L’avancée grandissante des terroristes inspire de plus en plus la peur chez les Ivoiriens !

Les présence du terrorisme dans le Sahara nommément au Burkina au Nigeria et au Mali ne cessent de faire des dégâts. La Côte d’Ivoire qui fait pourtant frontière avec le Mali semble ne pas être à l’abri des ravisseurs…

« LE DJIHADISME A-T-IL UN AVENIR EN CÔTE D’IVOIRE ? »
Il est vrai que notre pays a été frappé par un acte terroriste très vite maitrisé. Mais très vite aussi il a été démontré que cet acte était d’origine étrangère et justement revendiqué par AQMI et AL MOURABITOUN. Cela constitue un début de preuve que le djihadisme aurait du mal à s’implanter durablement en Côte d’Ivoire pour les raisons que nous allons développer un peu plus loin. En attendant, pourquoi certains observateurs pensent-ils cependant que la Côte d’Ivoire peut être un terrain fertile pour le djihadisme ? Quatre facteurs probables :
1- La proximité physique et sociologique avec le Mali : La Côte d’Ivoire partage non seulement une frontière internationale avec le Mali, mais les deux voisins partagent aussi la même langue internationale (le français) et au moins trois langues locales (le bambara, le peulh et le sénoufo).
2- La formation des prédicateurs musulmans ivoiriens au Mali et dans les pays du Maghreb et du Moyen Orient.
3- Les conséquences de la présence de la France au Mali dans la lutte contre le djihadisme peuvent entraîner chez ces derniers des velléités de vengeances en Côte d’Ivoire, ce pays ami de la France.
4- Les causes et les séquelles de la longue crise politique ivoirienne.
On le voit tout de suite, les trois facteurs principaux susceptibles de créer un terrain favorable au djihadisme international en Côte d’Ivoire reposent plus exactement sur des facteurs extérieurs. Donc à priori il n’y a aucun facteur interne susceptible de donner naissance à un djihadisme. En général le djihadisme en Afrique noir exploite les tensions raciales, ethniques, politiques, régionalistes, religieuses locales et anciennes. C’est le cas au Nigéria, au Mali et au Niger. Or en Côte d’Ivoire, il n’y a aujourd’hui ni de menaces raciales, ni régionalistes, ni ethniques et ni religieuses. Nous avons certes connu des tensions politiques, mais aujourd’hui ces tensions politiques ne peuvent pas être exploitées par le djihadisme. Car les idéologies djihadistes et celles des hommes politiques en Côte d’Ivoire sont diamétralement opposées. Tous les partis politiques ivoiriens sans exception prônent le pluralisme, la démocratie et surtout la laïcité. En plus la Côte d’Ivoire a une chance extraordinaire due au fait que ses religieux musulmans et chrétiens qui défendent à l’unisson la laïcité de l’État partout et en toutes circonstances.
À l’intérieur même de la communauté musulmane, on peut noter que la plus grande des organisations regroupant des imams ivoiriens, le COSIM (Conseil Supérieur des Imams) est d’obédience ‘’MALIKITE’’ très proche des écoles spirituelles marocaines caractérisées par un certain apolitisme et une large ouverture d’esprit.
La Côte d’Ivoire compte une composante wahhabite bien organisée et soutenue par l’Arabie Saoudite elle-même combattue farouchement par le djihadisme. [Le wahhâbisme est important mais reste confiné dans les villes et parmi les populations non sédentaires. Notre pays compte en son sein de nombreux intellectuels issus pour la plupart de l’AEEMCI. Ces élites intellectuelles occidentales et laïcs et les élites formés dans les Universités Islamiques Saoudiennes orientales sont très opposées aux idées djihadistes. La composante Wahhabite/salafiste de l’islam en Côte d’Ivoire reste un phénomène non populaire chez les musulmans ivoiriens compte tenu de certaines exigences notamment vestimentaires et comportementales]. D’ailleurs, le wahhabisme au début a eu du mal à s’implanter en Côte d’Ivoire compte tenu de ses idées novatrices importées de l’Arabie Saoudite par rapport à l’Islam traditionnel ivoirien.
On compte aussi une minorité chiite, plutôt urbaine encadrée essentiellement par les chiites libanais résidents en Côte d’Ivoire depuis longtemps. Certaines pratiques sont étrangères à la culture musulmane. Et là encore, on sait que le djihadisme est aux prises avec le chiisme au Moyen Orient.
Enfin, ici en Côte d’Ivoire, un facteur de stabilisation de l’Islam profond est le fait que la désignation des imams se fait de façon traditionnelle et familiale. Dans le pays profond musulman, on ne peut venir de nulle part et prêcher comme bon vous semble. Il y a un certain ordre et une hiérarchie à respecter.
Dans certains pays, les djihadistes passent par l’endoctrinement dans les écoles. En Côte d’Ivoire, certes il y a beaucoup d’écoles coraniques et de Madrasas. Mais toutes ces écoles aspirent à être reconnues par l’État qui, depuis des années, fait des efforts énormes dans ce sens. Les écoles coraniques et les Madrasas sont de plus en plus encadrées. Cette stratégie du gouvernement se poursuit avec l’agrément de toute la communauté musulmane.
Si à priori, les facteurs favorables à l’avènement du djihadisme Africain en Côte d’Ivoire, sont presque inexistants, peut-on dire la même chose quant aux facteurs qui favorisent le djihadisme français ? Tout d’abord quels sont les facteurs qui auraient favorisé le djihadisme en France et en Europe ? Selon toute vraisemblance, sept facteurs expliquent le djihadisme en France particulièrement sans toutefois l’excuser en aucune manière.
1. Le traitement de la question musulmane par les hommes politiques et l’État français. Alors que dans les pays anglo-saxons, notamment aux USA, et en Angleterre, le port du voile et les écoles communautaires est tolérées, en France les musulmans français sont invités à adhérer à un islam français sans dépendance vis-à-vis de leurs origines culturelles.
2. La facilité de mobilisation et de liberté de manœuvre entre les frontières européennes de jeunes désœuvrés et criminels d’abord a engendré en grande partie la constitution de groupuscules djihadistes dangereux.
3. La porosité des frontières françaises et belges, et le manque de coordination entre les polices de l’Union Européenne sont des facteurs aggravants. Les criminels se faufilent aussi aisément à travers les failles des polices Européennes.
4. L’incapacité ou la difficulté de certaines familles musulmanes notamment d’origine étrangère à s’intégrer dans la culture française est un vrai problème franco-français. Beaucoup de Français musulmans d’origines étrangère se considèrent comme marginalisés et abandonnés par l’État. En outre, l’absence de résultats tangibles des efforts des gouvernements successifs pour l’intégration véritable et définitive de leurs concitoyens musulmans est un sujet de préoccupation que les criminels peuvent exploiter.
5. L’effondrement de certains régimes dit totalitaires, et le soutien de certaines milices se réclamant de l’Islam au Moyen Orient et en Lybie a donné l’occasion aux criminels de créer des sanctuaires et des camps d’entraînement pour les djihadistes.
6. L’erreur des services de renseignements de croire que les terroristes viennent uniquement et seulement des mosquées ou des familles intégristes s’est avérée une erreur fatale. Car à l’analyse des antécédents de tous les terroristes, il se trouve qu’il s’agit en général de délinquants notoires récidivistes auteurs de braquages, d’attaques à main armée, de dealers de drogue et pis très peu pratiquants de l’Islam dont ils se réclament par ailleurs.
7. L’utilisation d’internet et des moyens électroniques de payement de services (hôtels, voitures de location, transfert de fonds) ont donné aux terroristes des moyens opérationnels d’une efficacité mortelle.
Par conséquent comme pour le djihadisme africain, le djihadisme français ne peut pas prospérer en Côte d’Ivoire car l’environnement économique et socio-culturel est totalement différent.
Mais alors pourquoi certains de nos compatriotes ivoiriens pensent que le djihadisme est possible dans notre pays ?
Trois raisons principales pourraient expliquer cette situation.
1. Le fait que d’une part à travers les médias internationaux, les mots terrorisme et Islam riment ensemble au quotidien avec leur lot d’attentats aussi nombreux que macabres, ne peut laisser personne sans une opinion sur l’Islam et les musulmans.
2. Les tentatives avérées de certains leaders d’opinions et d’une petite minorité de religieux d’expliquer la situation politique ivoirienne par la différence entre les religions et les régions des hommes politiques.
3. Les tueries d’hommes religieux musulmans, la destruction de lieux de cultes islamiques, l’assimilation volontaire ou involontaire de citoyens musulmans à des étrangers pendant la longue crise ivoirienne.
Les deux derniers facteurs ont été documentés par les organisations internationales de défense des droits humains. Et très vite les religieux chrétiens et musulmans ont travaillé ensemble pour ne laisser aucune place à des opportunités susceptibles d’exploiter cette situation, que des esprits malins et chagrins auraient pu exploiter effectivement. Ainsi, aussi bien au plan international qu’au plan national, la Côte d’Ivoire ne peut pas être un terreau fertile et durable pour le djihadisme. Bien entendu aucun pays n’est à l’abri de personnes isolées exploitant la religion pour des besoins de gloire personnelle.
Ainsi, autant le risque zéro du terrorisme n’existe nulle part, autant le risque zéro du djihadisme ne peut exister nulle part.
La traque des terroristes, ou des djihadistes est d’abord et avant tout l’affaire de l’État et de lui seul. Mais aucun État ne peut lutter efficacement contre le djihadisme s’il ne commence pas par s’attaquer à la petite et à la grande délinquance de façon durable et complète.
Autant au plan sécuritaire il ne doit avoir aucun compromis avec les terroristes, autant au plan politique il faut avoir de l’audace et l’esprit de créativité pour éviter la stigmatisation systématique, la marginalisation structurelle, et une interprétation politique et politicienne de simples habitudes culturelles d’une partie inévitable de ses propres populations. Comme pour le cancer, il faut donner au corps les moyens pour lutter contre les cellules cancérigènes. On ne peut pas lutter efficacement contre le djihadisme et le terrorisme sans les musulmans eux-mêmes et les populations.
En un mot comme en cent, autant l’État doit être constant et intraitable pour lutter d’abord contre toute les formes de délinquance et de terrorisme, autant il doit favoriser la modernisation intelligente des religions, le dialogue inter-religieux, et l’intégration harmonieuse de toutes les compétences de sa nation. Telle est la volonté aujourd’hui exprimée par les autorités ivoiriennes, et ce qui fonde notre conviction pour conclure, que le djihadisme n’a pas d’avenir certain en terre d’EBURNIE.

Par Abou Khal Fatim