Dans les marchés d’Afrique subsaharienne, plus de 90% des transactions de paiement électroniques sont réalisées via des solutions digitales, selon les experts. Et ce n’est pas fini. Le secteur devrait poursuivre sa transformation sous l’effet d’une innovation technologique constante, souvent portée par les fintechs. D’ailleurs une startup tanzanienne, Nala -vainqueur de l’Ecobank Africa FinTech Challenge 2018-, en donne déjà l’exemple.
Son service permet le paiement mobile offline. Ces réalités rendent le digital tellement omniprésent dans l’industrie des paiements que même le traitement du sujet de la monétique en Afrique met souvent plus l’accent sur les solutions mobiles, un peu comme si la carte était sans impact significatif. De plus, l’expansion des géants mondiaux à travers le Continent et le déploiement des acteurs locaux est presque toujours en lien avec le digital. La carte est-elle menacée ou dépassée dans les marchés subsahariens ?
Tout sauf le cash
Dans les arcanes du secteur en tout cas, on refuse de parler d’adaptation à une consommation africaine de la monétique. «La carte ne peut pas et ne vas pas disparaitre», s’accordent à dire Blaise Akouantchédé et Valentin Mbozo’o, respectivement directeurs du GIM-UEMOA et du GIMAC. «L’objectif de la promotion des moyens de paiement aujourd’hui, poursuit Mbozo’o, est de digitaliser au maximum l’usage du cash. Ainsi, on veut ratisser large et permettre une plus grande utilisation de la carte chez les usagers susceptibles d’y être ouverts et du mobile chez les autres».
Mais partout, le constat est le même : la monétique digitale est le grand favori de l’inclusion financière qui, rappelons-le, est l’un des objectifs cruciaux du développement durable de la Banque mondiale, auxquels le monde du business est appelé à prendre part activement. D’un point de vue pratique, l’avantage du digital réside dans le coût et le facteur temps. C’est rapide et peu coûteux dans un contexte subsaharien où obtenir une carte bancaire peut parfois nécessiter jusqu’à plusieurs semaines d’attente.
Leapfrog
Pour arriver cependant à faire évoluer simultanément l’usage de l’ensemble des outils de la monétique tout en réalisant l’inclusion financière, les acteurs du secteur comptent beaucoup sur les vastes projets d’interopérabilité (cartes, solutions mobiles et plateformes de transfert d’argent) en cours à l’Ouest et au Centre du Continent. Cela étendra le réseau des banques aux populations non bancarisées et élargira par ricochet le marché régional de la monétique. «Je suis convaincu qu’il n’est pas forcément nécessaire d’avoir le même parcours que le reste du monde. En Afrique, il y a des étapes qu’on peut sauter. C’est cela le leapfrog», nous explique Ahmed Coulibaly de ICS.
«L’une des raisons qui a retardé le développement de la carte dans nos économies, poursuit-il, c’est le déficit technologique. Avant, on n’avait pas d’outils pour la vulgarisation des cartes. Aujourd’hui, nous en avons, mais le mobile a eu l’ingéniosité de révéler une issue plus rapide pour résoudre la problématique de l’inclusion financière. Il y a donc des solutions 100% carte, 100% portefeuille électronique, mais aussi mixtes. A noter qu’on s’avance également vers la carte virtuelle. Il y a des endroits chez nous où la carte serait beaucoup plus propice, il y’en a d’autres où le mobile l’emporte. Il est question aujourd’hui de vulgariser les deux».
Vulgariser les deux, c’est aussi ce vers quoi s’avancent désormais les marchés du nord du Continent. Alors que la carte y a historiquement plus de succès, la promotion des solutions de paiement digital se veut de plus en plus importante. De part et d’autre, toutefois, le volet sécurité des transactions bénéficie d’une attention toujours plus importe pour contrer efficacement la cybercriminalité.
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