Hambak est parti sans partir. Autant, on se souvient encore et toujours d’Houphouët Boigny pour son attachement viscéral au dialogue, et à la paix, autant les ivoiriens se souviendront de Hamed Bakayoko, comme un homme généreux, et un politicien chevronné attaché au compromis dynamique entre les acteurs politiques. Il a su se tailler une envergure nationale et internationale.
En outre, Hambak a su se tisser une image respectable aussi bien des “grands que des petits”. De mémoire d’ivoiriens et d’Africains, il reste une personnalité unique, exceptionnelle tant sur le plan politique que sur le plan humain.
A la différence de beaucoup de “technocrates politiques”, Hamed a obtenu aussi bien la légitimité régionale que nationale. Sa légitimité et sa popularité ne sont nullement basées sur le sectarisme, ou le régionalisme ambiant. Il a été un politicien atypique sur les bords de la lagune Ebrié.
Mais comment il réussit cette promesse ?
Hamed avait un seul outil, un seul instrument : “ L’Amour du prochain”. Il avait fait sienne cette maxime des philosophes : « L’amour du prochain s’adresse aux humains sans exceptions : les proches, certes, mais aussi les lointains, et, plus difficiles encore, les personnes qui sont indifférentes à notre égard, voir hostiles… »
Ainsi selon le philosophe François Housset : « l’amour du prochain ne choisit pas qui aimer. J’aime toute l’humanité. Quand il fait du bien à un homme particulier, c’est au nom de son amour pour tous les hommes ».
Tel était Hamed. Ce n’est donc par hasard que tout ce monde aussi divers que nombreux, pleure la disparition de l’homme.
Hamed, tout le long de sa vie ; a tenté de répondre positivement aux questions fondamentales suivantes :
(1) Que faire de bien et durable pour ma famille ?
(2) Que faire de bien et durable pour ma région ?
(3) Que faire de bien et durable pour ma communauté ?
(4) Que faire de bien et durable pour mon pays ?
(5) Que faire de bien et durable pour ceux qui me sollicitent ou que je vois dans la détresse ?
Cinq questions simples auxquelles chaque politicien, ou chaque détenteur d’un certain pouvoir devrait répondre, chaque jour, chaque heure.
Évidemment, pour répondre positivement à ces cinq questions fondamentales, il faut adopter les attitudes suivantes que Hamed a observées tout le long de sa courte vie terrestre :
- Le travail, toujours le travail et encore le travail ;
- La reconnaissance des bienfaits quel qu’ils soient ;
- La proximité aussi bien avec les gens de toutes les couches sociales ;
- L’anticipation et la vision humanitaire en personne ;
- La générosité personnelle et non celle de l’État.
Bien entendu, Hamed pouvait utiliser ses relations et fonction parfois. Mais, il mettait à contribution d’abord et avant toutes ses ressources personnelles construites à la sueur de son front.
Contrairement à une idée répandue sur Hamed et bien de gens généreux, la générosité n’est pas liée à la fortune. Ainsi, selon Andrade et Erico, la notion de générosité dirige la réflexion cartésienne.
Donc l’objectif est la défense de l’altruisme et en tant qu’axe fondamental de l’action morale. Aussi “la générosité apparait finalement comme le fil qui relie les diverses passions humaines dans un seul projet…”
Bien d’ivoiriens sont plus riches qu’Hamed Bakayoko. Mais, combien parmi eux tentent de répondre positivement avec cinq questions fondamentales qu’Hamed s’est quotidiennement posé depuis sa tendre enfance jusqu’au sommet de l’État ? Combien parmi eux utilisent leurs fortunes personnelles pour ce faire ? Combien utilisent leurs relations ou leurs positions pour venir en aide à leur région, communauté, ou paye ?
Très peu. Très peu. Trop peu. Hélas !
Avec la disparition d’Hamed, il faut espérer que la mort et la vie leur apportent une inspiration opérationnelle et pratique, vis à vis de leurs prochains, de leurs régions, de leurs communautés et des citoyens de leur pays.
La mort est inévitable. Mais on peut s’inscrire dans l’Éternité à travers l’Amour du prochain.
Par Fatim DJAMILA