Emma Theofelus, la précoce de Windhoek

(Ecofin Hebdo) – A 23 ans, Emma Theofelus, déjà détentrice de multiples records de précocité,  est devenue vice-ministre des Technologies de l’information et de la communication en Namibie. Plus jeune personne du continent africain, voire de la planète, à avoir des fonctions similaires, la Namibienne poursuit une trajectoire ascensionnelle lancée depuis son adolescence.

Le 24 mars, Emma Theofelus a officiellement pris, à seulement 23 ans, ses fonctions de vice-ministre des Technologies de l’information et de la communication. La jeune femme de Windhoek avait été nommée la veille par le président de la République de Namibie, Hage Geingob, qui a fait d’elle la plus jeune personne de la planète occupant une telle position.

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« La plus jeune personne de la planète occupant une telle position. »

 

Si cela peut en surprendre plus d’un, les plus proches de la jeune vice-ministre n’en sont pas si étonnés… Habituée à battre des records de précocité, elle entretient depuis ses toutes premières années la culture du leadership qui lui a permis de briser les plafonds de verre habituellement opposés aux personnes de sa génération.

« Je ne suis pas spéciale »

Emma Theofelus est née en 1997 à Windhoek dans une famille modeste. Elevée dans une famille de 7 enfants, elle a très tôt du développer un sens très fort de l’identité. Dès ses premières années, elle a été consciente du défi que représente la réussite d’une femme africaine, à plus forte raison quand elle est très jeune. En 2016, elle expose d’ailleurs dans une interview sa vision très particulière de l’enfant africain. « Un enfant qui marche des kilomètres pour aller à l’école le ventre vide et dont on attend toujours qu’il excelle dans son travail scolaire. Un enfant qui a vu assez de souffrance et de violence pour toute une vie, qui espère un abri décent, plus de protection, un accès à l’eau et à l’assainissement. Une personne qui a une voix, mais qui est parfois réduite au silence et qui a des besoins, tout en ayant des possibilités de changer le monde. Pour moi, un enfant africain est un enfant qui comprend les défis de la pauvreté, de la faim, du besoin, mais aussi de l’espoir et de la foi en une Afrique meilleure », confie-t-elle.

« Pour moi, un enfant africain est un enfant qui comprend les défis de la pauvreté, de la faim, du besoin, mais aussi de l’espoir et de la foi en une Afrique meilleure »,

Consciente de ce qu’il faut faire comme efforts pour atteindre les sommets qu’elle ambitionne, la Namibienne décide de faire plus d’efforts que tout le monde, déjà à l’école. En plus de ses bons résultats scolaires, elle est responsable dans presque toutes les classes durant ses études primaires et secondaires. En plus, elle s’engage dans des activités extrascolaires, notamment dans des clubs de militantismes pour les droits des plus démunis, des femmes et des enfants. Pourtant, comme elle l’explique lors de sa nomination, elle estime avoir juste fait des efforts et ne se sent pas spéciale.

Une précocité hors du commun

Pendant son adolescence, Emma Theofelus s’intéresse de plus en plus à la gestion de son pays. Cet intérêt sera renforcé lorsqu’elle se découvre un modèle en la personne de Saara Kuugongelwa Amadhila, devenue la première femme à occuper le poste de premier ministre namibien en 2015.

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« Je veux l’imiter et être un leader juste, tout comme elle. »

 

« Elle est tellement pragmatique et authentique. Elle n’est pas seulement notre première femme premier ministre, mais elle englobe aussi le potentiel des femmes namibiennes. Je veux l’imiter et être un leader juste, tout comme elle. Quelqu’un qui consulte et s’adapte. Une personne qui écoute, qui comprend et qui admet quand elle a tort. Une personne qui n’a pas peur de demander de l’aide », confiait Emma Theofulus.

« Je veux l’imiter et être un leader juste, tout comme elle. Quelqu’un qui consulte et s’adapte. Une personne qui écoute, qui comprend et qui admet quand elle a tort. Une personne qui n’a pas peur de demander de l’aide »

Maire junior de Windhoek à 16 ans seulement, de 2013 à 2014, et membre du parlement des jeunes, initiée aux bases de la gestion, Emma Theofulus, s’engage durant ses années universitaires à défendre les droits des femmes et des enfants. En parallèle à ses études de droit, elle prend la parole durant des dizaines d’évènements pour sensibiliser sur les violences domestiques et la maltraitance des enfants.

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Défendre les droits des femmes et des enfants

 

En 2016, durant sa deuxième année de droit à l’Université de Namibie, elle a tourné, à seulement 19 ans, un documentaire sur les violations des droits des femmes et des enfants qui a fortement pesé, cette année-là, dans l’adoption d’une loi sur la protection des enfants. « Faire partie de la jeunesse qui a rendu cela possible est une réalisation que je chérirai pendant des années », se réjouit-t-elle.

En 2016, durant sa deuxième année de droit à l’Université de Namibie, elle a tourné, à seulement 19 ans, un documentaire sur les violations des droits des femmes et des enfants qui a fortement pesé, cette année-là, dans l’adoption d’une loi sur la protection des enfants.

Au fil des années et grâce à ses efforts pour défendre les causes qui lui sont chères, la jeune étudiante se fait de plus en plus remarquer par les dirigeants namibiens. Après avoir obtenu sa licence en droit, elle est engagée à la direction des Services juridiques du ministère namibien de la Justice. Dans le même temps, elle est ambassadrice des jeunes auprès de la commission nationale de la Namibie pour l’UNESCO et devient, en 2017, membre du conseil d’administration du Conseil national de l’enseignement supérieur en Namibie. Quelques années après son diplôme, elle participe à la création du chapitre namibien de l’Alliance de l’Afrique australe pour l’emploi des jeunes.

Plus jeune députée de l’histoire de la Namibie

En plus de la nommer vice-ministre des Technologies de l’information et de la communication, le président de la république a également fait d’Emma Theofelus, en vertu des pouvoirs que lui confère la constitution, le nouveau député de l’Assemblée nationale.

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 « Je suis une enfant africaine.»

 

Alors que cela aurait pu susciter des critiques, l’engagement permanent et affiché de la jeune fille lui a attiré la sympathie d’une population qui se plaignait depuis des années de voir la gestion de ses affaires publiques uniquement confiée à la vieille garde de sa classe politique. « Je suis enthousiaste. On me dit que je vais servir de référence pour les jeunes. J’accepte ce défi comme j’ai accepté d’autres rôles de leadership. C’est un territoire et un espace politique inexplorés, mais je suis prête à relever le défi », a déclaré Emma Theofelus.

Celle qui cumule désormais les fonctions de vice-ministre des TIC et de député ne craint pas les défis. « Je ne me sens pas spéciale, mais je ne suis pas inexpérimentée », assure-t-elle. Désormais, elle va découvrir une autre sphère, un autre niveau de gestion mais également de nouveaux leviers qui pourraient lui permettre d’apporter de nouvelles contributions àà la défense de ses causes. Pour le moment, comme l’affiche son compte Linkedin, elle continue de se définir en tant « qu’avocate et défenseur de la justice sociale ayant fait ses preuves dans le secteur des services juridiques et de la défense des droits. Compétente en prise de parole en public, en recherche juridique, en gestion des relations publiques, en égalité des sexes et des enfants, et en militantisme pour la jeunesse ».

Pour le moment, comme l’affiche son compte Linkedin, elle continue de se définir en tant « qu’avocate et défenseur de la justice sociale ayant fait ses preuves dans le secteur des services juridiques et de la défense des droits.

Seulement, on se dit bien que dans son esprit, Emma Theofelus doit certainement penser, comme son modèle Saara Kuugongelwa Amadhila, au poste de Premier ministre. Peut-être y arrivera-t-elle avant ses 34 ans, l’âge auquel la finlandaise Sanna Marin est devenue, en fin d’année dernière, la plus jeune Première ministre de la planète. Mais pour Emma Theofelus, cela semble être secondaire. Pour le moment, la jeune Namibienne le clame haut et fort, elle cherche essentiellement des moyens d’améliorer le quotidien de ses compatriotes.

Servan Ahougnon