Son témoignage édifiant brosse un portrait peu flatteur, pour ne pas dire accablant, de Henda Ayari, la première femme à avoir accusé Tariq Ramadan de l’avoir violée… un certain jour de 2012, mais elle ne sait plus quand précisément, et quelque part dans Paris, mais elle ne sait plus où exactement…
Cet homme marié, fonctionnaire assermenté de son état, qui n’est pas musulman et assure ne pas connaître personnellement l’islamologue suisse, a été entendu par les enquêteurs de la brigade criminelle à Paris, le 9 juillet dernier, pendant 1h30. En novembre 2017, alors que l’affaire Ramadan éclatait au grand jour dans le sillage glauque du scandale Weinstein, ce dernier avait attesté par écrit avoir croisé la route de Henda Ayari, en mars 2013.
Un bien redoutable privilège si l’on en juge par le harcèlement à caractère sexuel qu’il affirme avoir subi de sa part pendant plusieurs jours oppressants, jusqu’à être insulté et, plus grave encore, menacé d’une plainte pour viol pour avoir repoussé les avances pressantes de cette dernière.
Telle la chronique d’une dangereuse rencontre, ses propos, rapportés par Le Point, décrivent les circonstances dans lesquelles il s’est retrouvé face à Henda Ayari, alors qu’il épaulait sa femme dans sa gestion d’un cabinet de conseil juridique à Rouen, et dont il a gardé un souvenir des plus cuisants…
En quête d’informations liées à sa situation professionnelle, la première plaignante de Tariq Ramadan lui a été présentée par l’intermédiaire d’un des clients du cabinet dirigé par son épouse. « Je l’ai rencontrée pour la première fois dans un café qui est en face du palais de justice de Rouen », a-t-il précisé, avant de raconter la teneur d’une conversation qui a rapidement dévié sur d’autres considérations plus personnelles, à sa grande stupeur. Selon son récit des faits, Henda Ayari lui aurait lancé à brûle-pourpoint : « vous devez être sexy dans une robe d’avocat ».
Décontenancé par cette remarque déplacée, il déclare s’être aussitôt « levé pour partir ». Mais c’était sans compter la réaction de son interlocutrice qui, après lui avoir vainement demandé son numéro de téléphone, s’est « mise à pleurer ». « Elle m’a dit qu’elle avait des pensées suicidaires et qu’elle voulait vraiment mon numéro pour avoir de nouveaux conseils en cas de besoin. Elle tremblait, elle était en larmes. Je lui ai donc laissé mon numéro », a-t-il relaté.
Croulant sous les messages de Henda Ayari, ce fonctionnaire a fini par consentir à la revoir deux jours plus tard, toujours à Rouen, mais cette fois-ci dans un établissement de restauration rapide.
Et de poursuivre devant la brigade criminelle de Paris : « À votre demande, je vous informe que le type de questions qu’elle m’a posé concernait la relation homme-femme dans l’islam, la place de la femme. J’ai répondu à ses questions en pensant pouvoir me débarrasser d’elle. (…) Elle m’a demandé ce que je pensais de la fornication. Elle a ensuite dévié en me demandant si j’avais quelqu’un dans ma vie. Je lui ai dit que j’étais marié avec des enfants. Quand elle a posé des questions plus précises, je lui ai dit que cela ne la regardait pas. J’ai vu un changement de comportement dans son regard, comme si elle attendait plus de ce rendez-vous. Elle s’est mise en colère quand j’ai voulu mettre fin au rendez-vous. (…) Elle m’a dit que tous les hommes étaient des enculés, qu’on ne voulait que du sexe mais qu’on n’assumait pas. »
Poursuivi par Henda Ayari jusqu’à sa moto, celle-ci se serait exclamée sur un ton menaçant : « Je sais où tu bosses ». « J’ai pris ça comme une menace. Je me suis dit qu’elle n’était pas bien. Devant elle, j’ai appelé le gars qui me l’avait présentée en lui disant qu’elle n’était pas bien. Il m’a répondu qu’elle était cinglée et de faire attention, car son truc était de prendre des mecs mariés. Je l’ai remercié ironiquement de m’avoir présenté cette femme. »
Mais il n’était pas encore au bout de ses surprises, car le harcèlement sexuel dont il prétend avoir été victime est allé crescendo durant cinq à six jours. « Elle m’a envoyé des messages à caractère sexuel ainsi que des photos de parties de corps. Ces photos ne montraient pas son visage, mais je suppose qu’il s’agissait de son corps. J’ai répondu uniquement pour lui dire d’arrêter avec ce type de messages. Elle m’écrivait clairement qu’elle avait envie de moi. »
Un matin, après l’avoir espionné dans la rue, Henda Ayari aurait déboulé dans le cabinet de conseil juridique de son épouse, lui demandant de « fermer la porte du bureau pour qu’on profite du canapé ». « J’ai refusé en lui répétant de partir et en lui disant qu’il ne se passerait jamais rien entre nous », a-t-il indiqué, avant d’ajouter : « Elle s’est mise devant moi et a essayé de m’embrasser. Je l’en ai empêchée avec ma main et lui ai réitéré la demande de départ. (…) J’ai vu son visage devenir dur, elle se mettait en colère. Elle m’a dit : soit on le fait et je deviens ta maîtresse, soit je dépose plainte contre toi pour viol. Elle m’a dit que tout le monde la croirait, car elle est une femme et qu’il n’y avait pas de témoin. (…) Elle m’a menacé de déposer plainte immédiatement en sortant de mon bureau. »
A ces mots, il aurait alors brandi sa carte professionnelle, en espérant l’impressionner. Bien lui en a pris puisque, selon ses dires, Henda Ayari aurait effectivement « eu peur ». « Quand elle a vu la carte, elle a eu peur. Là elle a quitté le bureau. Je l’ai suivie pour voir si elle allait porter plainte. Sur le trottoir devant le bureau elle m’a insulté et m’a dit que je l’avais infiltré et que je l’espionnais pour le compte de l’État qui voulait sa peau. J’ai été très ferme avec elle. Je lui ai même proposé de l’accompagner pour qu’elle dépose plainte. Elle m’a dit que je travaillais pour eux, c’est-à-dire pour l’État et m’a menacé en me disant que j’aurai de ses nouvelles et qu’elle connaissait beaucoup de monde. Suite à cela je n’ai jamais eu de nouvelles et je ne l’ai jamais recroisée. »
Décrite récemment comme une « mythomane » par Me Marsigny, l’avocat de Tariq Ramadan, Henda Ayari apparaît sous un jour plutôt terrifiant dans le témoignage livré par ce fonctionnaire assermenté, dont l’identité n’a pas été divulguée, et qui a été versé au dossier d’instruction en cours. Un témoignage qui, pour l’heure, laisse ses avocats sans voix, Mes Jonas Haddad et Francis Szpiner n’ayant en effet pas souhaité répondre aux questions du magazine Le Point.
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