Ecofin Hebdo) – Dans un rapport de politique générale intitulé « Jobs ! Electricity Shortages and Unemployment in Africa » la Banque mondiale a établi les corrélations existant entre une fourniture inadéquate de l’énergie et l’emploi et la santé entrepreneuriale du continent. Se basant sur les données croisées sur l’emploi, les infrastructures énergétiques et les défis rencontrés dans les entreprises, le chercheur Justice Tei Mensah a démontré comment le déficit énergétique affecte l’emploi et l’industrie dans 21 pays.
Une chance sur trois de ne pas être recruté en l’absence d’électricité
Les populations vivant dans les régions ne jouissant pas d’une bonne fourniture électrique voient leurs chances de se faire recruter dans une entreprise diminuer de 32%. Une proportion qui peut monter à 41% dans certains cas. En outre, ces barrières à l’embauche augmentent proportionnellement avec le niveau de qualification du candidat à l’emploi. De plus, le taux d’inemployabilité varie selon que le secteur visé consomme ou non de l’énergie. Si les candidats à l’emploi dans le secteur primaire regroupant principalement l’agro-industrie sont moins affectés par la disponibilité ou non de l’énergie, seul un candidat sur deux dans les autres secteurs a accès à un emploi dans les zones non électrifiées ou mal desservies.
Les populations vivant dans les régions ne jouissant pas d’une bonne fourniture électrique voient leurs chances de se faire recruter dans une entreprise diminuer de 32%. Une proportion qui peut monter à 41% dans certains cas.
Des données qui s’expliquent par la réticence des entreprises non agricoles à s’implanter dans de telles zones. En outre, le facteur de la distance entre le lieu de travail et le lieu de résidence est non négligeable lorsque vient, pour les entreprises, le moment de choisir entre plusieurs candidats.
Un impact considérable sur l’auto-emploi
Les problèmes énergétiques influent également négativement sur l’auto-entrepreneuriat. En effet, selon Mensah, une mauvaise desserte en électricité diminue la propension à l’auto-emploi de plus d’un tiers dans les pays analysés. Une proportion qui peut s’élever jusqu’à 47%, surtout quand le secteur convoité n’est pas agricole et nécessite un apport relativement important et continu en électricité. Un fait qui se comprend plus aisément lorsque l’on prend en considération les effets néfastes du manque d’énergie sur les entreprises déjà existantes.
Selon Mensah, une mauvaise desserte en électricité diminue la propension à l’auto-emploi de plus d’un tiers dans les pays analysés. Une proportion qui peut s’élever jusqu’à 47%, surtout quand le secteur convoité n’est pas agricole.
En effet, il a été constaté que la fréquence et la durée des délestages diminuent la valeur ajoutée des entreprises. Pour illustration, lorsque les entreprises subissent une heure de délestage sur 100 heures de fourniture électrique, elles voient leur valeur ajoutée diminuer de 3,3%. Une perte qui peut s’accroître lorsque la durée des délestages augmente. Les entreprises victimes de ces délestages essayent, dans la plupart du temps, de les contourner en se procurant des moyens de production autonome d’énergie. Une option qui bien sûr augmente le coût de la production et, par ricochet, diminue la compétitivité par rapport aux entreprises des régions disposant d’une fourniture électrique plus fiable. En outre, certaines ont recours à une externalisation de certaines parties de la production, ce qui peut conduire à une réduction des effectifs. Il a donc été constaté qu’une augmentation de 1% de la fréquence des délestages peut induire entre 0,6% et 1,1% de réduction de l’effectif d’une entreprise. Des pertes qui frappent plus durement les employés les plus qualifiés, ainsi que certains types d’emplois à temps complet, les entreprises préférant dans certains cas avoir recours à une main-d’œuvre temporaire.
Il a donc été constaté qu’une augmentation de 1% de la fréquence des délestages peut induire entre 0,6% et 1,1% de réduction de l’effectif d’une entreprise.
Vers un nouveau paradigme dans les politiques d’électrification
Il faut noter des différences entre la fourniture d’énergie dans le but d’améliorer les conditions de vies des populations, et celle, nécessaire à améliorer l’emploi et l’activité économique. Le rapport Africa Pulse propose, à cet effet un changement de paradigme. Ainsi, bien qu’utiles pour les petits ménages et les petits commerces, les systèmes solaires domestiques ne pourront pas s’inviter dans le milieu entrepreneurial, à cause de leurs limites en matière de puissance. En outre, l’extension des réseaux électriques vers les zones non desservies en électricité se révèle la plupart du temps peu efficace. En effet, elle nécessite des investissements importants qui sont par la suite répercutés sur les utilisateurs finaux, au demeurant incapables de s’acquitter de cette charge trop importante pour eux.
Dans les zones reculées, l’extension du réseau national est trop coûteux.
L’auteur du document préconise donc que l’extension des réseaux nationaux se fasse en priorité dans les zones rurales et les régions déjà proches des installations électriques nationales. Pour les régions plus éloignées, il est préconisé la mise en place de mini-réseaux électriques. Ces installations présentent en effet l’avantage d’être plus proches de leurs bénéficiaires et par conséquent moins coûteuses pour le consommateur final. En outre, leur modeste capacité rend leur mise en place plus rapide, car moins onéreuse.
Pour les régions plus éloignées, il est préconisé la mise en place de mini-réseaux électriques. Ces installations présentent en effet l’avantage d’être plus proches de leurs bénéficiaires et par conséquent moins coûteuses pour le consommateur final.
Cependant, il faudra que certains efforts soient consentis afin de rendre cette solution viable. La mise en place d’un cadre juridique clair est l’un des principaux efforts. Elle permettra de créer un environnement de confiance qui permettra d’attirer les investisseurs privés, car ces derniers pourront réduire considérablement les incertitudes et les variantes dans la mise en place de leurs projets.
La solution réside dans les mini-réseaux électriques.
Il faudra également veiller à ce que le prix de cession de l’énergie produite ne soit pas trop élevé et donc hors de portée de la clientèle visée, tout en étant suffisant pour permettre au développeur de rentabiliser son investissement. Il paraît donc impératif que les autorités envisagent de subventionner de telles infrastructures.
L’ensemble de ces options n’exempte cependant pas les Etats du processus d’amélioration de la gouvernance de leur secteur électrique qui reste, jusqu’ici, l’un des principaux goulots d’étranglement du développement énergétique de la région.
Gwladys Johnson Akinocho