La Côte d’Ivoire a été désignée comme pays hôte pour organiser et accueillir la 34e édition de la Coupe d’Afrique des Nations, la CAN 2023. Cette compétition d’une grande envergure, réunit plusieurs personnes notamment des musulmans. Pour éclairer la lanterne de ces derniers sur cet évènement, Islaminfo a eu un entretien avec Traoré Yaya, imam principal de la mosquée Fitya d’Abobo Pétro Ivoire.
Que dit l’islam à propos du sport ?
Le sport est une activité physique que l’islam incite les musulmans à pratiquer, parce qu’en islam, nous avons deux types d’activités. Il y a les activités spirituelles qui sont liées au culte : les prières et tout ce qui est lié à Dieu et celles dites physiques. L’islam nous incite à la pratique des activités physiques, donc relatives au sport. Le Messager Alayhi Salat Wa Salam dit que le musulman actif physiquement est plus considéré et aimé par Allah que le musulman qui ne s’active pas, c’est-à-dire le musulman paresseux.
Donc, la paresse est interdite en islam, parce que le Messager Alayhi Salat Wa Salam lui-même demandait à Allah de le préserver contre la paresse. Il dit dans un hadith ceci : «Enseignez vos enfants à la natation, au tir à l’arc et aussi à la course des chevaux. » Au temps du Messager, les gens faisaient des compétitions dans ces domaines et même des compétitions dans la lutte. Tout ces éléments sont des preuves pour nous dire que l’islam conseille l’homme à l’activité sportives.
Est-ce que le prophète a pratiqué le sport particulièrement ?
Le Messager était un homme très physique parce qu’il montait sur des chevaux. Il était un grand guerrier. Mais il n’a pas fait de compétition. On ne peut pas être un grand guerrier sans être un sportif et sans être préparé physiquement dans tous ces domaines. Il faisait le sport mais, pas de compétitions.
La CAN est là actuellement, que doit être le comportement des musulmans et musulmanes ?
La CAN, c’est une compétition dédiée spécialement au football et organisée par la confédération africaine de football(CAF).C’est cet évènement sportif qui se passe dans notre pays. Ainsi, le comportement des musulmans face à un tel événement c’est de promouvoir le civisme, la discipline, le bon comportement au regard de tout ce qui va se passer durant cette compétition et ce, dans tous les domaines. Le musulman doit montrer sa bonne face, l’accueil, l’hospitalité. Il doit avoir de bonnes relations avec les personnes. Le musulman a un comportement qui est lié à la bonne conduite de sa religion que le Messager Alayhi Salat Wa Salam nous a enseigné.
Il en est de même pour les musulmanes ?
Bien-sûr. Tout ce qui concerne la vie sociale d’un musulman concerne aussi la femme musulmane. Quand on parle de l’éducation d’un musulman, il en est de même pour une musulmane.
Quand on demande aux enfants aujourd’hui ce qu’ils veulent devenir demain, la majorité répondent footballeur. Que pensez-vous de cela ?
Aujourd’hui le football est devenu comme un sacerdoce. Tout le monde veut que son enfant devienne footballeur pour la simple raison qu’il génère de l’argent et même beaucoup d’argent, ce qui attire de plus en plus la jeunesse. Le football est donc un métier qui nourrit son homme si bien que la personne devienne riche. Mais il faut que cette pratique soit complémentaire avec la morale. L’islam n’interdit personne de chercher de l’argent dans un domaine qui n’est pas interdit par l’islam
Comment faut-il aider ses enfants à mieux s’orienter ?
Il ne faut pas se focaliser forcément sur le sport, sur le football et oublier l’éducation de l’enfant qui est d’aller à l’école. On peut aller à l’école et être footballeur. Cela dit, il faut pouvoir concilier sport et école pour développer son éducation spirituelle, sociale sans oublier les choses qui sont importantes dans la vie. Pour les orienter dans ce cadre, il faut toujours les éduquer à prendre au sérieux ce qu’ils font même s’ils veulent devenir footballeurs, on les oriente en les éduquant sur la performance, sur l’éducation. Bref, qu’ils soient de bons sportifs dans le corps et dans la tête.
L’État a dépensé des milliards pour la CAN, qu’en dites-vous ?
Oui c’est bien parce qu’une telle compétition ne peut pas être organisée avec des miettes. Si l’État a déboursé ces milliards, il faut qu’ils soient utilisés à bon escient pour qu’il y ait une réussite au bout de ces dépenses. Et que cela soit aussi dépensé sincèrement dans la bonne moralité. En vue des préparatifs de la CAN.
L’État a aussi dépensé des milliards dans les infrastructures, que pensez-vous de toutes ces dépenses ?
Oui absolument. C’est dans un cadre de développement de l’environnement de notre pays. Les infrastructures ne font que développer un pays. Ces stades que nous voyons ça et là et ces infrastructures qui les entourent, sans oublier les villages de CAN les routes pour accéder à ces stades vont servir la Côte d’Ivoire. Et pendant la période de la CAN et après cette période de compétition, ces infrastructures resteront dans le patrimoine de la Côte d’Ivoire. Cependant, nous devons maintenant réfléchir à en faire bon usage. C’est pourquoi je dis qu’il faut du civisme. Lorsque le civisme y est, l’utilisation des infrastructures vont servir les Ivoiriens, et tous ceux qui vivent en Côte d’Ivoire seront heureux d’avoir des infrastructures développées dans ce pays, le plus important.
Il y a 24 équipes en compétition, quelles seront les 4 meilleurs selon vous ?
Rires. Je souhaite que la Côte d’Ivoire soit la meilleure équipe et qu’ils se battent pour être parmi les meilleures parce qu’il y a des équipes de tailles. Il y a des équipes de compétitions. Il y a des équipes qui ont marqué l’histoire du football en Afrique telles que le Cameroun, l’Egypte, l’Algérie et récemment le Sénégal. Je parle aussi du Nigéria. Il y a des Outsiders (concurrents en anglais Ndrl) qu’il faut craindre. Aujourd’hui, on voit que le Mali n’a pas encore pris sa coupe mais qui a envie d’en prendre. Il y a toutes ces équipes-là. Le football s’est développé aujourd’hui, tel qu’on ne peut pas faire un pronostic et dire qu’une équipe est meilleure que l’autre donc, ce qu’on pourra dire, si vous parlez de quatre meilleures équipes, moi je parlerai d’une meilleure parmi ces quatre : la Côte d’Ivoire.
Avez-vous confiance en l’équipe de la Côte d’Ivoire ?
Oui. Entièrement confiance. Si on n’a pas confiance en notre équipe, on ne va pas les envoyer comme les ambassadeurs de notre pays pour pouvoir défendre les couleurs du drapeau . On a confiance en eux. Ce sont des jeunes qui jouent dans de grands clubs à travers le monde entier, à travers l’Europe et partout. C’est pourquoi ils ont été sélectionnés parmi beaucoup de joueurs et on leur donne notre confiance, nos bénédictions parce qu’ils vont en mission pour la Côte d’Ivoire.
Est-ce que les pratiques de l’Islam quotidien sont compatibles avec les sports de haut niveau ?
Je ne dirai pas forcément oui ou non mais, je dirai aujourd’hui, qu’il y a des pratiques qui ne sont pas aussi conformes aux pratiques quotidiennes de l’Islam telles que porter des shorts qui ne couvrent pas le genou. Ça, ce ne sont pas des pratiques qui sont conformes à l’islam mais, les joueurs peuvent porter aussi des bas jusqu’à couvrir leur genou en guise de palliatif. Mais, il y a souvent des choses qui ne sont pas tout à fait conformes avec l’Islam surtout l’heure de prière. À cet effet, l’islam a toujours donné des solutions à ce genre de contraintes puisqu’on peut faire des prières en amont ou en aval de certains événements. La jurisprudence islamique nous a donné des palliatifs à certaines situations qui ne sont pas Haram. Il y a ce qui est Mandour. Il y a ce qui est Halal, donc si cela ne vient pas dans un cadre de Haram, ce que l’islam interdit catégoriquement, je pense qu’on peut faire le sport et en relation avec tout ce qui se passe aujourd’hui.
Que pouvez-vous nous dire sur le sport pendant le mois de ramadan ?
Il suffit seulement de s’organiser. Nous avons vu des pays musulmans tels l’Algérie ou le Maroc, où il y a des joueurs qui jeûnent et puis jouent au football. Cela démontre encore même l’engagement du musulman dans le sport sans pour autant se défaire de ces obligations quotidiennes. Cela donne aussi un respect au musulman qui peut concilier le sport et sa religion. Beaucoup de joueurs l’ont fait. On a vu aussi récemment en Angleterre où ils ont arrêté un match de football afin que les joueurs musulmans puissent rompre leur jeûne.
Binta Noura, Islaminfo