Le ballon rond adoucirait-il les mœurs diplomatiques ? Le potentiel de croissance et de retombées économiques lié à l’organisation d’une Coupe du monde serait-il un ciment suffisamment séduisant pour que l’Union du Maghreb arabe existât enfin ? Vingt-quatre heures après sa défaite face aux États-Unis associés au Canada et au Mexique, malgré les algarades répétées, Rabat a annoncé son souhait d’être candidat. Pour la sixième fois. Les leçons de l’échec d’hier ont été vite retenues. Elles plaident en faveur d’une candidature commune qui pourrait aller de Rabat jusqu’à Tunis en passant par Alger. Une hypothèse de travail attractive.
Maroc 2026 : géopolitique des votes
Aux doux rêveurs d’une solidarité africaine, votant d’une seule voix, on opposera les résultats du vote du 13 juin. Une leçon de realpolitik appliquée au foot business. Sur les cinquante-quatre fédérations du continent, cinquante-trois ont pris part au vote, le Ghana n’a pas pu prendre part au scrutin, écarté pour soupçons de corruption. Si trente-huit ont voté Maroc, onze ont choisi le projet United 2026 (Les États-Unis en association avec le Canada et le Mexique). Le lobby de Washington a été puissant, parfois brutal, efficace. Et les pays du Golfe (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Koweït…) ont majoritairement opté pour leur allié nord-américain. L’Algérie a voté Maroc. Une demi-surprise. En avril dernier, le pouvoir algérien avait rendu publique sa décision de soutenir la candidature de Rabat malgré leurs confrontations décennales. Kheïreddine Zetchi, président de la fédération algérienne de football, a ouvertement évoqué un dossier Maroc-Algérie pour 2030. Un pays seul a peu de chances de pouvoir contrer le pack Uruguay-Argentine-Paraguay. Mais les obstacles sont nombreux.
Maghreb 2030 : atouts et handicaps
Sur le papier, l’idée est séduisante, cohérente. Le Maghreb aligne les points forts : position géographique, a une heure de décalage horaire (en été) de l’Europe, passion pour le football, dessertes multiples – aéroports, ports – liées au tourisme de masse, langue commune… Le budget chiffré par Rabat pour le dossier 2026 dépassait les quinze milliards. Si Alger et Tunis rejoignaient l’organisation, c’est toute la région qui bénéficierait d’investissements, d’infrastructures pérennes (l’idée étant que les installations siglées Coupe du monde profitent ensuite à la population), d’un solide coup de fouet économique. Et d’un cap commun. Le commerce entre les cinq pays (le trio précité, Libye et Mauritanie) de l’UMA (Union du Maghreb arabe) ne représente que 3 % de leurs échanges globaux, ce qui en fait la région la moins intégrée au monde. La guerre froide entre l’Algérie et le Maroc gèle toute possibilité d’envol. Le foot peut-il débloquer la situation ? Son dantesque potentiel économique, certainement.
Le Point Afrique