Le 10 septembre dernier, le monde a célébré la journée mondiale du suicide. Longtemps observé essentielle- ment dans les pays dits développés, ce phénomène est en train de gagner du terrain dans les pays du sud. bien que ne disposant pas de statistiques locales, on peut s’inquiéter à juste titre de la montée de ce phénomène à en juger par la fréquence élevée des faits divers qui y font allusion dans nos journaux. A preuve, les journaux ivoiriens ont rapporté en l’espace d’une semaine les morts tragiques de jeunes policiers et gendarmes qui se donnent la mort en retournant leurs armes contre eux-mêmes.
En France, les données statistiques affirment que plus de 10. 000 personnes meurent chaque année de suicide. Soit 27 personnes par jour, pendant que 700 y pensent sans passer à l’acte. Un chiffre qui est nettement au-dessus du nombre de victimes par accident de la route.
Quelles sont les raisons qui poussent les victimes à passer à l’acte de mettre fin à leur vie ?
Selon les études sociologiques et psycho- logiques, il est difficile d’établir le profile parfait des personnes qui se suicident. Toutefois, les causes les plus récurrentes sont : les difficultés économiques ou d’insertion socioprofessionnelles, les déceptions amoureuses, la pression professionnelle, l’isole- ment dû au rejet familial ou social, la maladie, la peur d’assumer les conséquences d’une faute etc. Singulièrement pour les jeunes les raisons sont en relation avec des troubles divers liés à l’attention, à la consommation d’alcool ou d’autres drogues, voire à des psychoses du type schizophrène.
Que recherche l’auteur de l’acte suicidaire en franchissant le pas ?
Selon les psychologues, il s’agit pour lui de mettre fin à sa souffrance en attirant l’attention de ses proches pour plus d’amour et d’intérêt à son endroit au cas où il survivrait.
Face à cette situation qui est devenue un phénomène social, que faire ?
Il est important avant tout de souligner que toutes les religions monothéistes condamnent le suicide. Ainsi, jusqu’à la révolution française, le corps du suicidé était supplicié
et ses biens confisqués.
L’Islam aussi interdit à tout musulman de se donner la mort car la vie d’un homme est sacrée. Pire, il n’a pas droit à la prière mortuaire avant son enterrement. Des oulamas affirment même que la porte du Paradis lui sera fermée.
Que faire donc pour prévenir et réduire considérablement le taux de suicides ? Il est essentiel de comprendre que nous avons une responsabilité collective face à ce phénomène. C’est pourquoi, il est important de créer autour de nous les conditions de vie qui protègent les individus contre leur volonté de se suicider.
Premièrement
Il faut inverser les valeurs sociétales actuelles qui au lieu de mettre en avant les va- leurs morales comme normes de valorisation de l’individu, privilégient la capacité financière de celui-ci. En entend, de nos jours, dire de quelqu’un qu’il a réussi lorsqu’il occupe un haut poste, jouit d’un matelas financier d’une épaisseur appréciable, roule carrosse, dort dans un palais, s’habille comme un prince ou une princesse, fréquente la haute société… Même les hommes religieux n’échappent pas à cette règle. Au contraire, nous devons individuellement et collectivement revenir aux valeurs de l’Islam qui nous rappellent que le meilleur d’entre nous est le plus pieux. Allah nous dit : « Ce qui est auprès de vous s’épuise, et ce qui est auprès d’Allah reste.» (S16 V 96)
Deuxièmement
Il faut mettre un accent sur la valeur « fa- mille » (entendue comme l’union d’un homme et d’une femme) comme le maillon fondamental de construction de la société. Le vrai combat, c’est de mettre en place une batterie de mesures d’accompagnement de cette cellule de base, pour qu’en sortent des individus qui ont goûté aux saveurs de l’amour parental, qui sont bien éduqués et nantis de valeurs essentielles qui leur donnent le sens réel de la vie selon l’Islam. A savoir, avoir toujours la pleine conscience de sa nature de créature d’Allah, dont la vie doit consister à rechercher comment se sou- mettre à Lui, tant dans la réflexion que par les actes.
troisièmement
Il est important de nous sortir des griffes des modèles importés qui impriment l’individualisme comme norme de vie nouvelle. Pour cela, la valeur « famille » ne doit pas se restreindre à la famille nucléaire. Bien entendu, pas pour prendre en charge un canton. Mais pour entretenir un plus grand éventail de relations fraternelles. Cela a pour avantage d’offrir à l’individu un cadre qui le protège contre l’isolement.
Pour preuve, en Espagne et en Italie où les relations familiales sont importantes, les taux de suicides sont les plus bas d’Europe. Là aussi, l’Islam nous montre la voie.
A ce propos, le Coran nous dit: « Et donne au proche parent ce qui lui est dû » (S17 V26)
Quatrièmement,
Il faut lutter contre les fléaux modernes que sont la drogue et l’alcoolisme qui font des ravages sociaux énormes et sont à la base de nombreux suicides. Sur ce point, l’Islam est formel, la drogue et l’alcool sont inter- dits. Le Coran nous dit : « Ô vous qui por- tez la foi ! Le vin, le jeu de hasard, les pierres dressées, les flèches de divination ne sont qu’une impureté, une œuvre du diable. Ecartez-vous en donc, peut-être réussirez-vous. » S5V90.
Cinquièmement
Tout musulman se doit pour se protéger, de développer sa spiritualité, en approfondis- sant sa relation à Allah. Ce qui exige une plus grande pratique religieuse à travers la prière, la lecture du Coran, les invocations, le jeûne, l’aumône… Toutes choses qui lui permettront de se construire une plus forte assise morale et mentale ainsi que d’être habité de la paix du cœur. Allah ne nous dit-il pas : « n’est-ce pas par l’évocation d’Allah que se tranquillisent les cœurs?» S13V28
Sixièmement
Il est urgent que l’Etat et la société civile se préoccupent de ce phénomène. En effet, il est indispensable que des institutions pu- bliques et des ONG soient mises en place, à l’instar de la mobilisation qu’il y a eue pour contrer des pandémies telles que le SIDA ou les maladies chroniques non trans- missibles (diabètes, tensions artérielles). En France par exemple, il vient d’être créé un observatoire du suicide.
Sinon, si rien n’est fait, ce phénomène risque de devenir une nouvelle menace dont personne ne serait à l’abri.
Qu’Allah nous protège.Amine.
Nurudine OYEWOLE [email protected] Expert-communication en communication