Embouteillages à Abidjan: ‘’Nous préparons une offensive …’’

 

Embouteillage, mauvais stationnement des ‘’Gbaka’’… / Fanny Djan (directeur de l’exploitation à l’Amuga)

Les premières nées des Autorités Organisatrice de la Mobilité Urbaine (AOMU) a vu jour dans le Grand Abidjan, zone géographique à forte densité d’habitants et de déplacement urbain couvrant 19 communes. L’Autorité de la Mobilité Urbaine dans le Grand Abidjan (AOMU). Puisque c’est d’elle qu’il s’agit, porte d’ambitieux projets selon son Directeur de l’exploitation, Fanny Djan, qui a accordé une interview à l’Expression.

 

    Qu’est-ce qui à justifier, selon vous, la création de L’Autorité de la Mobilité Urbaine dans le Grand Abidjan (AMUGA) en 2019 ?

En réalité, la création de l’AMUGA est l’aboutisse­ment de plusieurs réformes que le pays a connues. L’on peut citer le Programme d’investissement et d’A­justement des transports en Côte d’ivoire (CI-PAST) initié par le Banque mondiale en 1998. Ce projet prévoyait une vaste réforme qui a conduit à la privatisation du secteur de l’entretien routier et une réorganisation des transports publics. Cette réforme a per­mis de créer quatre struc­tures, deux sous la tutelle technique du ministère des infrastructures économiques d’alors et deux sous le min­istère des Transports. Il s’agit de l’AGEROUTE, le FER, la SONATT et l’AGÉTU. Pour ce qui est du ministère des Transport. Il y a eu une autre réforme en 2014 qui a dissous L’AGETU et la SONATT. Ensuite, avec la Loi d’orientation du trans­port intérieur (Loti) à voter et est désormais le cadre institutionnel et légal de référence. Puis le concept des Autorités Organisatrices de la Mobilité Urbaine (AOMU) a été intégré. Celles-ci répondent aux besoins de gestion ra­tionnelle des transports dans une zone géographique donnée. La première AOMU créée est celle du Grand Abidjan, c’est-à-dire l’AMUGA.

L’AMUGA est, certes, une je­une structure devenue opérationnelle au dernier trimestre 2020. Mais qu’est-ce qui a été déjà réalisé sur le terrain dans le cadre de l’améliora­tion des conditions de dé­placement des populations ?

‘’Nous préparons une application pour dénoncer les infractions’’ L’AMUGA a commencé ses activités de terrain dans le dernier trimestre de l’année 2020. Elle a effectué sa pre­mière tournée pour rencon­trer les structures et les ac­teurs institutionnels des transports, les faîtières de syndicats des transporteurs pour leur expliquer ses missions et les informer du démarrage de ses activités. En marge de ces rencontres, l’AMUGA a rapidement commencé à travailler sur une série de projets baptisés « projet Quick Wins ». Dans le cadre de ces projets, la Direction Générale, avec l’accord du Conseil Stratégique de l’AMUGA, avait pour objectif de rapi­dement mettre en œuvre des petits projets à impact rapide pour soulager les difficultés de déplacement des popu­lations en attendant la réal­isation des grands projets structurants de transport qui sont en préparation tels que le projet du Métro, les BRT (Bus Rapid Transi) qui sont des réseaux de bus à haut niveau de service opérés en site propre. Dans le cadre de ces projets à impact rapi­de, sans être exhaustif, l’on peut citer la tournée de sen­sibilisation et d’engagement avec les acteurs de terrain des 19 communes du Grand Abidjan qui s’est effectuée du 23 juin au 08 Juillet dernier et a permis d’initier le processus d’installation des groupes de travail sur lesquels l’AMUGA va s’ap­puyer pour la conduite des activités à réaliser dans cha­cune des communes ; la pré­paration d’une application de dénonciation citoyenne des infractions routières pour que lorsqu’un usager de la route est en présence d’un mauvais comportement, il le signale à l’AMUGA à tra­vers son application, photos et vidéos à l’appui. Les in­fractions ainsi dénoncées seront punies après avoir été caractérisées avec l’appui d’agents assermentés et des forces de défense et de sécu­rité ; la construction de pôles d’échanges pilotes dans les communes de Cocody et de Treichville. Avec ces deux communes, des sites poten­tiels ont déjà été identifiés et nous travaillons en ce moment sur la question du foncier et le bouclage fin­ancier des investissements à effectuer et la préparation de projets de construction d’encoches et de gares mod­ernes sur le boulevard François Mitterrand à Cocody le boulevard Alassane Ouattara à Yopougon. Ces encoches latérales qui seront faites le long de ces grandes artères serviront de stationnement au minibus communément appelés « Gbaka » ainsi qu’aux bus. Le but c’cst d’éviter que ces véhicules s’arrêtent de façon anarchique et encombrent la circulation sur des routes dont le seuil de saturation est déjà atteint. Les encoches vont les amener à stationner sur le bas-côté de la Toute pour leur opération de mon­tée et de descente de pas­sagers.

Les pôles d’échanges envisagés mettront-ils fin définitivement aux gares anarchiques ?

Oui, définitivement ! Les pôles d’échanges ont pour vocation de permettre une meilleure gestion de l’offre de transport en organisant et fournissant les statistiques sur les départs et arrivées dans chaque commune. Nous travaillons donc en collaboration avec les col­lectivités qui sont-elles- mêmes représentées au sein du Conseil stratégique et des Commissions consulta­tives Permanentes de l’A- MUGA. Vous avez d’ailleurs l’exemple de Koumassi où on ne peut plus charger les véhicules de transport en commun dans des gares an­archiques çà et là dans les rues. Notre objectif est que toute la ville d’Abidjan devienne ainsi ou mieux. Cette ambition est portée par l’AMUGA qui se donne les moyens d’y parvenir, en étroite collaboration avec routes les parties prenantes des transports urbains. Vous savez, la collaboration avec les collectivités est capitale, en raison de leurs missions et du fait que la question des transports est également celle du fonctionnement de la ville elle-même.

Vous étiez, récemment, en tournée à la rencontre des acteurs des transports du grand Abidjan. Quel en était l’objectif ?

Nous rappelons que cette tournée a débuté à partir du dernier trimestre de 2020 et visait d’abord à rencontrer les acteurs institutionnels, les entités de l’Etat, les col­lectivités et les faîtières d’as­sociation de transporteurs pour leur expliquer nos mis­sions établir un cadre de concertation. Et à partir de juin, nous avons entrepris d’aller encore dans chaque commune pour rencontrer les acteurs eux-mêmes pour leur expliquer nos missions, nos projets, la vision du Gouvernement. Ça a surtout comporté d’ex­cellentes séances de ques­tions-réponses. A priori nous pensons que le message est bien passé car nos échanges ont été directs et francs. Les acteurs du transport n’ont pas manqué de présenter les inquiétudes qu’ils avaient par rapport aux nouveaux modes comme le métro et les BRT. Nous les avons rassurés car la vision de l’E­tat est de construire un sys­tème de transport multimodal, intégré dans un esprit de complémentarité.

Parlant de synergie avec les collectivités, vous avez signé un mémorandum d’entente avec la mairie de Cocody pour mettre en place une brigade de mobilité. Si les projets structurants que vous avez énoncés sont réalisés, cette brigade sera-t-elle encore nécessaire ?

Oui elle le sera. Aujourd’hui sur l’ensemble des grands axes il y a des embouteil­lages. Le but c’est de pou­voir fluidifier les différents carrefours dans l’immédiat en attendant les projets struc­turants. Il est clair que le réseau structurant n’est pas le seul de la ville, la popu­lation habite à l’intérieur des quartiers. Si le réseau structurant devenait fluide, la brigade de mobilité aurait donc toujours sa raison d’être car les voies de quartiers vont toujours de­voir être fluidifiées. Aussi convient-il d’indiquer que la brigade de mobilité ne fera pas que de la régulation de trafic. Elle peut aider pour les accidents, pour la mise en œuvre des plans de circulation des projets de construction d’infrastructures de transport, etc.

Est-ce à dire qu’une fois ces projets réalisés, nous n’aurons plus besoin de Gbaka, Woro woro » ?

On en aura besoin mais peut-être pas sur les mêmes lignes ou les mêmes longueurs de trajets. D’abord ce ne sont pas toutes les lignes de trans­port en commun qui devi­ennent des BRT. On va en effet améliorer leurs condi­tions de fonctionnement. Les lignes de transport en commun en site propre sont par définition des lignes à haut débit de passagers, mais sont des lignes rigides. Les premiers et derniers kilo­mètres se font donc avec d’autres modes ou services de transports. C’est là que la complémentarité aura tout son sens dans le système que nous sommes en train de construire.

 

 

Réalisée par Isaac Krouman

L’Expression n°3372 du Lundi 02 Août 2021, Page 9