Anciennement, la finance, connue sous le nom d’usure, était catégoriquement interdite par les anciens et les religions, car la dette fut l’outil de la domination des peuples et des personnes. Mais au cours de l’histoire, la finance va faire sauter tous les interdits jusqu’à prendre le pouvoir sur l’économie réelle.
Au temps du troc, les usuriers faisaient des avances de denrées alimentaires, et demandaient en retour des quantités supérieures. Et si le contrat n’était pas respecté, c’était soit la guerre, soit l’esclavage.
Puis avec la révolution de la monnaie, l’usure a pris une dimension nouvelle, critiquée notamment par Aristote : il est immoral que de l’argent puisse faire de l’argent sans aucun effort.
Jusqu’alors, les usuriers faisaient accroître leur richesse grâce à des denrées ou de la monnaie qu’ils possédaient physiquement. Mais la dématérialisation de la monnaie va changer la donne.
A partir du Moyen-âge, l’activité bancaire va connaître une révolution grâce à la dématérialisation de la monnaie : pour éviter les vols, les commerçants déposent leur monnaie en or chez des orfèvres, en échange de notes de dépôts. C’est la naissance du billet-monnaie en Europe.
La création de la monnaie-billet a permis aux banquiers de se retrouver avec des dépôts d’or dont la quantité était assez stable dans le temps. Trop tentant pour les usuriers : ils ne peuvent éviter de faire “travailler” cette manne qui ne leur appartient même pas, mais qui « dort » dans leurs coffres !
Donc pour la première fois, non seulement les usuriers prêtent en demandant des surplus, mais en plus ils prêtent ce qui ne leur appartient pas, l’or des déposants !
L’ingéniosité des financiers prend alors une dimension nouvelle !
A partir du XVIIe siècle, avec l’essor de la monnaie-billet, les banquiers vont redoubler d’ingéniosité : au lieu de prêter l’or des déposants, ils vont imprimer des billets qui ne font face à aucun dépôt en or, et les prêter contre intérêts !
D’une certaine manière, depuis l’invention de la monnaie-billet, la richesse des banquiers est non seulement construite sur l’usure, mais elle est aussi construite sur une fraude, la création de fausse monnaie !
L’ingéniosité des banquiers va encore monter d’un cran au XXe siècle avec l’invention de la monnaie fiduciaire, qui ne repose sur aucun dépôt en or, mais sur la confiance.
À partir de là, les banquiers créent de l’argent à partir de rien, au moment de l’octroi d’un crédit !
Ainsi la boucle est bouclée : la monnaie devient par construction la coquille du crédit qui rapporte de juteux intérêts aux banquiers. Pour s’en rendre compte, si toutes les dettes étaient remboursées simultanément par un coup de baguette magique, la quasi totalité de la monnaie disparaîtrait !
La confiance portée sur la monnaie fiduciaire est acquise avec la complicité des institutions politiques. La création monétaire frauduleuse d’autrefois des banquiers est maintenant institutionnalisée !
Maurice Allais, économiste et Prix Nobel, écrit dans un livre paru en 1999 (La Crise mondiale d’aujourd’hui. Pour de profondes réformes des institutions financières et monétaires) : « Dans son essence, la création monétaire ex nihilo actuelle par le système bancaire est identique, je n’hésite pas à le dire pour bien faire comprendre ce qui est réellement en cause, à la création de monnaie par des faux-monnayeurs, si justement condamnée par la loi. Concrètement elle aboutit aux mêmes résultats. La seule différence est que ceux qui en profitent sont différents ».
Ainsi, au cours de l’histoire, l’ingéniosité des usuriers d’autrefois, devenus les banquiers d’aujourd’hui, a été de plus en plus sophistiquée. Ce qui était interdit par les anciens et les religions, est devenu institutionnalisé aujourd’hui.
Cette activité bancaire fondée sur le prêt à intérêts est le fondement même du capitalisme financier, qui exploite les travailleurs, qui exacerbe les inégalités sociales, et qui détruit notre planète. En effet, la finance est la science du crédit, qui donne aux individus le pouvoir de consommer aujourd’hui ce qu’ils auraient dû consommer dans le futur. Les crédits octroyés aux consommateurs impatients, forment la dette écologique des générations futures !
De nos jours, aucun économiste moderne ne remet en cause le fondement de la finance, c’est à dire le crédit à intérêts. Pire, aucun dirigeant politique ne semble avoir compris que ce que nos anciens nous ont interdit, est la source de nos malheurs d’aujourd’hui.
L’ingéniosité des banquiers leur a non seulement permis de prendre en otage l’économie réelle, mais aussi nos institutions politiques, et par ricochet nos démocraties : la puissance financière s’est muée en puissance totale !
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