Ces DRH africains qui ont le vent en poupe

Les directions des ressources humaines en Afrique, longtemps occupées par des expatriés, voient désormais s’imposer des talents africains, souvent formés aux best-practices internationales. Qui mieux que des Africains pour comprendre les attentes des salariés du Continent ? Nous avons choisi de mettre en lumière quelques-uns des DRH africains qui redessinent la discipline sur le Continent.

Davy-Pacôme Nzekwa, l’ambitieux DRH de Cofina

Il aurait pu être basketteur professionnel comme sa mère, s’expatrier en France sitôt sa maîtrise obtenue, mais Davy Pacôme Nzekwa est un homme ambitieux doublé d’un panafricaniste convaincu. «Je me suis engagé à réussir sur place», concède-t-il à loisir. Le nouveau DRH de Cofina qui rêvait d’accéder à la fonction de directeur avant l’âge de 35 ans a réussi son pari. Avant d’être recruté par Cofina, DavyPacôme Nzekwa a occupé les postes de Responsable RH chez Geovic et Responsable des Talents et de l’efficacité organisationnelle du groupe Diageo pour les marchés émergents (Cameroun, Ethiopie, Ghana, océan Indien).

Ancien diplômé de l’Université catholique de Yaoundé, il dispose de plus de quinze ans d’expérience professionnelle dans la banque, la grande consommation et le secteur des mines. Ce Camerounais issu d’une famille de 4 enfants, de père expert-comptable et de mère comptable, se félicite d’avoir été élevé dans les valeurs du «travail, de la rigueur, de l’intégrité et de la solidarité». En rejoignant le groupe africain de mésofinance destiné au financement des PME africaines, début septembre 2018, il prend la tête des RH d’une société financière qui compte aujourd’hui 1 122 collaborateurs, 125 800 clients et des bureaux répartis dans 6 pays (Sénégal, Guinée, Cameroun, Congo, Mali et Gabon). Il devra notamment accompagner le groupe dans l’expansion du réseau de Cofina, en soutenant la création d’Institutions d’épargne et de crédit dans les quelque 16 pays cibles d’Afrique des zones CEMAC, UEMOA, mais aussi en Guinée et en République Démocratique du Congo.

Mumbi Mwila, la DRH «déterminée» de Zanaco

Diplômée de l’école de commerce d’Edimbourg, de l’Université HeriotWatt et d’un master en administration des affaires de l’Université de Zambie, Mumbi Mwila est aujourd’hui directrice des ressources humaines et membre du conseil d’administration de la Zambia National Commercial Bank, poste qu’elle occupe depuis le 1er juillet 2016. Elle entre dans le groupe Zanaco, avec plus de 16 ans d’expérience en matière de RH, après avoir fait ses preuves dans des départements de ressources humaines pour de grandes institutions. Elle avait également été recrutée comme spécialiste RH chez Airtel Africa, avant de devenir DRH d’Airtel Zambia où elle a notamment accompagné plusieurs initiatives RSE.

L’inclusivité et le partage ne sont pas de vains mots pour cette experte en RH qui a instauré des dons pour les orphelins et qui a permit à chaque département du groupe de soutenir des organismes de bienfaisance, chaque trimestre… Elle crée ensuite sa propre société de conseil en ressources humaines avant de rejoindre Zanaco. Mère de deux enfants, Mumbi Mwila se décrit elle-même comme une personne «déterminée et entêtée», qui aime apprendre, transmettre des connaissances et développer le potentiel de ses collaborateurs. Sa solide expérience en relations du travail et en planification stratégique lui permettent d’apporter une contribution précieuse à Zanaco, un groupe classé parmi les 100 meilleurs employeurs d’Afrique, selon le cabinet de recrutement Global Carrer Company en 2018.

Irene Graca, la négociatrice chevronnée de Sonangol

A la tête des ressources humaines de Sonangol, la compagnie pétrolière de l’Angola (2e plus grand producteur de pétrole en Afrique) qui compte aujourd’hui plus de 30 filiales, Irene Graca est diplômée en ressources humaines et psychologie de l’Université d’Etat de Louisiane, mais aussi en Gestion stratégique des RH de l’Université du Michigan et dispose de plus de 20 ans d’expérience. Gestionnaire aguerrie, elle a su créer et maintenir des équipes performantes pour conduire le changement en définissant une direction stratégique claire, en établissant des relations sociales solides et en alignant les diverses parties prenantes. Disposant de compétences approfondies en matière de négociation, elle a su entretenir des relations de proximité avec les agences gouvernementales et autres institutions de premier plan depuis plusieurs années, et s’est particulièrement illustrée dans le domaine de la gouvernance et de la conformité.

DRH du groupe Sonangol depuis 2016 depuis Luanda en Angola, elle occupait antérieurement les fonctions de DRH chez Chevron avant de rejoindre, toujours comme Directrice des ressources humaines, le groupe Cobalt International Energy. Pour les entreprises du groupe Sonangol, le recrutement s’effectue via un processus d’appel d’offres dirigé par Sonangol EP qui, de manière centralisée, pourvoit les postes vacants en répartissant les candidats sélectionnés dans ses filiales. Pour s’assurer que les compétences-clés soient disponibles en interne, Sonangol a mis en œuvre une politique de formation pour ses collaborateurs afin de renforcer leurs capacités et d’anticiper les besoins RH, tout en instaurant des programmes d’évolution de carrière.

Irene Graca est à la tête des ressources humaines d’un groupe qui pèse lourdement dans le PIB national et qui comptait un effectif de 22 000 salariés en 2016. Elle doit désormais accompagner la diversification du groupe, conséquence de la chute des prix du baril, mais aussi, de l’épuisement programmé des ressources pétrolières angolaises. Selon Sonangol, en 2030, l’Angola ne produira plus que 500 000 barils de pétrole par jour contre 1,5 million de barils en 2008.

Yves Mayilamene, leDRH d’Ecobank qui facilite le changement

En août 2018, l’ancien Directeur des Ressources Humaines d’Ecobank Nigéria a pris la tête de la direction d’Ecobank dans la zone UEMOA, mais aussi celle des Ressources humaines de ce groupe créé à Lomé en 1988. Ecobank a enregistré un chiffre d’affaires de 1,8 milliard d’euros fin 2017. Il est devenu le principal groupe bancaire panafricain indépendant, présent à ce jour, dans 36 pays sur le Continent et dans 40 pays à travers le monde. Yves Mayilamene, le nouveau DRH, a commencé sa carrière comme stagiaire au sein de British American Tobacco (BAT) avant de gravir les échelons des filiales congolaise, suisse, kenyane et sénégalaise.

Il devient en 2006, le DRH de Celtel-Zain (2006) pour l’Afrique francophone avant d’être nommé DRH Afrique de Airtel qui couvre 17 pays. Après une quinzaine d’années d’expérience en management RH, ce diplômé d’un Master en Economie, finance et gestion de l’Université de Mons en Belgique, a rejoint Ecobank en 2012. Il est aujourd’hui à la tête d’un groupe qui emploie près de 17 000 salariés dans plus de 1 200 agences et bureaux. L’équipe RH à elle-seule, représente près de 170 personnes.

Zakhele Sibiya, la méritocratie selon Shoprite

Zakhele Sibiya est à la tête des RH du groupe Shoprite, le plus grand employeur privé d’Afrique du Sud (10,1 milliards de dollars en 2018), en charge du déploiement d’une «nouvelle approche». Né à Kwathema dans l’East Rand, Zakhele a étudié les ressources humaines à l’Université du Cap Peninsula. Au cours de sa dernière année, il effectue un stage de trois mois au siège de Shoprite à Brackenfell, un groupe qu’il ne quittera plus. Promu responsable régional des ressources humaines en 2000 et chef de division RH (marchés de la viande) en 2008, il est ensuite nommé responsable des relations industrielles et des projets spéciaux au siège social de Shoprite. Il a notamment dirigé l’équipe chargée des négociations salariales avec les syndicats et soutient le déploiement des outils digitaux au sein du groupe, qui emploie aujourd’hui plus de 148 000 personnes.

Il accompagne l’ambition de Shoprite, reposant sur de nouvelles acquisitions et sur une stratégie d’expansion innovante, qui en font aujourd’hui l’un des principaux détaillants du secteur de l’alimentation, avec plus de 2 738 points de vente répartis dans 15 pays d’Afrique et des îles de l’Océan Indien et qui emploie plus de 146 000 personnes. Le groupe poursuit actuellement sa stratégie de croissance externe. C’est aujourd’hui le seul détaillant africain à figurer dans le top 100 du dernier rapport sur le commerce de détail du cabinet Deloitte, se classant au 86e rang mondial.

Virginie Dias-Tagnon chasse les talents de L’Oréal en Afrique

Directrice des Ressources Humaines pour L’Oréal, responsable des talents en Afrique, elle a développé une stratégie reposant sur l’excellence et l’innovation au sein du groupe. Virginie Dias-Tagnon, d’origines cap-verdienne et sénégalaise, diplômée d’un DEA en droit de l’Université parisienne Assas et d’un Master en ressources humaines à Sciences Po Paris, a entamé sa carrière au sein du groupe Bolloré au début des années 2000. Elle accompagne la mise en place de la loi sur les 35 heures avant d’être nommée Responsable des ressources humaines pour les DOM-TOM. En 2005, elle rejoint Les Galeries Lafayette comme Directrice des ressources humaines supply chain où elle s’attèle à la conduite du changement, en pleine réorganisation de la logistique. C’est grâce à son réseau «Science Po», qu’elle rejoint le groupe l’Oréal au sein duquel elle a progressivement évolué : d’une géographie à une autre, d’une fonction à une autre… France, Inde, Norvège, et finalement Afrique du Sud, elle occupe depuis février 2017, le poste de DRH en charge des Talents pour l’Afrique, depuis Johannesburg.

Après une enfance privilégiée en Afrique et une formation supérieure en France, elle se présente comme «100% Africaine» avec la volonté d’accompagner le développement du Continent. L’Oréal ambitionne le milliard de nouveaux consommateurs à l’horizon 2020. Dans cet objectif, l’Afrique qui représente un marché très porteur, pourrait bien devenir la clé de ce développement. Afin de renforcer ses équipes, la DRH peut une fois de plus, s’appuyer sur le « réseau Science Po » pour identifier les talents de demain. Virginie Dias-Tagnon pourra également compter sur un premier Institut de coiffure basé en Afrique du Sud, «The L’Oréal Professional African Salon Institute», qui propose des formations en stylisme et en soins professionnels.

Muriel Ogoudjobi, une femme à la tête du groupe CFAO Automotive

Directrice des Ressources Humaines de CFAO Automotive, Equipment et Services Division, Muriel Ogoudjobi est diplômée de l’Université Paris XI et de l’Université de Wolverhampton. Après de brefs passages au sein de la marque Chanel comme Coordinatrice des ressources humaines, en charge de la paie pour tout le secteur de la mode, qui regroupe plus de 450 employés, puis dans le groupe Renault comme Conseillère emploi et avantages sociaux, elle devient responsable RH pour Veolia Water Solutions & Technologies (VWS), le leader du traitement de l’eau et des eaux usées dans plus de cinquante pays et qui emploie plus de 9 500 personnes. Elle rejoint ensuite le groupe Mara-Ison Technologies à Nairobi comme DRH des pays francophones (Gabon, DRC, Tchad, Congo Brazzaville, Niger, Burkina Faso, Madagascar et les Seychelles) avant de devenir la nouvelle DRH de CFAO Automotive.

A la tête d’une équipe dont le groupe est implanté dans 36 pays africains, elle redynamise les ressources humaines à travers notamment, des opérations de recrutement en ligne pour l’activité automobile. Les cadres sélectionnés via la plateforme Seekube, rejoignent une formation interne de trois ans. «Pour celles et ceux qui souhaitent développer une carrière sur le continent, c’est l’opportunité d’intégrer l’une de nos filiales en Afrique, tout en bénéficiant de l’expérience d’un mentor et de l’expertise de nos collaborateurs», précise-t-elle. Une immersion nécessaire selon Muriel Ogoudjobi, qui permettra aux managers «d’avoir une vue d’ensemble -sur les différents métiers» du groupe. Ces formations en management, marketing, finance et développement commercial se déroulent au Nigéria, en Côte d’ivoire, au Ghana, au Burkina Faso et au Cameroun et formeront les prochains responsables de la division automobile. Muriel Agoudjobi recherche l’excellence avant tout. Aussi, les managers de demain devront être diplômés Bac + 5 et bilingues… Les talents ainsi formés constitueront à terme, un vivier pour l’ensemble du groupe.

Hannah Ashiokai Akrongla, la «guerre des sexes» chez Vodafone a commencé !

Hannah Ashiokai Akrong a débuté sa carrière au sein de Multimedia Broadcasting Company avant de rejoindre Ernst & Young, Medtronic (leader mondial de la technologie médicale), puis Honeywell aux Etats-Unis. Le 1er avril 2016, elle devient la nouvelle DRH de Vodafone, depuis Accra au Ghana. Titulaire d’un baccalauréat en marketing de l’Université du Ghana, d’une maîtrise en ressources humaines et relations industrielles de la Carlson School of Management de l’Université du Minnesota et de l’IAG School of Business de l’Université catholique de Louvain, elle est désormais à la tête des RH d’une entreprise plusieurs fois distinguée pour ses «best-practices» comme employeur de choix.

Elle a accompagné la réorganisation du groupe de Vodafone Ghana, filiale du groupe éponyme qui compte près de 8,5 millions de clients. Elle soutient en particulier les programmes d’autonomisation des femmes à travers «Vodafone Mentors School Girls», une initiative de mentorat touchant près de 500 écolières à Accra afin de «préparer l’avenir», précisant que l’introduction de la campagne «He for She» de Vodafone Women allait permettre à davantage de femmes d’acquérir l’expertise et les qualifications nécessaires pour concurrencer favorablement leurs homologues masculins.

«Nous souhaitons également encourager la diversité des sexes. Dès lors que nous intégrons des femmes dans l’organisation, nous examinons comment nous allons nous assurer de créer un environnement propice à leur développement», assure-t-elle. Bourses d’études et mentorat pour les jeunes femmes, Hannah Ashiokai Akrong s’attaque également à la violence faite aux femmes à travers un programme dédié, qui permet aux employées du groupe de prendre 10 jours de congés en cas de violence domestique.

Paul Kasimu, le DRH de Safaricom qui privilégie le «bien-être» de ses employés

En juillet 2017, le groupe Safaricom a annoncé l’arrivée de l’ancien chef des ressources humaines de la compagnie East African Breweries Limited (EABL) au poste de DRH, responsable des talents et de l’efficacité organisationnelle. Paul Kasimu était particulièrement attendu pour reprendre un poste stratégique, laissé vacant depuis janvier 2017, après la démission de Mme Shipiri. «C’est un professionnel des ressources humaines mature et expérimenté, fort d’une expérience considérable, qui a travaillé avec de grandes entreprises au niveau local et international», assurait confiante, la direction du groupe par voie de communiqué, peu avant son arrivée.

Paul Kasimu a occupé les fonctions de responsable des ressources humaines pour la compagnie Kenya Airways, collaboré avec le transporteur national KQ, occupé des postes de direction au sein de la Barclays Bank au Botswana ainsi qu’au Royaume-Uni, avant de devenir DRH du groupe EABL puis de prendre le management RH de Safaricom. Le groupe kenyan créé en 1993 compte plus de 5 000 collaborateurs et enregistrait un chiffre d’affaires de 1,2 milliards de dollars en 2018. Classé parmi les entreprises africaines où « il fait bon vivre » selon le dernier classement de Forbes, Safaricom peut désormais s’appuyer sur ce coach accrédité.

Honoré du prix de gestionnaire de l’année pour l’entreprise (COYA) au Kenya, il a été à la manœuvre d’un programme de gestion des personnes «étonnantes» et occupe actuellement la fonction de président de l’Institut de Gestion en Ressources Humaines, tout en étant membre du conseil d’administration d’AMREF au Kenya. Il s’est donné pour objectif de renforcer l’inclusivité et d’assurer la promotion de la culture d’entreprise de Safaricom à travers le renforcement de services essentiels, l’amélioration de la santé au travail, la sécurité et le bien-être des salariés.

Paul Norman, le psychologue devenu DRH de MTN

Paul Norman est titulaire d’une maîtrise en psychologie de l’Université Rhodes de Grahamstown, en Afrique du Sud, ainsi que d’un MBA de l’Institute for Development Management en Suisse. Le DRH de MTN (plus de 17 milliards de dollars de CA), l’un des principaux opérateurs de téléphonie mobile en Afrique, aujourd’hui présent dans 23 pays sur le continent et au Moyen-Orient, est à la tête d’un groupe qui compte plus de 232 millions d’abonnés et quelques 23 000 employés.

Le premier responsable RH du groupe en 1991 n’a pas ménagé ses efforts pour accompagner la croissance de MTN en particulier entre 2003 et 2011, où il a concentré ses efforts sur le renforcement des compétences, l’identification des talents et la création d’une université interne. Ancien consultant au sein de l’unité de psychologie de Portnet, c’est sous sa direction, que le groupe MTN a remporté le prix international Gold Accreditation Award pour sa gestion des ressources humaines et qu’elle fut classée parmi les meilleures entreprises mondiales en matière de développement durable par le magazine Newsweek.

Paul Norman a reçu plusieurs prix, dont celui de «Praticien RH de l’année» par l’Institute of People Management en Afrique du Sud en 2003 et d’un Lifetime Achievement Award du South African Board for People Practices en 2012. Il est également l’un des fondateurs membres de «South Africa Day», une initiative qui permet de lever des fonds pour soutenir les étudiants les plus méritants. Le DRH de MTN a siégé dans plusieurs conseils d’administration, notamment au titre de président du conseil de Remco, un fonds d’aide médicale aux comptables agréés en Afrique du Sud. Il est toujours membre des conseils d’administration de MTN Nigeria, Afrique du Sud et Côte d’Ivoire. Par ailleurs, le «DRH-psychologue» a investi dans une franchise de concession BMW, dans South African Clean Energy Services, une startup proposant des solutions énergétiques et dans un restaurant.

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