Célébration du Ramadan : les musulmans américains, très inquiets, exigent des mesures de sécurité renforcées

A l’heure où nombre de mosquées ouvrent grand leurs portes pour accueillir dignement le mois de Ramadan, propice à l’élévation spirituelle, mais aussi au partage, à l’entraide, à la compassion et à la générosité du cœur, l’anxiété s’empare de plusieurs figures de l’islam Outre-Atlantique. Toutes redoutent le pire dans le sillage des massacres épouvantables commis en Nouvelle-Zélande, au Sri Lanka et en Californie.

Dans un monde marqué du sceau de la tragédie, où l’horreur du terrorisme a endeuillé en peu de temps deux mosquées à Christchurch, trois églises à Colombo, et une synagogue à San Diego, un frisson de peur parcourt la communauté musulmane américaine, poussant l’une de ses figures de proue à prendre la parole pour exiger des mesures de sécurité renforcées autour des Centres islamiques.

Première femme voilée à être admise dans le saint des saints du pouvoir en 2009, en sa qualité de Conseillère en charge des Affaires religieuses et communautaires, Dalia Mogahed a indéniablement laissé son empreinte sur l’ère Obamanienne. Cette Américaine d’origine égyptienne faisait alors la fierté des siens, tout en forçant le respect d’une Amérique qui découvrait que l’on pouvait être femme, musulmane, voilée et suffisamment compétente et digne de confiance pour graviter autour de l’homme fort de Washington.

 

« Actuellement, il n’y a pas de mosquées en Amérique qui ne soit pas préoccupée par sa propre sécurité tout au long du mois de Ramadan », a alerté Dalia Mogahed, sous sa nouvelle de casquette de directrice de recherche de l’Institut de politique sociale et de compréhension mutuelle.

Alors que certaines mosquées ont sollicité des subventions gouvernementales et que d’autres ont lancé de grandes collectes de fonds pour truffer leurs enceintes sacrées de caméras de vidéosurveillance et poster des vigiles à leur entrée, Dalia Mogahed, qui ne se résoud pas à voir les lieux de culte musulmans ressembler de plus

                                                                                                                                                                                                                           Dalia Mogahed seule femme voilée de l’administration Obama

en plus à des aéroports, avec « leurs détecteurs de métaux et leurs contrôles de sécurité drastiques », pointe un doigt accusateur vers l’artisan du désastre : l’incendiaire Donald Trump.

Elle n’est pas la seule à observer, avec une inquiétude grandissante, le retour en force du suprémacisme blanc sur le sol de la bannière étoilée et son infernale spirale de violences, mais aussi à quelle vitesse il fait tache d’huile ailleurs, sous d’autres latitudes.

L’érudit musulman du Texas Omar Suleiman, fondateur de l’Institut Yageen de recherche islamique, qui a acquis une notoriété nationale en supervisant l’aide d’urgence aux victimes de l’ouragan Katrina, à la tête de l’association « Musulmans pour l’humanité », partage ses craintes et dresse le même sombre tableau.

« Je suis très préoccupé par la climat politique délétère dans lequel nous vivons. Et comment ne pas l’être quand le président des Etats-Unis, dans des tweets indignes de sa fonction et totalement irresponsables, fait le lien entre les interventions de Ilhan Omar, la représentante voilée du Minnesota, et les attentats du 11 septembre, et qualifie les demandeurs d’asiles d’envahisseurs ! », s’est-il récemment ému dans un entretien à la presse américaine.

« Le drame absolu de Christchurch a terrifié les musulmans d’Amérique, de même que les attaques abominables qui ont endeuillé des églises au Sri Lanka et dernièrement une synagogue ici, en Californie. Ces attentats ignobles hantent les esprits et je n’ai jamais perçu une telle angoisse chez mes coreligionnaires depuis le 11 septembre. Ils s’attendent pour la plupart d’entre eux à être la cible d’un nouvel attentat meurtrier », a-t-il ajouté avec gravité, en établissant un lien empirique entre l’islamophobie et l’antisémitisme.

L’auteur de la récente fusillade dans la synagogue de San Diego ne s’est-il pas réclamé de l’influence du suprémaciste blanc Harrison Tarrant pour passer à l’acte, le monstre de cruauté islamophobe qui diffusa en direct son incursion sanglante dans les mosquées Al Noor et Linwood de Christchurch ?

Abondant pleinement dans son sens, Dalia Mogahed a révélé que les autorités californiennes ont acquis l’intime conviction que le tueur antisémite de la synagogue et le pyromane islamophobe d’une mosquée à Escondido, en mars dernier, ne sont qu’une même et seule personne.

« Si vous êtes actuellement un musulman visible en Amérique, vous pouvez vous attendre à de l’hostilité presque partout où vous allez », se désole Omar Suleiman, en constatant avec émotion que le temps où « la mosquée était le seul endroit sûr, où nous pouvions laisser nos enfants se promener en toute quiétude, et nous pouvions nous épanouir dans notre foi en toute sérénité » est révolu.