Chef Félicia Kouadio : “J’ai installé le garba, le pain brochette et l’APF aux USA“

Ivoiro-sénégalaise, Felicia Kouadio épouse Yoboué est chef cuisinier vivant aux USA, précisément à Washington DC. Propriétaire de KOFEMI GRUB N’GO, un mobile pour faire la nourriture (food truck), elle est passionnée de cuisine, une spécialité qu’elle veut mettre au service des gourmets ivoiriens. Pour en savoir davantage sur KOFEMI GRUB N’GO, le food truck, nous l’avons rencontrée pour le plaisir de nos internautes.

Etes-vous chef cuisinier professionnel, ou le faites-vous par passion?

La passion avant tout, puis j’en ai fait un métier.

Un métier qui, bien sûr, est en vogue actuellement. Alors comment l’appréhendez-vous?

Un métier qui est en vogue… Je peux dire oui puisqu’il y a aujourd’hui certains acteurs de ce secteur qui n’ont pas fait des études et se font appeler chef parce qu’ils savent cuisiner. La cuisine, pour moi, doit être, en dépit de tout ce que l’on voit, bien plus que cela. Ça doit être une passion. Après on la développe comme on l’entend en fonction de nos ambitions et projets. Et c’est challenging comme on le dit.

Quels types de cuisine faites-vous puisque vous êtes installée aux USA?

Je suis allée en Italie dans une école culinaire française. Mais mon concept au niveau des USA, c’est de promouvoir la nourriture ivoirienne. C’est donc vous signifier que dans mon food truck, tout ce qui se passe est typiquement ivoirien. Ce qu’il y a de très intéressant dans l’histoire de ce food truck aux USA, c’est le fait que j’ai pu ramener l’enfance des gens. Parlant donc des mets proposés. C’est typiquement ivoirien. À cet ensemble, j’ajoute les autres bonnes chères aussi bien de l’Afrique que des autres continents. Je tiens à préciser que tout ceci dépend de la demande du client.

Quel est le plat préféré de vos clients, ce qu’ils demandent le plus?

Mes clients sont de divers ordres. Il y en a par exemple qui peuvent venir pour le garba, l’Attiéké Poisson Fumé, (l’APF). Mon objectif c’est d’essayer, au mieux de mes moyens, de maintenir la culture ivoirienne. Le résultat est bien meilleur parce que ceux qui sont ivoiriens viennent pour ce genre de plat. Pour certains ressortissants africains, ceux-là me demandent du tchep, vu que je suis moitié sénégalaise. C’est bien à mon avantage et j’en profite vraiment. Et il y a une autre tranche de personnes qui me demande des choses plus modernes comme américaines. Tout dépend de la demande du client.

Avez-vous déjà essayé de moderniser ces différents plats de rue que vous avez transportés dans votre cuisine?

J’ai voulu, dans un premier temps, que ce soit typiquement comme c’est. Et changer certaines choses après un an d’activité. Je vais rajouter des choses à mon menu parce que certains trouvent que je fais un peu trop la part belle à la clientèle ivoirienne. Alors mon but n’est pas de me focaliser sur une seule culture. Je veux bien plus que promouvoir ma culture. Je veux aussi la partager avec d’autres nationalités.

Dites-nous, avez-vous déjà participé à des concours culinaires?

Concours culinaires… Non. Je n’en ai pas encore fait. En revanche, j’ai eu plusieurs Awards, des reconnaissances de certaines compagnies et bien d’autres. Il faut en fait comprendre que cela fait seulement un an que j’ai commencé cette activité dans ce domaine, mais j’ai fait du service traiteur depuis dix (10) ans. C’est dire que les Awards et autres sont des distinctions liées à un domaine un peu plus différent de ce que je fais présentement. J’espère toutefois bien en avoir avec le nouveau concept.

Qu’avez-vous ressenti en recevant ces Awards?

C’est une évidence de savoir que l’on est toujours content ayant à l’idée la reconnaissance de ton travail et tes efforts. C’est vraiment un plaisir d’apprendre que ton travail n’est pas vain… Un jour je me suis vue dans un magazine et je me suis exclamée: ‘’wahou’’. Une autre fois encore, des passants m’ont interpellée, me faisant savoir qu’ils m’ont vue sur les réseaux sociaux… J’avoue que ça fait toujours plaisir. C’est une récompense qui fait chaud au coeur et c’est constamment bien d’en avoir.

Les femmes sont celles qui sont le plus dans la cuisine. Mais quand on parle de chef cuisinier, c’est toujours des hommes. Je voudrais bien comprendre!

Ce que vous dites est on ne peut plus réel. Moi, en effet, quand j’ai travaillé en cuisine, effectivement tous mes patrons étaient des hommes et les femmes sous-chefs. Mais Je ne sais pas si c’est une question d’infériorité ou de supériorité. Même s’il existe des grands chefs femmes, c’est moins reconnu que les hommes. Je pense au contraire que c’est la société. On ne peut pas discuter. Mais ils reconnaissent quand même. Peut-être qu’ils se disent à la base que la femme sait déjà tout faire, donc pas besoin de la récompenser encore. Et c’est comme ça.

Vous passez toutes vos journées à cuisiner. Quand vous arrivez à la maison, le soir où lors de vos journées de congé, est-ce vous qui préparez le repas?

En toutes choses, il existe des avantages. Et l’avantage de travailler en cuisine, c’est qu’on a la possibilité de faire des emportées à la maison quand il y a des restes. Mais c’est difficile, vu que c’est épuisant. J’ai quatre enfants et lorsque j’arrive à la maison, il est hors de question pour moi de me permettre de dire que je ne fais pas la cuisine.

Eux aussi attendent que maman rentre et fasse sa cuisine. Donc j’essaie, tant bien que mal, de faire des choses par anticipation en semaine. Dans ces conditions, ils ont leur nourriture. Et comme ils sont habitués, pour eux: ‘’maman est chef, on ne doit pas manger deux fois la même chose’’. Du coup je me retrouve avec des excédents de nourriture. Alors, après de longues journées, il est parfois difficile de faire la cuisine. Mais ils sont compréhensifs et on mange juste les restes du restaurant.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier?

Pour moi, C’est juste de lire la joie sur les visages des gens quand ils dégustent les plats. Quand ils mangent, ils sont contents et s’écrient ‘’wahou! C’est bon’’. Leur sourire, me réconforte et c’est tout ce que je demande. Savoir que tu vas faire la cuisine et les gens vont apprécier. C’est à la fois une crainte et en même temps la joie, parce que tu ne sais jamais à l’avance qui de tes clients va apprécier ou non ta cuisine. Ce qui est encourageant, c’est qu’elles sont nombreuses ces personnes qui savourent bien les plats. Il t’arrive parfois de recevoir des gens qui te disent qu’il y a soit trop de sel soit trop de poivre… Mais au final, c’est cette joie qui m’étreint qui est ma récompense. Et je prends ça over money. C’est vrai que c’est l’argent qui compte, mais après, moi c’est mon client qui est satisfait… C’est parfait pour moi.

Je ne sais pas si vous avez déjà vécu le cas, mais si vous vous retrouvez en face d’un client insatisfait comment faites-vous pour qu’il puisse revenir dans votre Food truck?

Bien sûr que je vis le cas. Il n’y a aucun doute que j’en ai vécu. J’ai eu des clients qui n’étaient pas du tout contents avec leurs nourritures. Il est important de savoir que le client est roi chez moi. S’il est mécontent, c’est mon devoir de faire en sorte qu’il soit satisfait et non le contraire. Pour la petite histoire, j’ai payé un jour pour une négligence. Je devais satisfaire la commande d’une cliente qui voulait du poisson. La confiance aidant, j’ai fait confiance au poissonnier sans vérifier le poisson qui m’a été livré.

Malheureusement, il n’avait pas nettoyé l’intérieur de la tête et par mégarde, j’ai servi. La cliente, toute fâchée, m’a fait appel en se plaignant. Et le comble, c’est que c’était une grande quantité de poissons.

J’ai pensé que ce serait comme d’habitude, c’est-à-dire, toujours acheté et bien nettoyé. Et de peur de perdre la cliente, il faut se racheter en lui offrant gratuitement quelque chose. Toi tu perds sur le coup, mais tu as fait ce que tu avais à faire pour que le client revienne. Et ce n’est pas seulement revenir, mais le client doit être heureux.

Vos projets

Ce voyage au pays était lié à des funérailles. Mais j’ai eu le privilège de travailler pour un traiteur dans un hôtel de la place. Je n’avais aucune intention de revenir à Abidjan, et là, ils m’ont donné l’envie, une curiosité de revenir découvrir la Côte d’Ivoire et aussi au niveau des Etats-Unis, d’avoir un autre Food truck. Celui que j’ai, c’était un début. Il urge d’essayer d’améliorer en agrandissant dans l’espoir qu’on aura une chaine un jour.

Un mot à l’endroit des femmes africaines et ivoiriennes en particulier

A toutes mes soeurs qui veulent se lancer dans l’entrepreneuriat, ça fait peur, c’est sûr, Mais pour toute réussite, il faut oser franchir le pas. Ma devise, c’est ‘’je préfère faire que d’être désolée’’. C’est à dire il faut risquer tout en croyant en toi, en Dieu et puis le reste viendra après.