El Hadj Imam Al Imam Méité
Mon humble avis est que l’on peut leur souhaiter bonne fête, tout en respectant l’avis de ces illustres savants. A vrai dire, je trouve que considérer le fait de souhaiter bonne fête à quelqu’un comme une exhortation à l’adoration d’une autre divinité qu’Allah est trop tiré par les cheveux. D’autant plus que nombreux sont les propos du Pro- phète (saw) montrant qu’il commerçait avec eux, échangeait avec eux et a même été jusqu’à les laisser prier dans sa mosquée (cf. l’his- toire de la délégation de Najrane, dans Zaad almaad du même Ibn al- qayyim). Cette anecdote bat en brèche cette thèse, car il n’y a pas meilleure façon d’encourager quelqu’un à croireen quelquechose que de lui offrir son lieu de culte pour y pratiquer un autre culte. Qui, pourtant, oserait dire que le Prophète (saw) les encourageait dans leur chrétienneté ? N’est-ce pas plus grave que de dire à quelqu’un bonne fête?
Par ailleurs, l’esprit du message du prophète (saw) est aux antipodes de cette fatwa interdisant que l’on dise bonnes fêtes à nos concitoyens de confessions autres que musulmanes. Les exemples montrant la permissivité du prophète (saw) et de ses compagnons vis-à-vis des gens du Livre sont légion. Je ne citerai que l’histoire de la mort d’une dame de confession chrétienne, qui est décédée au temps des com- pagnons et dont le cortège funéraire était composé de beaucoup parmi ces derniers. Etait-ce une façon d’encourager les autres chrétiens à rester dans la chrétienneté ? Que dire de la constitution de Médine, la première au monde, que le prophète (saw) a entériné, avec l’en- semble des composantes religieuses de la cité, dont des juifs, des chrétiens, des païens etc. et qui a écrit en lettres capitales la notion de concitoyenneté pour l’ensemble des Médinois et le devoir de so- lidarité entre ces derniers ?
Enfin, un hadith du prophète (saw), dit que les devoirs du voisin sont « de lui porter secours, sitôt qu’il en a besoin, le féliciter quand un bonheur lui arrive, lui présenter les condoléances, lorsqu’un malheur le frappe et lui prêter au moment il veut emprunter ». D’aucuns pour- raient soutenir que c’est le voisin musulman, or une règle de usul pré- cise que ce qui est clair ne doit jamaisêtre rattaché à une cause particulière. Il n’est dit, nulle part, dans le hadith que c’est le voisin noir ou blanc, grand ou petit. Souhaiter bonne fête à son voisin chré- tien, n’est-ce pas « le féliciter quand un bonheur lui arrive » ?
Le Coran déclare ceci à propos des non-musulmans, qui ne leur font pas la guerre, ni pour leur foi, ni pour leur ravir leurs demeures : « Dieu ne vous défend pas la bienfaisance et l’équité envers ceux qui n’ont point combattu contre vous, et qui ne vous ont point bannis de vos foyers. Il aime la justice. ». ( S 60 V 8). N’est-ce pas de la bien- faisance que de souhaiter bonnes fêtes à son voisin ?
Les arguments en faveur de la thèse que je défends sont trop nom- breux pour être rapportés entièrement dans un écrit aussi court. C’est, au reste, l’islam dans son ensemble, Sunna et Coran. N’oublions pas que l’appel à l’islam ne peut se faire autrement que par les bonnes manières. Le prophète (saw) nous recommande d’adopter les gens et de se faire adopter par eux.
Sachez que des savants contemporains ont avancé plus d’arguments allant dans mon sens et qui bien sûr sont beaucoup plus incisifs que ce gribouillis. Je pense à Cheikh Elqaradawi et Cheikh Ali Gomaa, entre autres.
Allah seul est Sachant.