II. L’utilisation de l’appareil d’Etat par Henri KONAN BEDIE
Henry Konan BEDIE s’attela dès son avènement au pouvoir à démanteler l’appareil administratif installé par ADO. Aucun secteur n’était pas épargné. Ce qui était en somme tout à fait normal dans un système d’alternance démocratique. Mais cette politique était accompagnée par une nouvelle idéologie dite de l’ivoirité où on parle de plus en plus de l’ivoirien pur-sang tout en traitant parallèlement ADO de non national et de burkinabé. BEDIE en parlant d’Alassane dans son livre intitulé ‘’Les chemins de ma vie (1999)’’ écrit : « De toutes les façons, OUATTARA était burkinabé par son père, il en possédait la nationalité, il n’avait pas à se mêler de nos affaires de succession ».
Cet esprit sera même traduit dans une réforme constitutionnelle sur le cas de l’éligibilité à la présidence. Les conditions d’obtention du certificat de nationalité et de la carte d’identité étaient corsées aussi bien pour le citoyen Lambda que pour des hauts cadres et personnalités.
C’est ainsi que Djéni KOBINA et Alassane OUATTARA en ont été les victimes emblématiques. Et pourtant, du point de vue idéologie politique rien n’opposait ADO aux caciques du PDCI. Ils étaient tous de droite et fervents défenseurs du libéralisme économique. Ce qui les opposait c’est le fauteuil présidentiel, et puis peut-être la gouvernance de l’Etat. Un point un trait. Donc l’idéologie de l’ivoirité était utilisée simplement et uniquement pour démontrer qu’ADO n’avait pas le droit de prétendre à la Magistrature suprême ivoirienne.
Fait curieux : même les animateurs principaux de la gauche ivoirienne et autres « nationalistes » finissaient par emboucher la trompette de l’idéologie de l’ivoirité quand il s’agissait d’éliminer ADO dans la course au fauteuil présidentiel. Malheureusement pour eux, l’idéologie de l’ivoirité annoncée au sommet était descendue dans le peuple notamment et particulièrement chez les policiers et les gendarmes qui soupçonnaient tout nom à consonance nordique ou musulmane d’étranger. Poussant ainsi maladroitement de millions d’ivoiriens dans le combat pour recouvrir leur identité et dignité comme Alassane. Cette connexion circonstancielle donnait naissance à un parti centriste puissant et présent partout en Côte d’Ivoire, le RDR (Rassemblement Des Républicains).
III. L’utilisation de l’appareil des relations internationales
Les adversaires politiques d’Alassane notamment GBAGBO l’ont toujours traité d’animal politique de ville. Car Alassane a fait toute sa carrière professionnelle de technocrate dans les bureaux feutrés de Washington, Paris et Dakar. Loin de la brousse politique du pays profond. Cette position apparemment défavorable au départ par rapport aux politiciens locaux lui a été finalement d’un apport incommensurable lorsque les crises politiques internes ont débordé les frontières ivoiriennes.
Face au nationalisme, à l’ivoirité et au populisme des politiciens locaux, Alassane a proposé le vivre ensemble, l’intégration africaine et l’ouverture vers la métropole, les grandes puissances et les décideurs du monde.
IV. La diabolisation d’ADO
Au début et depuis 1993, l’Opposition (Gauche et Droite) a toujours traité ADO d’étranger. En plus tous ceux qui le supportaient, étaient traités tels, même quand ils sont du sud (voir Djéni KOBINA). Par ricochet les étrangers ouest africains et les français ont subi tour à tour la furie de l’opposition TSO (Tout Sauf OUATTARA).
Presque trente ans après, la même opposition utilise la même stratégie à savoir : la diabolisation d’un individu, et tout ce qui lui ressemble de près ou de loin. Hier, ADO était l’étranger non éligible. Après avoir été éligible deux fois, aujourd’hui il n’est éligible. Toujours une interprétation du droit pour rejeter ou éliminer un homme politique au vu et au su de ses millions de supporters.
Mais entre temps que s’est-il passé ? D’abord l’opposition de gauche a marché avec « l’Etranger ADO ». Ensuite l’opposition de Droite a pactisé avec « l’Etranger ADO ». Le peuple s’en souvient, du moins une grande partie du peuple sacrifiée qui, chemin faisant se pose des questions. D’autant plus que « l’Etranger » est venu travailler pendant dix ans dans presque chaque région sinon chaque champ du pays. Dans le pays profond chaque planteur cherche le meilleur ouvrier agricole quelques soient ses origines. On lui donne même de la terre pour continuer à cultiver. Dans le pays profond, on n’aime pas ceux qui ne travaillent pas même s’ils sont du terroir. En continuant à diaboliser ADO, l’opposition pourra mobiliser les citadins, les intellectuels et les travailleurs des champs de Facebook, Twitter, …., mais avec quels résultats ? Sinon la guéguerre et la guerre.
La première guerre de succession entre Henri KONAN BEDIE et Alassane Dramane OUATTARA s’est terminée par la victoire de Henri KONAN BEDIE qui arrive à la magistrature suprême le 7 décembre 1993. Mais, en décembre 1999 BEDIE est renversé par un Coup d’Etat qu’il impute immédiatement à Alassane. On passe de la méfiance à la haine viscérale.
Toutefois, par une curieuse ironie de l’histoire, les deux « ennemis » contraints à l’exil se retrouvent sur les bords de la Seine à Paris pour nouer un pacte politique qui a abouti à la création du RHDP. BEDIE en est le Président. Cependant de 1999 à 2010 les héritiers d’HOUPHOUET sont écartés du Pouvoir d’Etat. Entre temps, le Général GUEI et L’opposant historique à HOUPHOUET, Laurent GBAGBO se succèdent au Pouvoir. Pour les houphouetistes, il faut reprendre le Pouvoir.
Une alliance électorale leur permet de retrouver le Pouvoir d’Etat en 2011 après la plus grande crise post-électorale de l’histoire de la Côte d’Ivoire. GBAGBO est emprisonné à la Cour Pénale internationale. Cependant, dans la famille Houphouetiste, des fissures graves se font jour jusqu’à la sortie du PDCI du RHDP. Et c’est le début de la troisième guerre entre Alassane et BEDIE avec un élargissement du front à la gauche ivoirienne du Front Populaire Ivoirien toutes tendances confondues.
( A suivre…… )