Lors de sa récente visite officielle de quatre jours à Ankara, le Premier ministre malaisien Mahathir Mohamad ne s’est pas contenté de resserrer les liens avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Il a appelé avec force à l’avènement d’une « renaissance musulmane » avec la Turquie et le Pakistan, qui comptent parmi les pays fondateurs du groupe D-8 à majorité musulmane, afin de consolider les relations stratégiques et d’accroître des coopérations fructueuses dans un monde islamique, au fort potentiel, qui en a cruellement besoin.
« La Malaisie, la Turquie et le Pakistan doivent travailler main dans la main pour contribuer au développement économique de la Ummah et l’affranchir de son assujettissement à d’autres pays », a exhorté Mahathir Mohamad, au cours d’une conférence de presse marquante, démontrant un volontarisme politique qui a ravi les fins observateurs et autres experts musulmans qui y ont assisté.
Cet appel à insuffler un nouvel élan au groupe D-8, dont il est l’un des fers de lance, a été applaudi des deux mains par l’homme fort d’Ankara. Celui-ci lui a aussitôt fait écho en insistant sur la nécessité impérieuse pour le triumverat qu’il forme avec ses homologues malaisien et pakistanais « d’unir leurs forces et de conjuguer leurs compétences », en vue de favoriser des synergies fédératrices et fécondes.
Le même enthousiasme prévalait vendredi du côté pakistanais, le ministre des Affaires étrangères se félicitant de cette volonté commune de créer les conditions favorables de la « renaissance » de la galaxie islamique, dans le domaine économique, des sciences, de la haute technologie, de la Défense…
« Le monde islamique a besoin d’une renaissance », a martelé Huseyin Bagci, un spécialiste des relations internationales à l’Université technique du Moyen-Orient, à Ankara. A ses yeux, si la Turquie, la Malaisie et le Pakistan prennent naturellement le leadership de cette redynamisation cruciale, c’est parce qu’ils se « distinguent dans le monde musulman », d’une part par « la stabilité politique et la bonne santé économique de leurs pays respectifs », et d’autre part par « leurs valeurs communes en matière de démocratie, de droits de l’homme et de presse libre ».
« Le nouveau mécanisme proposé par le Premier ministre malaisien peut même réunir des États afghans et asiatiques », a-t-il ajouté.
Plein d’espoir, le professeur Sami A. Al-Arian, directeur du Centre pour l’islam et les affaires mondiales à Istanbul, a qualifié la visite du Premier ministre malaisien « d’historique ».
« Cette visite du Premier ministre Mahathir en Turquie pour rencontrer le président Erdogan est historique, car les deux dirigeants ont été maintes fois élus démocratiquement par leur peuple», a-t-il commenté, tout en faisant observer que cette rencontre décisive intervient au moment où les défis économiques et politiques, auxquels sont confrontés les deux gouvernements, sont de taille.
Ces défis sont « énormes à la lumière de l’incertitude économique mondiale imminente, ainsi que des changements géopolitiques à travers le Moyen-Orient en raison de la guerre commerciale américaine avec la Chine, et d’autres problèmes régionaux », a-t-il expliqué, avant de conclure son analyse : « Les sanctions américaines contre l’Iran et les dernières tensions avec la Turquie concernant le système de défense aérienne S-400 ont amené d’autres puissances régionales, telles que la Turquie et la Malaisie, à se rapprocher pour restructurer leurs relations afin de faire front commun face aux pressions extérieures exercées contre leur économie et leur sécurité ».