Ramadan 2020 sous confinement : au-delà de l’épreuve, une chance à saisir pour les musulmans

Le nouveau coronavirus ne connaît aucune frontière ni ne distingue les convictions des uns les autres. Depuis plusieurs semaines, il contamine en silence et tue chaque jour des centaines de personnes en France et partout ailleurs le monde, semant la désolation auprès des familles. La crise sanitaire dans laquelle est plongée la France n’est pas prête à marquer un temps d’arrêt alors que débute le jeûne du mois du Ramadan.

Après leurs concitoyens chrétiens et juifs qui ont célébré, sans rassemblements, le Carême et Pâques pour les premiers, Pessah pour les seconds, c’est au tour des musulmans de passer un mois du jeûne confiné. Cette période va forcément être vécue d’une manière très particulière pour les fidèles du Ramadan. Mosquées fermées, réunions familiales et religieuses interdites en dehors du foyer, déplacements limités à l’essentiel : des rites et des habitudes bien ancrés sont chamboulés. La frustration, générée par le confinement, est redoublée, elle s’exprime même ouvertement. Elle est, somme toute, légitime.

Néanmoins, les musulmans sont aussi conscients que le reste de la population de la menace que fait planer le Covid-19 pour eux-mêmes, leurs proches et la société. L’écrasante majorité d’entre eux acceptent la situation telle qu’elle s’impose à tous. Le confinement ayant débuté mi-mars, ils ont l’avantage d’avoir eu le temps de se préparer (du moins sur le principe) à l’arrivée d’un Ramadan inédit.

Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a lancé dès le 28 mars un message saupoudré de recommandations en ce sens. « Quelle que soit la durée du confinement en vigueur, nous devrons nous hisser individuellement et collectivement à la hauteur du défi qu’il nous impose. Nous devrons bâtir ensemble des solutions alternatives qui nous permettront de vivre, dans la joie et l’espérance, ces moments importants de notre calendrier spirituel », avait prévenu l’instance.

Il en va du bon sens mais aussi de la responsabilité tant individuelle que collective. Une responsabilité que les organisations musulmanes et les leaders religieux ont pris à bras le corps en apportant leur contribution à l’effort national visant à limiter la propagation du Covid-19. Outre la fermeture sans contestation des mosquées, les appels aux fidèles à respecter les mesures des autorités ont été largement partagés au nom même de la préservation de la vie. Nombreuses sont les mosquées et les associations musulmanes qui participent également au formidable élan de solidarité, au service du bien commun.


Le confinement peut se transformer en une chance ; à chacun de la saisir

Le mois du Ramadan, par ses multiples mérites qui incitent les musulmans à multiplier les efforts et les bonnes actions, est une période propice à un changement intérieur profond dont les conséquences doivent être bénéfiques pour le reste de l’année. Mais il ne suffit pas de le dire pour entamer le changement : cela exige de chacun de prendre conscience de ses faiblesses et de ses défauts, de faire des efforts et d’engager un travail de réflexion, d’organisation, de planification, de mise en action… Et si, à cet effet, le confinement n’est finalement qu’un mal pour un grand bien ?

Le niveau de résilience dépend de la capacité à chacun de voir et de tirer du positif face à l’adversité. « Si l’on décide de ne pas subir cette contrainte et de l’adopter comme volonté de se maîtriser, de faire des efforts, d’adoucir ses relations aux autres, l’expérience changera du tout au tout », nous indique la psychanalyste Lalla Chems En Nour, animatrice de la rubrique Psycho. « C’est au cœur même de la contrainte que l’on découvre la vraie liberté. Le confinement peut devenir l’occasion d’un retour à la nature profonde de ce mois de jeûne sacralisé. Le message n’est-il pas de réfléchir aux signes ? Voilà une occasion offerte de revenir à l’esprit initial de cette demande d’effort du Tout-Puissant. »

Bien plus qu’une épreuve, le confinement peut et devrait être vécu, pour ceux et celles qui parviennent à s’armer de patience et à gérer leurs émotions, comme une occasion inespérée de se recentrer sur l’essentiel et de faire une introspection sur soi pour mieux, par la suite, servir soi-même, les autres, la société mais aussi, in fine pour les croyants, Dieu.

Servir les autres, c’est ce que font depuis des semaines les personnels soignants de toutes convictions, en première ligne face à la crise sanitaire, de même que les travailleurs qui font tourner le pays, qui ne peuvent se saisir en conséquence de la chance que peut cacher l’épreuve du confinement. Vers eux nos respects doivent se tourner ; et la meilleure façon de le manifester est de rester chez soi, sauf lorsqu’une situation l’exige, aussi longtemps que nécessaire.

Les mosquées sont fermées mais Dieu est partout là où Son nom est invoqué. Le Ramadan est confiné mais la générosité ne saurait s’arrêter aux portes du foyer. De multiples actions solidaires sont mises en place par des associations de tous horizons ; chacun peut y contribuer à distance par des dons si le bénévolat est impossible. Des outils numériques existent pour maintenir des liens affectifs avec les personnes aimées, pour engager des liens sociaux avec les personnes seules, pour raffermir des liens spirituels avec des coreligionnaires.

Alors très bon mois du Ramadan aux musulmans et bon confinement à tous ! Prenez soin de vous !

Saphirnews