Le choix entre le développement local et la politique politicienne !
L’actualité politique ivoirienne de ces dernières semaines a été très riche et enrichissante. En attendant les résultats, on peut déjà en déduire plusieurs leçons : 1. Il y a une nette différence entre une élection présidentielle et une élection locale (municipale et régionale) ; 2. Pour le développement local, les ivoiriens sont prêts à toutes les alliances possibles, si celles-ci les mènent au développement. 3. Les cadres des partis politiques bien que respectueux de leur guide, tout en croyant profondément à leurs partis, ne sont pas pour autant prêts à suivre aveuglement toutes les instructions de leurs guides historiques ; 4. Les militants eux aussi ne sont plus disposés à suivre les instructions d’Abidjan. Ils veulent qu’on tienne compte de leurs avis.
D’où la profusion de candidats indé- pendants avec plus ou moins des militants convaincus. Mais en fait la vraie question, est celle-ci: Quels sont les éléments motivateurs du choix d’un candidat, d’un parti ou d’une alliance ? Alors que le citoyen lambda pense au dé- veloppement local, les politiques pensent plutôt à 2020. Or il y a un adage africain qui dit ’’qu’il vaut mieux attraper le poisson qui se trouve entre les mains, plutôt que celui qui est sous les pieds’’. Cet adage non seulement semble avoir été bien compris par les électeurs ivoiriens mais aussi par les professionnels de la politique.
D’où l’avènement de toutes ces alliances incroyables telles que FPI+PDCI+RDR, PDCI-RHDP, RHDP+FPI, FPI+PDCI dans certaines circonscriptions électorales. Les alliés d’hier qui sont aujourd’hui dans une mésentente, s’allient par endroits, et dans d’autre cas, nous assistons à l’amour parfait entre les ennemis d’hier, avec ou sans l’accord de leurs leaders respectifs. Devant ce spectacle rocambolesque, que se passe-t-il exactement dans la tête de l’électeur ? Ses critères de choix sont les suivants : 1.
Le quitus de son parti à tel ou tel candidat ; 2. Son affinité personnelle avec le candidat ; 3. Son opinion personnelle sur les Présidents Alassane, Bédié ou Gbagbo ; 4. Le bilan de la gestion du candidat sortant ; 5. La sympathie pour le candidat entrant ; 6. Quand il y a le choix entre exprimer son aversion pour un candidat et le développement de sa région ou sa commune, l’électeur préfère le développement sauf rare exception ; 7.
Dans le cas des élections municipales et régionales 2018, les électeurs ont le choix entre miser sur deux années 2019-2020 probables de leur développement avec un candidat proche du pouvoir, ou miser sur une hypothétique victoire de leurs candidats présidentiels en 2020 ; 8. L’analyse des programmes de société proposés par les candidats peut être un facteur déterminant pour les intellectuels mais pas suffisants ; 9. Le gain individuel et immédiat plutôt que le développement de la collectivité. Il faut d’abord ’’manger’’ ; 10. Le vote sanction. Au vu des résultats de la gestion d’un candidat sortant, l’électeur peut juger de renouveler ou pas sa confiance en cet individu ; 11. Le goût de l’alternance démocratique. On peut voter pour un candidat par simple goût du changement démocratique.
Quelles que soient les raisons et les critères choisis, on peut au moins souligner que ces élections sont totalement ouvertes et inclusives. La référence à un parti politique, à une personnalité historique, à un chef charismatique, à une tribu, à l’ivoirité, au patriotisme, au nationalisme ne suffit plus à elle seule pour convaincre les électeurs ivoiriens. Ils sont devenus plus exigeants, plus regardants, en particulier sur les compétences intrinsèques, techniques, managériales et relationnelles de celui ou de celle qui sollicite leurs suffrages. Pour les candidats sortants, le bilan s’avère un atout capital. Cette évolution de l’électeur ivoirien est de bon augure.
Car, c’est l’expression d’une certaine maturité politique, maturité sans laquelle l’avènement de la nouvelle génération d’Hommes politiques est impossible. En un mot comme en cent, quels que soient les résultats des élections municipales et régionales de 2018, la Côte d’Ivoire politique aura gagné en maturité, avec probablement la naissance d’une nouvelle génération d’Hommes politiques aux antipodes de l’esprit vindicatif, revendicatif et amnésique, et non impliqués directement et activement dans les querelles qui ont plongé notre pays dans l’abîme.
Par Fatim Djamila