“MON MARI A PERDU LA VIE LORS D’UN VOYAGE QU’IL EFFECTUAIT AVEC SA MAITRESSE”

BIEN DES ANNEES APRES, JE N’ARRIVE PAS A PARDONNER.

Pardonner oui, mais comment pardonner un homme qui a passé sa vie à vous tromper et qui a fini par perdre sa vie en vous trompant lorsque vos enfants sont presque déscolarisés sans personne pour vous aider, que vous vous retrouvez dans la rue sans endroit où dormir, quand vos enfants se couchent affamés et que vous perdez le sommeil sur des années ? Si je n’avais pas eu ma mère, que serais-je devenue ?

Mon défunt mari n’avait jamais eu de respect pour moi. Il était autoritaire et très violent. J’avais toujours voulu travailler mais lui ne me l’avait jamais permis. Il était fonctionnaire et avait les moyens de tout se permettre. Mais au lieu de dépenser son argent pour sécuriser sa famille, mon mari courtisait à longueur de jour des filles de l’âge de notre ainée…

Toutes les fois où j’avais voulu réclamer mes droits, j’en suis sortie molestée et mes enfants qui venaient défendre leur mère, se retrouvaient sans argent de poche pendant des semaines.

J’avais construit ma vie sur le bon vouloir de mon mari. Il était un parfait dictateur, je n’avais jamais mon mot à dire. Malgré tout cet argent qu’il avait, il n’avait jamais rien mis en mon nom ni en celui de l’un de nos quatre enfants.

Des missions imaginaires comme celle au cours de laquelle il perdit la vie étaient pléthorique. Il partait vendredi et rentrait lundi à 7h du matin juste pour prendre sa douche et repartir au travail comme si de rien n’était.

Des fois, je tombais sur des indices laissés sciemment par ces filles dans sa voiture ou dans la poche de ses vestes. Je me taisais et souffrais intérieurement.

Tout ce que mon mari m’a offert durant 16 ans de mariage, fut un kiosque d’alimentation général devant la maison. Ce n’était qu’une activité pour m’occuper. Il veillait à ce que ce ne soit pas assez rentable pour que je puisse me permettre des économies et pour y arriver, il m’obligeait à payer certaines tranches de la scolarité de nos enfants ou leurs fournitures scolaires.

J’avais toujours des déficits dans mon commerce et il en était conscient, sans oublier que ma marchandise servait plus à nourrir la maisonnée qu’autre chose. Cette boutique n’était qu’une vitrine de la femme occupée qu’il voulait montrer comme image à ses collègues et à son entourage.

Sa famille, l’une des plus arrivistes au monde, ne voulait que son argent. Elle  trouvait que son fils en faisait de trop pour mes enfants et moi alors qu’il n’en etait rien… Lorsque j’arrivais à m’offrir un nouveau pagne et que sa mère ou ses sœurs me voyaient aux cérémonies avec, l’histoire faisait le tour et tous disaient que je gaspillais l’argent de leur frère.

Ils étaient chaque jour fourrés chez nous, à débiter leurs incessants problèmes d’argent à leur frère. Ils ne se rendaient pas compte que je souffrais. Au contraire la petite moto que m’avait achetée mon mari pour déposer les enfants à l’école, était encore objet de jalousie.

Cette moto, toute une histoire! J’avais sur deux années participé à une tontine pour en avoir les moyens au trois quart. Je l’avais supplié de me compléter l’argent afin que je puisse moi-même aller déposer nos enfants à l’école. Ce qu’il ne faisait jamais. Il n’en avait jamais le temps et deux fois de suite les conducteurs de taxi-moto avaient fait des chutes avec les deux ainées.

A force d’insistance, il avait déposé 150 000 FCFA sur la table pour que je me débrouille avec. J’avais alors complété pour m’offrir cette moto avec en tête de la laisser aux enfants plus tard.

J’avais beaucoup donné à nos enfants. Malgré sa présence, mon mari était inscrit aux abonnés absents dans l’éducation de nos enfants. Il les voyait à peine, passait à peine du temps avec eux.

Nos enfants n’avaient pas droit aux vacances, ils étaient toujours à la maison, alors qu’il n’y avait pas de chaleur dans cette maison. Je voyais mes enfants tristes mais qu’est-ce que j’y pouvais ? Ils avaient une peur bleue de leur papa…

J’avais fini par m’habituer à cette vie minable vie. A chaque jour suffisait sa peine. Je me laissais porter au gré du vent et priais pour mes enfants.

Un samedi nuit, vers 2 heures du matin, je reçus un coup de fil des plus alarmants. Un homme appelait le dernier numéro appelé la veille par mon mari, c’était le mien, pour m’informer qu’il y avait eu un grave accident de circulation sur la route du nord et que mon mari et la fille à bord avaient tous deux perdus la vie…

Je laissai tomber le téléphone…

Mon mari est mort ?

Je me suis retenu suffisamment pour ne pas réveiller les enfants mais mon cœur était terrassé. Je finis par appeler ma mère et ensuite ma belle-famille pour leur annoncer la nouvelle. Avant 4heures du matin, la maison fut remplie de monde.

Il fallait partir chercher les corps… J’étais perdue, dévastée, totalement perdue.

Qui est la fille en question dans la voiture ? Il fallait l’identifier pour joindre sa famille et ce ne fut qu’une fois sur place qu’on finit par trouver son téléphone. C’était la maitresse de mon mari… Une jeune  fille d’à peine 25 ans. J’eus la honte de ma vie… Dans le sac de mon mari, il y avait beaucoup d’argent. Fort heureusement les premiers arrivés sur les lieux de l’accident étaient des personnes honnêtes mais dès que mon beau-frère découvrit le sac, il s’en accapara. Ce fut la dernière fois que je vis l’argent de mon mari.

Quelques semaines après son enterrement, je fus approchée par ma belle-famille pour m’informer que la maison dans laquelle nous vivions mon mari et moi était construite sur un terrain familial et qu’ils allaient devoir la vendre pour se partager les gains…

J’eus le vertige! Et mes enfants ?

Ils ne voulurent rien entendre. Etant donné que nous n’étions pas légalement mariés, je n’avais pas de quoi réclamer mes droits. Les enfants si mais encore faudrait-il trouver de bons avocats pour nous aider, et avec quels moyens ?

Je les suppliai de nous trouver quelque part où rester. Mais épuisée de quémander, je rentrai en famille avec mes enfants au grand désarroi de ma mère en larmes. Ma mère voulut que nous allions en justice mais les connaissant très mystiques, j’eus très peur pour la vie de mes enfants. Je ne pouvais pas perdre mes enfants en plus de mon mari ou permettre que mes enfants me perdent alors qu’ils n’avaient que moi au monde…  Ces gens du vivant de leur fils étaient si cruels envers nous…

Je me retrouvai dans la maison familiale de ma mère, dans une petite pièce avec mes enfants. Ma propre moto que j’avais achetée m’avait été retirée sous prétexte que c’était un bien de mon défunt mari. Ils avaient tout pris, la voiture, les clés de la maison…

Je n’avais pas pu prendre les documents légaux des biens de mon mari car lui-même les avait soigneusement cachés avant sa mort prématurée. Je ne lui connaissais pas d’huissier ou d’avocat… Je ne savais pas dans quelle banque il avait ses comptes pour aller y réclamer quoi que ce soit… Mes enfants devaient continuer l’école mais comment ? Ce fut la fin de ma vie. La douleur était si profonde que je passais mes jours et nuits à le maudire malgré son décès.

Ce fut ma mère qui mit en vente son terrain pour nous soutenir. Elle me prit un petit studio et un conteneur pour reprendre ma vente d’alimentation générale.

Il m’arriva de dormir affamée, mes enfants aussi parce que je n’avais rien vendu de la journée et que les dépenses avaient déjà pris mes économies… Il m’était arrivé de perdre de vue l’avenir. Je vivais au jour le jour dans la perte d’un mari que j’avais aimé de toutes mes forces et que je détestais tout autant aujourd’hui encore.

Lorsque ma fille eut son Bac, elle vint me voir et me dit :

– Maman, je ne veux plus aller à l’école. Depuis le décès de papa, je te vois souffrir pour nous, je veux t’aider. Je vais chercher un travail et gagner un peu d’argent pour te soutenir …

Je pleurai jusqu’au petit matin. Je l’appelai et la suppliai de poursuivre ses études car j’étais décidée à lutter pour eux.

J’avais vraiment lutté pour mes enfants après le décès de leur père et jamais aucun membre de ma belle-famille n’a demandé d’après mes enfants.

Ma mère qui est une institutrice avait elle-même mené les démarches dans l’entreprise de mon mari pour que nous rentrions dans ses fonds. La procédure fut si longue que je finis par m’en lasser, surtout que je ne voulais plus avoir ma belle-famille à dos.

Quatre années après, j’avais été appelée par un homme, il s’était présenté et m’avait dit qu’il m’appelait pour des formalités en vue de toucher de l’argent de mon mari… Je découvris qu’il avait souscrit à des assurances mais en plus de cela son service devait nous verser de l’argent et ces sommes s’élevaient à plus de quarante millions de franc… Je pris peur tout d’abord, tout cet argent ?

Je demandai au monsieur si la famille de mon mari avait été mise au courant.

– Mais c’est vous les bénéficiaires, c’est vous sa famille, m’avait-il répondu…

Mon cœur en ressenti un profond soulagement. Lorsque je touchai les fonds, aidée par un oncle, je fis rapidement les papiers et partis en Europe avec mes enfants pour qu’ils puissent y continuer leurs études.

Mais la procédure durant plus de 6 ans, entre le décès de mon mari et la mise à disposition de cet argent… Six longues années au cours desquelles ma vie ne fut qu’enfer, perte totale de foi, de confiance en soi, d’espoir…  Nous ne sommes plus jamais revenus au pays, par peur d’être la cible de ma belle-famille.

En Afrique, la méchanceté gratuite est si réelle, elle commence par la malhonnêteté de votre propre conjoint… Je me suis demandée si mon mari n’avait pas travaillé dans une entreprise en règle, que seraient devenues nos vies ? Avait-il lui-même pensé à nous ? A un après lui ? Ou même cette assurance était juste une couverture pour lui-même car il ne s’était jamais douté qu’il allait mourir par surprise…

Mes enfants et moi avions tellement souffert. Ce fut le summum de la peine pour moi… Mais je sais qu’il y a encore des millions de femmes qui vivent ce que j’ai vécue moi aussi. A ces femmes je demande la force car on en sort toujours blessée, dévastée, perdue, dégradée. Et si personne n’est là pour vous tendre la main, vous mourez vivantes…

AMJ

 

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