RECONCILIATION NATIONALE : QUELLE TREVE ENTRE ADO ET L’EGLISE CATHOLIQUE ? (Première partie)

 

Tous les ivoiriens et les amis de la Côte d’Ivoire aspirent à la paix, la paix véritable, la paix sans faux-fuyant. Mais qui doit-on réconcilier en fait ? Quels sont les protagonistes à réconcilier ?

De toutes évidences il y’a au moins deux entités à réconcilier en Côte d’Ivoire. Il y a certes les hommes politiques et principalement le président actuel et les deux anciens présidents encore en vie que sont Henri KONAN BEDIE et Laurent GBAGBO. Mais il y’a aussi et surtout Alassane OUATTARA et l’Eglise Catholique de Côte d’Ivoire. Dans le premier cas, on peut dire qu’entre les trois présidents ivoiriens encore en vie, ils se sont autant querellés que réconciliés. Donc à leur niveau la réconciliation est du domaine du possible. Mais entre l’Eglise Catholique et le Président Alassane OUATTARA la « guerre » date de longtemps. Elle est pernicieuse et potentiellement dangereuse pour la coexistence religieuse si l’on y prend garde.

 

  • Au fait que reproche l’Eglise Catholique à Alassane Ouattara ?
  • Quelles sont les réponses d’Alassane OUATTARA aux revendications de l’Eglise Catholique ?
  • Quelle est la différence entre les revendications de l’Eglise Catholique et celles de l’opposition ivoirienne ?
  • Y a t’il collusion entre l’Eglise Catholique et l’opposition contre Alassane OUATTARA ?

 

De façon générale, les causes semblent liées en apparence à des questions d’ordre politique. Car, chaque fois que la température monte entre Alassane et ses adversaires politiques, quels qu’ils soient, la tension monte automatiquement entre l’Eglise catholique et Alassane.

Cependant, dans cette opposition ADO et l’Eglise Catholique, on pourrait parler de combat asymétrique. Car, autant l’Eglise Catholique parle abondamment, régulièrement et bruyamment de ses différends avec le Président, autant Alassane n’en parle jamais du moins publiquement. Par ailleurs, il faut faire d’emblée quelques constats ci-après :

 

  1. La confrontation entre l’Eglise Catholique et ADO n’est jamais descendue au niveau des fidèles catholiques et des fidèles musulmans ;
  2. La confrontation n’est jamais rentrée dans le domaine des fondamentaux de la croyance religieuse. Elle est restée uniquement cantonnée dans le domaine politique. Fort heureusement. Dans tous les cas, il ne pouvait en être autrement.
  3. Dans cette guéguerre, les autorités religieuses catholiques ont exprimé leur opposition de deux manières : de manière institutionnelle (les déclarations de la conférence épiscopale) ou individuelle par la voix de certains prélats qui prenaient la peine de préciser chaque fois, qu’ils s’exprimeraient à titre personnel. Et malgré la virulence de certains propos de dignitaires religieux catholiques contre la politique d’ADO, l’Eglise officielle n’a jamais condamné de tels propos politiques. Il faut noter cependant que parfois certains citoyens et prélats catholiques ont eu à désapprouver les critiques virulentes des autorités religieuses catholiques contre ADO ;

 

  1. Le différend entre ADO et l’Eglise catholique n’est pas partagé dans les autres obédiences chrétiennes chez les protestants, les méthodistes et les églises africaines notamment Papa Nouveau et les harristes ;
  2. Autant les relations entre l’Eglise Catholique et ADO pourraient être qualifiées d’exécrables autant les relations entre le Vatican et Ado sont excellentes. Ainsi, alors que l’église catholique était absente à la prestation de serment du président ADO, le Vatican y était représenté par le nonce apostolique ;
  3. ADO et son épouse continuent de travailler avec de nombreux chrétiens aussi bien dans l’administration publique que dans son parti politique.

 

Ainsi, à l’évidence, la réconciliation entre Alassane OUATTARA et l’Eglise Catholique implique nécessairement quelques préalables :

  • L’église doit reconnaitre qu’elle a combattu Alassane OUATTARA dans sa volonté de briguer la magistrature suprême ;
  • L’église doit noter que dans son opposition à Alassane, les arguments utilisés n’étaient pas d’ordre religieux mais plutôt politiques ;
  • L’église doit admettre que dans la confrontation entre l’opposition et Alassane OUATTARA, ses positions étaient très proches de celles de l’opposition et parfois assimilables même, selon les partisans d’Alassane ;
  • Alassane doit accepter que ce n’est pas toute la hiérarchie catholique qui l’a combattu et encore moins la communauté catholique ou chrétienne ;
  • Il doit aussi reconnaître que le Vatican n’a jamais épousé les thèses de la hiérarchie catholique ivoirienne contre lui. Du moins publiquement.

De ce qui précède, la réconciliation entre Alassane OUATTARA et l’église Catholique dépend en particulier de l’église, elle-même.  Dans cette perspective, elle devrait :

  1. Adopter une attitude de neutralité entre l’opposition et Alassane OUATTARA ;
  2. Jouer un rôle de médiateur impartial en cas de crise entre les acteurs politiques, comme elle l’avait tenté au début de la crise post-électorale de 2011 ;
  3. Tempérer les ardeurs de certains prélats qui s’attaquent régulièrement au Président de la République. Même à titre personnel, cela ne donne pas une bonne image des uns et des autres. Car aussi bien dans la famille chrétienne et non chrétienne, ces critiques sont diversement appréciés.
  4. Dire ou faire dire comme le Père Basile que : « l’église n’est pas à vendre ou à acheter par des dons, offrandes et autres promesses de construction d’église…,» n’est pas biblique. Car, la reconnaissance est une valeur chrétienne et universelle. Cela est d’autant plus injuste, que Alassane a autorisé volontairement et sans pression l’utilisation de milliards de fonds publics pour la rénovation de la cathédrale d’Abidjan et la finition des travaux de l’hôpital Moscati de Yamoussoukro, entre autres.
  5. Dire ou faire dire comme toujours, le Père Basile que : « ″l’Eglise Catholique est digne et reste dans une posture de vérité en Côte d’Ivoire″ », c’est afficher le mépris pour des millions d’Ivoiriens et de nombreuses institutions internationales qui pensent justement le contraire. Or la vérité de l’église se veut d’abord et avant tout une vérité universelle, donc acceptée de tous. Mais à l’évidence, ce n’est pas le cas. Loin s’en faut.

À suivre…

Par Alex Brou Comoé