europe. Ainsi, en éliminant 50 musulmans, il élimine du globe 50 remplaçants potentiels. Cette posture idéologique est pour la majorité des analystes une absurdité. En effet, selon le think tank américain Pew Research, en 2016, la population musulmane en Europe est estimée à 25,8 millions d’habitants soit 4.9 % de la population. En France, les musulmans représentent 5% de la population. Malheureusement, cette théorie infuse la société française voire européenne à travers les idées véhiculées par des écrivains comme Alain Finkielkraut, le chroniqueur Éric Zemmour… Face à l’horreur de Christchurch, il urge d’agir.
Là encore, la meilleure stratégie de lutte contre ces suprémacistes est venue de la Nouvelle Zélande. En effet, l’attitude du peuple néozélandais après ces attentats concentre en elle toutes les pistes de réponses à apporter à l’islamophobie, voire à tout extrémisme. Primo, au plan politique. Sur ce point, la première ministre néozélandaise a donné au monde entier une grande leçon politique, en évitant toute attitude opportuniste et hypocrite. Elle a allié le logos et le pathos qui y seyaient en faisant de ces évènements une tragédie nationale. Tant par le discours que les gestes de compassion qu’elle a apportés aux familles et aux musulmans vivant en Nouvelle Zélande. secundo, au plan idéologique. L’auteur des attentats était porté par une dynamique de haine raciste et ségrégationniste.
Les néozélandais lui ont opposé une dynamique exceptionnelle d’amour, de solidarité, de fusion avec les musulmans. Ainsi, l’appel à la prière a été diffusé par les médias officiels, les femmes néozélandaises ont porté le foulard en solidarité avec les compatriotes musulmanes, le parlement a ouvert sa session avec la lecture du Coran… Tertio, au plan social. La première ministre et des milliers de néozélandais ont assisté à la prière du vendredi la semaine qui a suivi, sans oublier que beaucoup de néozélandais n’hésitent plus à franchir les portes des mosquées pour assister à la prière, des hakkas (danses guerrières) ont été exécutées lors de nombreuses rencontres sportives, des dizaines de millions de dollars ont été recueillis pour les familles endeuillées et les blessés… Bref, la Nouvelle Zélande a montré que les seules forces redoutables pour combattre la haine restent l’amour et la solidarité. Cette leçon devrait aussi nous servir ici en Côte d’Ivoire, pour retrouver le véritable chemin de la réconciliation nationale.
Nurudine oYeWoLe [email protected] expert-consultant en communication