L’égoïsme est souvent considéré comme un vilain défaut. Mais si penser à soi était au contraire la clé d’une entente harmonieuse au sein du couple ? Dans son dernier livre « L’égoïsme partagé », aux éditions Eyrolles, le Dr Sylvain Mimoun donne des conseils pour cultiver cet « egocentrisme » positif pour être bien à deux.
La vie à deux n’est pas toujours rose : l’art du compromis permanent et de faire plaisir à l’autre est souvent valorisé pour favoriser le bonheur conjugal. Et si, au lieu de faire don de soi on pensait un peu plus à ce qui nous fait du bien ? Souvent diabolisé, l’égoïsme, quand il est partagé à juste dose, nourrit l’entité couple. C’est en tout cas ce que soutient le Dr Sylvain Mimoun, gynécologue, andrologue et psychosomaticien, dans son nouveau livre co-écrit avec François Ducroux « L’égoïsme partagé » (éditions Eyrolles). Son ouvrage fournit des pistes pour se recentrer sur soi, apaiser les conflits et être plus heureux en amour.
Comment cultiver cet égoïsme partagé ? Cela demande de revoir quelques schémas de pensée et de suivre une nouvelle « gymnastique » d’esprit au quotidien et apaiser les conflits. Dans son livre, le Dr Sylvain Mimoun dresse des grands principes :
1.BANNIR LA LOI DU TOUT OU RIEN
Il suffit d’une attente non satisfaite ou d’un sujet conflictuel pour que le raisonnement simpliste du « tout ou rien » revienne comme un leitmotiv: « soit il s’excuse soit il part »; « si elle ne veut pas aller chez mes parents c’est qu’elle ne m’aime pas » ; « tu fais toujours ceci »… Les adverbes « toujours », « jamais » sont exploités jusqu’à l’usure dans ces reproches hyperboliques. Un réflexe toxique qui ferme toute discussion. « On pense souvent qu’il faut que tout soit parfait sinon c’est nul. Mais c’est faux », observe le Dr Sylvain Mimoun qui invite à reconsidérer le « nul » sous un angle positif, qui pousse le couple à « réussir à se parler ».
Comment faire ? Apaiser les turbulences et les divergences au sein du couple demande de trouver un équilibre entre deux univers distincts. Le Dr Sylvain Mimoun invite à explorer le territoire de l’autre et à s’enrichir de ce qu’il découvre. Objectif : faire tomber certaines barrières par la compréhension de l’autre. Un compromis entre certaines activités sera ensuite trouvé sur la base de l’égoïsme partagé.
Un exemple : Mathias n’accompagne pas sa femme pour sa sortie shopping et pendant ce temps-là, il en profite pour aller à la salle de sport. En revanche, ils iront en couple dans la belle-famille.
Complimenter l’autre et le valoriser, même en cas de tempête conjugale, fait partie des réflexes salvateurs pour une bonne communication. Si l’envie de faire un reproche se fait sentir, le précéder d’une considération positive peut être une astuce afin de ne pas enfermer l’autre dans une image négative. La communication non violente est alors d’un bon secours. Elle consiste à identifier ses besoins en utilisant le « je » et en exprimant ses sentiments et ses besoins sans accuser l’autre. Par exemple : plutôt que de dire « tu es méchant, tu m’as rabaissée », dire : « je me sens triste et rabaissée par tes propos ».
2.AGIR D’ABORD, PENSER ENSUITE
En cas de tension ou de dispute, rien ne sert de continuer la discussion qui peut aller de mal en pis. Faites fonctionner le corps plutôt que la tête ! Concrètement, plutôt que de ruminer ou de vous emporter, « allez faire un tour », conseille Le Dr Mimoun. Faire une petite promenade, parcourir le pâté de maisons ou bien faire un peu de sport est un bon moyen de se recentrer sur soi pour se vider l’esprit et faire retomber les émotions.
Autre astuce imbattable : la respiration ventrale. En cas de stress et d’énervement, revenir à son souffle en gonflant l’abdomen à l’expiration aide à ramener le calme en son for intérieur.
Petit atelier pratique : prenez une poignée de minutes pour vous isoler et vous installer confortablement. Inspirez longuement par le nez et expirez doucement et longuement en gonflant votre ventre. Vous pouvez poser vos mains sur l’abdomen afin de mieux suivre le flux respiratoire apaisant.
3.RÉAJUSTER L’ÉDUCATION QUI REND MALHEUREUX
Certains réflexes hérités de l’éducation donnent souvent des préjugés qui s’installent avec les années, potentiellement source d’ incompréhensions et de difficultés au sein du couple. En cas de décalage culturel ou social par exemple, un effort de communication doit être fait afin qu’il n’y ait aucun complexe d’infériorité sociale chez l’un ou l’autre. Cela passe par une valorisation de ses qualités afin d’éviter tout rapport de force dominant /dominé destructeur sur le long terme.
4. NE PAS TOUT DIRE
Toute vérité n’est pas bonne à dire dans le couple. Faire preuve de totale transparence envers l’autre (faiblesses, traumatismes, infidélités) n’est pas forcément judicieux et peut à terme assécher la relation. C’est l’altérité, voire la part d’ombre de l’autre qui entretient le manque, le désir. « L’égoïsme partagé consiste à ne pas tout dévoiler, à garder votre part de mystère, à mentir par omission, voire mentir tout court. La priorité n’est pas que l’autre sache tout mais qu’il se sente bien », détaille le Dr Sylvain Mimoun dans son livre. Une dose d’indépendance est également importante pour ne pas « s’asphyxier » et continuer à grandir comme un arbre aux côtés de l’autre.
De la même manière, raconter tout à son conjoint, et déverser le lot de tracas et de stress accumulés la journée est une habitude contre-productive qui peut aussi épuiser le partenaire. Plutôt que de transformer vos moments en confessionnal ou en bureau des doléances, privilégiez le badinage et l’humour. « Il est important d’instituer le jeu dans le couple en restant dans quelque chose de léger », insiste le thérapeute de couple.
5. VIVRE DANS L’INSTANT PRÉSENT
De nombreux couples regardent le passé et l’avenir avec moult projets au point d’en oublier le moment présent, observe le thérapeute qui invite à profiter de chaque instant en pleine conscience. Vivre à 100 % les moments passés seul ou à deux est une clé du partage et de l’égoïsme partagé. Par exemple si vous vous promenez à la mer, plutôt que d’évoquer des souvenirs, des expériences ou des activités des prochains jours, revenez à votre ressenti. Le « faire » parasite parfois l’instant présent. Pourquoi ne prévoir aucune sortie de temps en temps ? L’expérience de la vacuité, de cette absence de projet oblige à vous recentrer sur vous et à vous consacrer également à votre conjoint dans un tête-à-tête.
De même lorsque vous ressentez un vague à l’âme, un spleen difficile à expliquer, laissez venir ces émotions sans jugement et apprenez à cohabiter avec sans tenter de rationaliser.