Un « testing » note que les femmes ont en moyenne 22 % de chances en moins de se voir proposer un entretien d’embauche pour un métier considéré comme « masculin ».
Une femme qui postule à un emploi considéré comme typiquement masculin, tel que celui de mécanicien automobile, a 22 % de chances en moins par rapport à un homme, à compétences et qualifications égales, de se voir proposer un entretien d’embauche, selon un « testing » rendu public lundi. Cette inégalité des chances atteint même 35 % pour un poste de chauffeur-livreur, selon cette étude réalisée après de 451 employeurs d’Île-de-France avec le concours de l’Observatoire des discriminations de la Sorbonne.
« Ce sont des chiffres énormes ! Et encore, c’est la partie émergée de l’iceberg, car nous n’avons pas testé ce qui se passerait ensuite, pendant l’entretien d’embauche », a commenté Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes, à l’origine de ce testing. Pour lutter contre la persistance des inégalités, « nous disons habituellement aux femmes qu’elles doivent se battre pour un meilleur salaire, pour pouvoir travailler à temps plein, et pour aller vers d’autres métiers que ceux, peu valorisés et mal payés, où elles sont souvent cantonnées », rappelle la militante féministe. « Or, il y a de vrais obstacles à leur entrée dans des univers professionnels où on ne les attend pas », relève-t-elle.
« Sexisme bienveillant »
Les auteurs de l’étude ont répondu à 451 offres d’emploi : 173 pour un poste de chauffeur-livreur, 185 pour un emploi de mécanicien automobile et 93 pour un poste de jardinier – des secteurs où les patrons peinent à recruter. À chaque offre, ils ont répondu en envoyant les CV de deux demandeurs d’emploi fictifs, Julie et Thomas (en veillant à que le dossier de Julie parvienne en premier au recruteur). Les deux candidats ont le même âge, des diplômes et des expériences professionnelles similaires. Pourtant, Thomas a été recontacté en vue d’un entretien par 168 entreprises ou collectivités, et Julie par 131 seulement.
Cette différence peut s’expliquer en partie par une forme de « sexisme bienveillant », selon Anne-Cécile Mailfert : les employeurs écarteraient les candidates pour les « protéger » de tâches pénibles ou du sexisme supposé de leurs futurs collègues masculins. Mais ce type de discrimination repose surtout sur des stéréotypes, comme l’idée que les femmes auraient moins de force physique que les hommes, ajoute-t-elle. La prochaine étape « consistera au lancement de poursuites judiciaires », de telles discriminations à l’embauche en fonction du sexe étant passibles de trois ans de prison et 45 000 euros d’amende, a averti la Fondation, qui a lancé un appel à témoignages.
Lepoint.fr