Le problème du mal préoccupe l’humanité depuis des temps immémoriaux. Cet article donne la perspective islamique à ce sujet de manière simple et logique. Partie 3: Quelques leçons de l’histoire de Moïse et de Khidr.
En plus de mettre en contraste notre sagesse limitée avec celle de Dieu, cette histoire fournit également des leçons clés et des perspectives spirituelles. La première leçon est que pour comprendre la volonté de Dieu, il faut être humble. Moïse s’approcha de Khidr et sut qu’il avait une connaissance inspirée par Divinité que Dieu n’avait pas donnée à Moïse. Moïse a humblement demandé d’apprendre de lui, mais Khidr a répondu en mettant en doute sa capacité à être patient; néanmoins, Moïse a insisté et voulait apprendre. (Le statut spirituel de Moïse est très élevé selon la tradition islamique. Il était un prophète et un messager, mais il a approché l’homme avec humilité.) La deuxième leçon est que la patience est nécessaire pour faire face émotionnellement et psychologiquement à le monde. Khidr savait que Moïse ne pourrait pas être patient avec lui, comme il allait faire des choses que Moïse pensait être mauvaises. Moïse a essayé d’être patient, mais a toujours mis en doute les actes de l’homme et a exprimé sa colère face au mal perçu. Cependant, à la fin de l’histoire, Khidr a expliqué la sagesse divine derrière ses actions après avoir déclaré que Moïse n’était pas capable d’être patient. Ce que nous apprenons de cette histoire, c’est que pour pouvoir faire face au mal et à la souffrance dans le monde, y compris notre incapacité à le comprendre, nous devons être humbles et patients.
Commentant les versets ci-dessus, l’érudit classique Ibn Kathir a expliqué que Khidr était celui à qui Dieu avait donné la connaissance de la réalité derrière le mal et la souffrance perçus, et il ne l’avait pas donnée à Moïse. En référence à la déclaration « Vous ne pourrez pas supporter patiemment avec moi », Ibn Kathir écrit que cela signifie: « Vous ne pourrez pas m’accompagner lorsque vous me verrez faire des choses qui vont à l’encontre de votre loi, car j’ai sachez que Dieu ne vous a pas appris et que vous avez la connaissance de Dieu qu’il ne m’a pas appris. » [1]
En substance, la sagesse de Dieu est sans limite et complète, alors que nous avons une sagesse et une connaissance limitées. Une autre façon de le dire est que Dieu possède la totalité de la sagesse et de la connaissance; nous avons juste ses particularités. Nous voyons les choses du point de vue de notre point de vue fragmentaire. Tomber dans le piège de l’égocentrisme, c’est comme croire que l’on connaît tout le casse-tête après en avoir vu un seul morceau. D’où Ibn Kathir explique que le verset « Comment pouvez-vous être patient dans les affaires au-delà de vos connaissances? » signifie qu’il existe une sagesse divine à laquelle nous ne pouvons accéder: « Car je sais que vous allez me dénoncer à juste titre, mais je connais la sagesse de Dieu et les intérêts cachés que je peux voir mais que vous ne pouvez pas. » [2]
L’opinion selon laquelle tout ce qui se passe est conforme à la sagesse divine est stimulante et positive. En effet, la sagesse de Dieu ne contredit pas d’autres aspects de sa nature, tels que sa perfection et sa bonté. Par conséquent, le mal et la souffrance font finalement partie d’un dessein divin. Parmi de nombreux autres chercheurs classiques, le 14 e savant siècle Ibn Taymiyya résume bien ce point: « Dieu ne crée pas mal pur Au contraire, dans tout ce qu’il crée est un but sage en vertu de ce qui est bon Cependant, il peut y avoir quelques – uns.. le mal y est pour certaines personnes, et c’est un mal partiel, relatif. Quant au mal total ou au mal absolu, le Seigneur en est exonéré. » [3]
Cela ne nie pas le concept de vérités morales objectives. Même si tout va dans le sens de la bonté ultime et que le mal est «partiel», il ne sape pas le concept de mal objectif. Le mal objectif n’est pas la même chose que le mal absolu, c’est plutôt un mal fondé sur un contexte particulier ou un ensemble de variables. Donc, quelque chose peut être objectivement mauvais en raison de certaines variables ou de certains contextes, et en même temps, il peut être inclus dans un but Divin ultime, bon et sage.
Cela évoque des réponses psychologiques positives de la part des croyants, car tout le mal et toutes les souffrances qui se produisent ont un but divin. Ibn Taymiyya résume également ce point: « Si Dieu – exalté, est créateur de tout, il crée le bien et le mal à cause du dessein sage qu’il a en ce sens que son action est bonne et parfaite ». [4]
Henri Laoust dans son Essai sur les doctrines sociales et politiques de Taki-d-Din Ahmad b. Taimiya explique également cette position: « Dieu est essentiellement une providence. Le mal est sans existence réelle dans le monde. Tout ce que Dieu a voulu ne peut que se conformer à une justice souveraine et à une bonté infinie, à condition toutefois que de vue de la totalité et non de celle de la connaissance fragmentaire et imparfaite que ses créatures ont de la réalité… » [5]