Procès en Côte d’Ivoire : l’autre couperet judiciaire au-dessus de Charles Blé Goudé

Tout comme son mentor Laurent Gbagbo, Charles Blé Goudé vit dans l’incertitude judiciaire. L’ancien président ivoirien et son ancien ministre de la Jeunesse ont pu arracher la liberté conditionnelle, le temps que Fatou Bensouda revoit sa copie d’appel. Depuis ce mercredi 18 décembre, loin des prétoires de la Cour pénale internationale, Charles Blé Goudé doit répondre devant la justice ivoirienne de lourds chefs d’accusation.

C’est par contumace que Charles Blé Goudé sera jugé pour «actes de torture, homicides volontaires et viol» qu’il aurait commis lors de la crise post-électorale de 2010. Le procès de l’ancien ministre de la Jeunesse de Laurent Gbagbo s’est à peine ouvert ce mercredi 18 décembre que ses avocats ont déjà claqué la porte du prétoire de la Cour d’appel d’Abidjan.

« Violation flagrante » !

«Cette audience est une violation flagrante de son droit élémentaire à un procès équitable, qui requiert la présence de l’accuséCharles Blé Goudé n’est pas en fuite, il ne se soustrait pas à la justice ivoirienne. Il est à la CPI par l’action des autorités ivoiriennes», dénonce dans une déclaration à l’AFP, Me Ndry Claver qui n’exclut pas une procédure parallèle devant la Cour africaine des droits de l’Homme, basée à Abuja au Nigéria.

Toute la controverse juridique se forme autour des faits incriminés. Pour la défense de Charles Blé Goudé, assurée par un bataillon d’avocats locaux, leur client ne peut pas être poursuivi deux fois pour le même crime concernant une même période. En janvier dernier, la Cour pénale internationale (CPI) où il a été transféré par la Côte d’Ivoire en 2014, l’a acquitté en même temps que Laurent Gbagbo, de crimes contre l’Humanité. Dans l’attente d’un recours de Fatou Bensouda, les deux hommes sont en liberté conditionnelle.En face, Marie-Léonard Lebry, le procureur de la Cour d’appel rame à contre-courant de cette thèse de la défense.

Pour son bureau, Charles Blé Goudé est poursuivi pour des crimes différents des chefs d’accusation de la CPI. Harangueur de foules au point d’être surnommé « le général de la rue », l’ancien président des Jeunes patriotes, un conglomérat ultranationaliste de mouvements de jeunesses proche du FPI (ancien parti au pouvoir), était un des plus grands soutiens populaires de Laurent Gbagbo lors du coup d’Etat de 2002. Un fait décisif qui a conduit à une période d’instabilité politique dont le point d’orgue a été atteint avec la crise post-électorale de 2010-2011 qui a fait plus de 3000 morts. Plusieurs organisations de la société civile et des ONG internationales voient dans le mouvement des Jeunes Patriotes, une milice paramilitaire qui aurait servi dans plusieurs exactions lors de la crise.

Charles Blé Goudé, personnage courtisé de l’échiquier politique

Depuis La Haye où il est assigné à résidence, Charles Blé Goudé doit suivre de très près ce nouveau couperet judiciaire qui pend au-dessus de sa tête. En août  dernier, lors de son congrès d’investiture à Abidjan, le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (Cojep) avait choisi de porter Charles Blé Goudé à la présidence du parti. « J’ai des ambitions pour un jour diriger mon pays, avec une équipe qui comprendra qu’il faut faire de la politique autrement en Côte d’Ivoire », avait-il confié à nos confrères de France 24, remettant ses ambitions au-delà de la présidentielle du 31 octobre prochain.

Depuis cette déclaration publique, Charles Blé Goudé était apparu comme une des personnalités les plus courtisées de l’échiquier politique ivoirien. Déjà candidat à la présidentielle 2020, Guillaume Soro s’était rapproché de cet ancien camarade à la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (Fesci) au sein de laquelle ils ont commencé à bâtir leurs réseaux et leur popularité. En quête d’alliés face à la machine électorale du RHDP d’Alassane Ouattara, l’ancien président de l’Assemblée nationale avait tenté de rallier à sa cause ce lui qui remet son destin présidentiel à plus tard.